La découverte d’environ 250 milliards de FCFA sur un compte attribué à l’ancien président gabonais.
Ali Bongo n’est pas seulement un scandale national : c’est le symbole d’un système régional, où corruption de haut niveau, réseaux mafieux transnationaux et détournements massifs de fonds publics constituent une menace directe pour la sécurité économique de l’Afrique centrale.
Ce trésor caché, mis au jour après le renversement du régime en août 2023, éclaire brutalement plus de cinq décennies de kleptocratie organisée. Les enquêtes de la transition gabonaise montrent que le clan Bongo aurait accumulé des flux financiers difficilement traçables, hérités d’un système où l’État fonctionnait comme une caisse privée.
Une perte colossale : ce que 250 milliards auraient pu construire

Pour saisir l’ampleur du choc. D’après les experts :
- 250 milliards FCFA, c’est l’équivalent de 80 hôpitaux de district,
- 1 200 écoles primaires,
- ou plus de 500 km de routes bitumées dans un pays où la majorité des infrastructures reste sous-développée.
Sur 20 ans, les experts estiment que la corruption en Afrique centrale représente entre 15 % et 30 % des budgets nationaux, soit au moins 25 000 milliards FCFA détournés, évaporés ou blanchis hors du continent. C’est l’équivalent de 10 fois le budget annuel combiné de tous les pays de la sous-région.
Un système régionalisé : réseaux, devises et intelligences économiques mafieuses
Le cas gabonais n’est pas isolé. La corruption en Afrique centrale repose sur des réseaux transfrontaliers mêlant :
- élites politiques,
- entreprises écrans,
- banques offshores,
- sociétés minières étrangères,
- et acteurs criminels locaux.
Les détournements sont facilités par :
1. La porosité monétaire : La sortie illégale des devises via Douala, Brazzaville et Libreville atteint jusqu’à 3 à 5 milliards de dollars par an, selon les institutions régionales.
2. L’absence de coordination dans la lutte contre le vol de deniers publics : Chacun enquête dans son coin, ce qui permet aux flux criminels de circuler entre Cameroun, Congo, RCA et Gabon sans risque.
3. L’absence de contre-intelligence économique : Les États disposent de services de sécurité classiques, mais presque aucun n’a structuré une cellule de renseignement dédiée aux flux financiers et aux détournements d’élites.

Un impact direct sur la sécurité : pauvreté, instabilité, explosivité sociale
La corruption massive n’est pas seulement un problème moral : elle nourrit les rebellions, le banditisme, les tensions ethniques et les crises politiques. En RDC, RCA, Cameroun et Tchad, la captation des ressources par les élites a directement favorisé :
- le recrutement par les groupes armés,
- l’effondrement des services sociaux,
- la dépendance géopolitique extérieure,
- la fragilité institutionnelle.
Quelles solutions pour éviter un autre « cas Bongo » ?
1. Création d’une Autorité régionale anti-corruption Afrique centrale (ARAC)
Modèle inspiré de l’OLAF (UE), avec mandat de :
- tracer les flux financiers,
- enquêter dans les États voisins,
- collaborer avec Interpol et Europol.
2. Sécurité économique et renseignement financier : Chaque État doit créer une Direction de l’Intelligence Économique d’État avec accès aux banques, ports, compagnies pétrolières et douanes.
3. Sanctions automatiques : Gel des avoirs, interdiction d’exercer, privation de droits politiques.
4. Restitution obligatoire des fonds pillés : Avec réinvestissement direct dans les infrastructures locales, sous supervision citoyenne.

Le scandale Bongo doit devenir un tournant régional
Si le Gabon parvient à récupérer ces 250 milliards, ce sera un signal historique : la fin de l’impunité des élites prédatrices. L’Afrique centrale ne pourra assurer sa sécurité, sa stabilité et son développement qu’en traitant la corruption non comme un simple délit, mais comme une menace stratégique, au même titre que le terrorisme ou les ingérences étrangères.