Le tout dernier Indice de performance des ports à conteneurs (IPPC), publié en 2025 par la Banque mondiale et S&P Global Market Intelligence, met en lumière la nette progression de plusieurs ports africains, mais aussi l’absence remarquée du Cameroun, dont Douala et Kribi ne figurent pas parmi les 10 premiers ports performants du continent.
Alors que des plateformes comme Port-Saïd (Égypte) et Tanger Med (Maroc) se hissent respectivement au 3e et 5e rang mondial, illustrant la montée en puissance logistique de l’Afrique du Nord, aucun port camerounais ne figure même dans le Top 100 mondial.
Douala et Kribi : potentiel géostratégique sous-exploité
Le port de Douala, principal poumon maritime du Cameroun, reste confronté à de multiples défis : saturation des quais, lenteur des procédures douanières, corruption persistante et insuffisance d’investissements dans la modernisation. Ces faiblesses structurelles réduisent son attractivité pour les grandes compagnies maritimes.
De son côté, le port en eau profonde de Kribi, lancé en 2018 avec l’ambition d’en faire un hub régional, dispose d’un potentiel logistique considérable. Il est géré en partie par des acteurs internationaux comme CMA CGM ou Bolloré, mais souffre d’un déficit de connectivité terrestre, notamment avec l’arrière-pays tchadien et centrafricain. « Kribi ne manque pas d’infrastructure, il manque d’interconnexion logistique », commente un expert en commerce régional.
Un risque de marginalisation dans la compétition maritime régionale
Alors que les ports africains de l’Est et de l’Ouest modernisent leurs systèmes, digitalisent leurs opérations et sécurisent des partenariats internationaux, l’Afrique centrale, et particulièrement le Cameroun, risque de perdre sa position stratégique dans les échanges régionaux et mondiaux.
Dans le contexte actuel, marqué par des réalignements géopolitiques (crise en mer Rouge, détournement des routes commerciales), les ports ne sont plus seulement des terminaux logistiques, mais des acteurs stratégiques de souveraineté et d’influence économique.
« La performance portuaire est désormais un indicateur direct de compétitivité nationale », souligne un rapporteur de la Commission économique pour l’Afrique.
Un choix politique à faire
Le classement IPPC 2025 est un signal d’alarme, mais aussi une opportunité de redéfinir la stratégie portuaire nationale. Modernisation numérique, fluidification des corridors Douala-Ndjamena et Kribi-Bangui, gouvernance portuaire transparente et partenariats public-privé efficaces sont désormais incontournables.
Top 10 des ports à conteneurs les plus performants d’Afrique en 2024
(Classement basé sur l’efficacité opérationnelle, le temps d’escale et la productivité des terminaux)
| Rang Afrique | Rang Mondial | Port | Pays | Score IPPC 2024 |
| 1 | 3 | Port-Saïd | Égypte | 137,4 |
| 2 | 5 | Tanger Med | Maroc | 136,0 |
| 3 | ~130* | Dakar | Sénégal | 22,8 |
| 4 | 163 | Mogadiscio | Somalie | ~10 |
| 5 | ~180* | Toamasina | Madagascar | — |
| 6 | — | El Dekheila | Égypte | — |
| 7 | — | Sokhna | Égypte | — |
| 8 | — | Freetown | Sierra Leone | — |
| 9 | — | Conakry | Guinée | — |
| 10 | 243 | Berbera | Somaliland | -3 |