Le gouvernement rwandais a annoncé avoir signé un accord discret avec les États-Unis visant à accueillir jusqu’à 250 migrants expulsés du territoire américain.
Ce partenariat, officialisé en juin dernier à Kigali, s’inscrit dans la politique migratoire ferme de l’administration Trump, axée sur la réinstallation des personnes jugées indésirables dans des pays tiers.
Selon un responsable rwandais ayant requis l’anonymat, une première liste de dix personnes aurait déjà été transmise par Washington aux autorités de Kigali pour évaluation. La porte-parole du gouvernement rwandais, Yolande Makolo, a justifié cette décision par les valeurs de solidarité du pays : « Le Rwanda a accepté en partie parce que presque chaque famille rwandaise a connu les difficultés du déplacement. Nos valeurs reposent sur la réintégration ».
L’accord prévoit que Kigali conserve un droit de regard individuel sur chaque cas, avec un accompagnement des migrants réinstallés incluant formation professionnelle, accès aux soins et soutien au logement.
Le Rwanda, nouveau hub d’accueil migratoire ?
Ce n’est pas la première fois que Kigali se positionne comme partenaire de pays occidentaux en matière d’immigration. En 2022, le Rwanda avait signé un accord similaire avec le Royaume-Uni pour accueillir des milliers de demandeurs d’asile – un projet controversé qui n’a finalement jamais abouti, abandonné en 2024 par le gouvernement Starmer.
Cette nouvelle entente avec Washington relance les interrogations sur la fiabilité du Rwanda en matière de droits humains, plusieurs ONG dénonçant un climat de répression politique, peu compatible avec la réinstallation de populations vulnérables.
Enjeux et critiques
L’accord s’inscrit dans une stratégie plus large de l’administration Trump, qui entend expulser rapidement des migrants, y compris des condamnés pénaux, vers des pays tiers, comme le Soudan du Sud, l’Eswatini ou désormais le Rwanda. Les défenseurs d’une ligne dure saluent une méthode « efficace » pour traiter des cas complexes.
En revanche, les détracteurs dénoncent une politique inhumaine et dangereuse, rappelant que nombre de ces migrants sont envoyés dans des pays où ils n’ont ni repères, ni réseaux, ni langue, et où leur sécurité n’est pas garantie.
Un modèle sous tension juridique
Alors que la Cour suprême américaine a validé en juin les expulsions sans audience préalable, la légalité de ces accords bilatéraux reste contestée devant un tribunal fédéral de Boston. L’affaire pourrait remonter à la Cour suprême, désormais à majorité conservatrice, renforçant les inquiétudes sur la fragilisation des droits des migrants.
Dans ce contexte, le Rwanda, qui se présente comme un pays stable et accueillant, mise sur une image de partenaire responsable, malgré les critiques persistantes. Ce rôle d’État hôte pour les migrants rejetés pourrait renforcer sa stature diplomatique – ou au contraire, accroître la pression internationale, s’il ne parvient pas à garantir la protection effective de ces personnes.