Une opération conjointe menée par les forces du Cameroun, du Nigeria et du Tchad a permis la libération de dix enfants enlevés par des éléments présumés de Boko Haram dans l’Extrême-Nord camerounais. Un adolescent n’a pas survécu à la captivité.
Une semaine après leur enlèvement, dix enfants camerounais ont été libérés ce jeudi dans la région de l’Extrême-Nord, à la suite d’une opération conjointe menée par les forces armées et de sécurité du Cameroun, du Nigeria et du Tchad, appuyées par la Force multinationale mixte (FMM).
Selon le gouverneur de la région, les enfants avaient été kidnappés le 13 août alors qu’ils se trouvaient à bord d’un bus assurant la liaison entre Kousseri et Maroua, sur la route nationale N°1. L’attaque a été attribuée à des membres présumés de Boko Haram, un groupe islamiste actif depuis plus d’une décennie autour du bassin du lac Tchad.
Les enfants ont été retrouvés vivants à environ vingt kilomètres de la frontière nigériane, mais un adolescent enlevé au même moment a malheureusement été tué par les ravisseurs, ont précisé les autorités locales.
Une coordination régionale en progrès
Cette libération marque un succès important pour la coopération régionale contre Boko Haram. La Force multinationale mixte, qui regroupe les armées du Cameroun, du Nigeria, du Tchad et du Niger, a renforcé ses opérations transfrontalières dans les zones reculées du lac Tchad, où le groupe djihadiste reste actif malgré des revers militaires répétés.
L’efficacité de cette dernière opération met en lumière la montée en puissance des mécanismes de coordination entre les forces armées des trois pays directement concernés, dans une région où les frontières poreuses facilitent les mouvements des groupes armés.
L’Extrême-Nord toujours sous pression
Depuis 2014, la région de l’Extrême-Nord du Cameroun reste l’un des points chauds du conflit contre Boko Haram, avec des centaines d’attaques, de kidnappings et de déplacements forcés. Bien que l’activité du groupe ait diminué par rapport à son pic, il conserve une capacité de nuisance importante, notamment via des cellules locales opérant de manière mobile.
Les enlèvements d’enfants et de civils restent une stratégie de terreur utilisée pour obtenir rançons, recruter de force ou déstabiliser les communautés locales.
Une dynamique à maintenir
La récente opération de libération montre que la réponse militaire régionale peut porter ses fruits lorsqu’elle est rapide, coordonnée et appuyée par des échanges d’information efficaces. Mais les analystes sécuritaires soulignent que la seule dimension militaire ne suffira pas à éradiquer durablement l’insurrection islamiste.
La stabilisation de la région exige aussi des programmes de développement, de réinsertion des ex-combattants et de renforcement de l’État dans les zones rurales marginalisées où Boko Haram recrute.
La libération des enfants est un motif de soulagement, mais elle rappelle aussi la fragilité persistante des zones frontalières du bassin du lac Tchad. La consolidation des acquis sécuritaires passera par une approche régionale intégrée, mêlant sécurité, développement et résilience communautaire.
Lutte contre Boko Haram : Chronologie synthétique opérations régionales
🔹 2015 – Création de la Force multinationale mixte (FMM)
- Juillet 2015 : Sous l’égide de la Commission du bassin du lac Tchad (CBLT) et avec l’approbation de l’Union africaine, la FMM est officiellement relancée (elle existait de façon limitée depuis 1994) pour lutter contre Boko Haram.
- Composée de plus de 8 000 soldats venant du Nigeria, Tchad, Cameroun, Niger et Bénin, elle coordonne les efforts militaires dans les zones transfrontalières.
🔹 2015 – Opération « Lafiya Dole » (Nigeria)
- L’armée nigériane lance cette grande opération militaire pour reprendre les territoires occupés par Boko Haram dans le nord-est du Nigeria (Borno, Yobe).
- Appui ponctuel du Tchad et du Cameroun, notamment à la frontière de Gwoza et de Sambisa.
🔹 2016 – Offensive conjointe Nigéria–Cameroun–Tchad
- Mai-juin 2016 : La FMM mène une série de raids coordonnés sur les îles du lac Tchad, servant de repli stratégique à Boko Haram.
- Plus de 150 combattants neutralisés, plusieurs camps détruits.
🔹 2017 – Début des opérations transfrontalières coordonnées
- La coopération s’intensifie avec des opérations synchronisées, notamment dans la zone des monts Mandara (Cameroun-Nigéria) et les îles du lac Tchad.
- Le Tchad envoie plusieurs bataillons au Nigeria et au Niger.
🔹 2020 – « Colère de Bohoma » (Tchad)
- Avril 2020 : Après une attaque meurtrière contre une base militaire à Bohoma (100 soldats tués), le président Idriss Déby lance une riposte massive, avec des troupes envoyées jusqu’en territoire nigérian.
- Cette opération élimine plus de 1 000 combattants selon les autorités tchadiennes, et force Boko Haram à reculer.
🔹 2021 – Mort d’Abubakar Shekau
- Mai 2021 : Le chef historique de Boko Haram meurt lors d’un affrontement avec l’État islamique en Afrique de l’Ouest (ISWAP), une faction dissidente plus structurée.
- La FMM intensifie ses opérations pour contenir l’ISWAP, désormais dominant dans le nord du Nigeria.
🔹 2022 – Reprise des opérations dans les zones insulaires du lac Tchad
- Les armées du Tchad et du Niger mènent des actions coordonnées contre les poches de Boko Haram cachées dans les îlots marécageux.
- Plusieurs bases logistiques du groupe sont détruites.
🔹 2023 – Offensive autour de Kukawa (Nigeria)
- L’armée nigériane lance une offensive dans l’État de Borno, avec un appui de la FMM pour encercler des cellules de l’ISWAP.
- Plus de 200 otages libérés, dont des femmes et enfants capturés dans des attaques de villages.
🔹 Août 2024 – Opération transfrontalière « Shara »
- Conduite dans les zones de Kolofata (Cameroun), Diffa (Niger) et Damasak (Nigeria).
- Objectif : neutraliser les regroupements jihadistes mobiles et rétablir la liberté de circulation pour les populations déplacées.
🔹Août 2025 – Libération de dix enfants au Cameroun
- Le 21 août 2025, dix enfants enlevés par des éléments présumés de Boko Haram sont libérés par une opération conjointe Cameroun–Tchad–Nigeria, à la frontière du Nigeria.
- Illustration concrète de la coopération régionale active, malgré les défis persistants.