Face aux massacres attribués aux Forces de soutien rapide (FSR) au Nord-Darfour, la France condamne les exactions et exhorte les acteurs étrangers à cesser d’alimenter un conflit désormais géo-économique et régionalement déstabilisateur.
La France a dénoncé avec vigueur les « atrocités à caractère ethnique » commises par les Forces de soutien rapide (FSR) à El-Fasher, dans le Nord-Darfour. Dans un communiqué, le ministère de l’Europe et des Affaires étrangères a évoqué « des exécutions sommaires, des viols et des massacres de civils », ainsi que des attaques contre des humanitaires. Paris a appelé à « la protection immédiate des populations » et exigé que « les auteurs répondent de leurs crimes devant la justice internationale ».
Depuis la prise d’El-Fasher par les FSR, le 26 octobre, la situation humanitaire s’est effondrée. Issues des anciennes milices Janjawid, les FSR poursuivent une offensive marquée par une logique de purification ethnique. Selon les Nations unies, plus de 9 millions de Soudanais sont déplacés, dont 1,8 million réfugiés dans les pays voisins. Le Programme alimentaire mondial (PAM) estime que 25 millions de personnes, soit la moitié de la population, ont désormais besoin d’une aide d’urgence. La décision de Khartoum d’expulser des responsables du PAM a, selon Paris, « gravement compromis » la coordination humanitaire.
Sur le plan politique, la guerre qui oppose depuis avril 2023 l’armée du général Abdel Fattah al-Burhane aux FSR du général Mohamed Hamdan Dagalo, dit Hemetti, menace de fracturer durablement le pays. L’Union africaine appelle à un « cessez-le-feu immédiat et vérifiable », tandis que le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, dénonce « une guerre alimentée par des soutiens extérieurs et des intérêts économiques concurrents ».
En effet, le conflit soudanais est désormais autant militaire qu’économique. Les FSR contrôlent une partie des mines d’or du Darfour, dont la production alimente un trafic régional estimé à plus d’un milliard de dollars par an. Plusieurs rapports des Nations unies mettent en cause des circuits de contrebande reliant le Tchad, la Centrafrique et Dubaï. « L’or est devenu l’arme silencieuse de la guerre soudanaise », confie un diplomate.
Sur la scène internationale, Paris s’aligne sur Washington, Londres et Bruxelles pour exiger la fin des livraisons d’armes et soutenir des sanctions ciblées contre les chefs militaires. Les bailleurs de fonds – Banque mondiale, FMI et Banque africaine de développement – maintiennent la suspension de leur aide, évaluée à plus de 2,5 milliards de dollars, en attente d’un retour à un pouvoir civil.
Pour la diplomatie française, l’enjeu dépasse l’urgence humanitaire. « Le Soudan se situe au cœur d’un arc d’instabilité qui s’étend du Sahel à la mer Rouge », souligne un haut diplomate du Quai d’Orsay. Sans un sursaut collectif, le pays risque, selon les observateurs, une « somalisation prolongée » : une guerre sans fin où les rivalités ethniques, les trafics et l’économie de guerre s’autoalimentent dans un silence international préoccupant.