Bill Gates injecte 2,5 milliards de dollars en Afrique : levier de santé publique ou diplomatie d’influence ?

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La Fondation Gates lance le plus vaste programme privé jamais engagé pour la santé des femmes en Afrique, dans un contexte de désengagement public occidental.

Dans un mouvement d’ampleur sans précédent, la Fondation Bill & Melinda Gates a annoncé le 4 août un engagement de 2,5 milliards de dollars dédié à la santé des femmes en Afrique. Cette somme, la plus importante jamais débloquée d’un seul trait par la fondation sur le continent, marque le début d’un plan global visant à distribuer près de 200 milliards de dollars d’ici à 2045, date prévue de sa fermeture.

Ce financement, réparti sur une quarantaine de projets innovants, vise à réduire la mortalité maternelle, améliorer la santé gynécologique et soutenir la recherche sur les infections sexuellement transmissibles, la prééclampsie ou encore des contraceptions non hormonales. L’enjeu est double : réduire les coûts des politiques publiques et accélérer leur efficacité grâce à l’innovation. « Ce programme vise à combler des lacunes critiques là où les financements publics sont absents », précise le communiqué de la fondation.

Une stratégie sanitaire… et géopolitique

Sur le plan sanitaire, cet engagement intervient dans un contexte fragile : les systèmes de santé de nombreux pays africains, déjà sous pression post-Covid, peinent à financer des services de base. La féminisation de la pauvreté, la sous-médicalisation des zones rurales, et le recul de l’aide publique au développement (APD) rendent cette initiative potentiellement salvatrice.

Mais selon Bruno Cabrillac, économiste à la Fondation pour les études et la recherche sur le développement international (Ferdi), la montée en puissance des fondations pose aussi des questions d’équilibre : « Les fondations philanthropiques ne veulent pas se substituer à l’aide publique, car cela risquerait de créer un aléa moral et d’encourager les États à se désengager ».

Une reconfiguration de l’intelligence économique mondiale ?

À moyen terme, cette stratégie peut aussi être lue comme un investissement dans la stabilité des marchés africains, essentiels à la croissance mondiale. Les fondations comme Gates, fortement intégrées à des réseaux technologiques et pharmaceutiques mondiaux, influencent déjà les normes de santé, les chaînes de valeur et les régulations, ce qui confère un poids stratégique croissant aux acteurs privés dans les politiques publiques.

Dans un contexte où l’USAID ferme des programmes et où l’aide européenne se fragilise, les fondations américaines prennent le relais – mais avec leurs logiques, leurs agendas, et leurs priorités.

Réserves et vigilance

Si l’impact potentiel est énorme, des réserves persistent. L’absence de contrôle parlementaire, la faiblesse des systèmes de redevabilité locaux et le risque de dépendance technologique pourraient altérer la souveraineté sanitaire des États bénéficiaires. Le danger, à long terme, serait un décrochage stratégique africain, piloté par des mécènes plutôt que par des politiques concertées.

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