juillet 2025

Le retrait des États-Unis de l’UNESCO : une fenêtre stratégique pour l’Afrique et la candidature de Firmin Édouard Matoko

Le retrait annoncé des États-Unis de l’UNESCO, prévu pour entrer en vigueur fin 2026, ouvre une phase charnière pour l’avenir de la gouvernance culturelle mondiale. Ce désengagement américain, à la fois symbolique et structurel, redéfinit les rapports de force au sein de l’organisation. Il crée un espace stratégique que des puissances moyennes et émergentes, en particulier africaines, cherchent désormais à investir. Dans ce contexte, la candidature du Congolais Firmin Édouard Matoko à la direction générale de l’UNESCO en novembre prochain, prend une dimension nouvelle, à la croisée de la diplomatie Sud-Sud, des enjeux géoéconomiques liés à la culture et de la reconfiguration du multilatéralisme mondial. Une recomposition diplomatique en cours Historiquement, les États-Unis ont pesé lourdement sur les orientations de l’UNESCO, tant par leur contribution budgétaire que par leur capacité d’influence sur les normes culturelles et éducatives globales. Leur retrait marque une perte d’équilibre traditionnel, au profit d’acteurs plus discrets mais déterminés à renforcer le poids du multilatéralisme inclusif. La Chine, l’Inde, les pays du Golfe et plusieurs États africains investissent aujourd’hui les arènes culturelles internationales comme levier de projection de puissance douce. Dans ce vide relatif laissé par Washington, la candidature de Firmin Édouard Matoko, fort de plus de trente ans d’expérience à l’UNESCO, s’impose comme une réponse légitime et stratégique à une demande croissante d’un leadership décentré, porté par les réalités du Sud global. Matoko a su incarner au sein de l’organisation la vision d’une Afrique actrice et non spectatrice, particulièrement à travers son mandat comme sous-directeur général pour la priorité Afrique et les relations extérieures. Une vision panafricaine adaptée aux enjeux globaux La vision défendue par Matoko repose sur une redéfinition des priorités éducatives, scientifiques et culturelles à l’aune des défis africains – mais également transversaux : transformation numérique, intelligence artificielle inclusive, préservation des savoirs endogènes, cohésion sociale, sécurité culturelle dans les zones fragiles. Son initiative phare, Africa Lab, vise à faire de l’Afrique un incubateur d’innovations éducatives et culturelles adaptables aux autres régions du monde. Il s’agit là d’une logique de « co-construction normative« , à rebours des approches descendantes souvent critiquées dans la gouvernance internationale. Le multilatéralisme culturel à l’épreuve des fractures globales L’élection du prochain directeur général, attendue pour fin 2025 à Samarcande, se tiendra dans un contexte de polarisation géopolitique croissante, marqué par les guerres informationnelles, le repli souverainiste, mais aussi la montée de revendications pour un multilatéralisme plus équitable. Dans ce contexte, l’UNESCO reste l’un des rares espaces onusiens où la diplomatie culturelle peut encore désamorcer certaines tensions, à condition d’être portée par une vision équilibrée, représentative et capable de s’adapter aux réalités du XXIe siècle. La candidature Matoko, en capitalisant sur la sortie américaine, peut ainsi incarner une alternative crédible à une gouvernance polarisée ou trop technocratique. Vers une reconfiguration du leadership mondial de l’UNESCO Au-delà de l’enjeu personnel, la possible élection d’un dirigeant africain à la tête de l’UNESCO aurait une portée historique. Elle marquerait l’aboutissement d’un processus de maturation diplomatique du continent africain dans les institutions multilatérales, mais aussi un rééquilibrage attendu du soft power mondial. Cette recomposition serait d’autant plus significative qu’elle pourrait renforcer des alliances structurelles entre pays du Sud, tout en consolidant les objectifs de l’Agenda 2063 de l’Union africaine et ceux de la coopération culturelle Sud-Sud. Le retrait des États-Unis de l’UNESCO ne signe pas un affaiblissement de l’organisation, mais plutôt un tournant. Il ouvre une brèche dans laquelle des leaderships alternatifs, porteurs d’une vision inclusive, peuvent émerger. La candidature de Firmin Édouard Matoko cristallise cette dynamique : elle représente à la fois une opportunité politique, une légitimité institutionnelle et une ambition stratégique pour faire de l’UNESCO un véritable moteur de la diplomatie culturelle mondiale, à l’ère post-occidentale. Noël Ndong

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Cameroun : Paul Biya supprime les lignes 65 et 94  – Vers une nouvelle ère de transparence ou simple manœuvre politique ?

Dans une décision sans précédent, le président camerounais Paul Biya a ordonné la suppression des lignes budgétaires 65 (dépenses communes de fonctionnement) et 94 (interventions en investissements) dès l’exercice 2026. Ces lignes, longtemps au cœur des critiques pour leur opacité, sont désormais au centre d’un vaste débat politique, économique et électoral, à l’approche de la présidentielle de 2025. Les lignes 65 et 94 : leviers d’opacité budgétaire Pendant plus d’une décennie, les lignes 65 et 94 ont permis de financer diverses dépenses publiques sans obligation claire de justification, ni visibilité publique. En 2022, un audit ordonné par la présidence a révélé que plus de 5 000 milliards de FCFA avaient été engagés entre 2010 et 2021 via ces canaux. Parmi les irrégularités relevées : Suppression actée et nouvelle dotation plafonnée Le chef de l’État a décidé de mettre fin définitivement à ces lignes budgétaires à compter de 2026. À leur place, une nouvelle ligne appelée « dotation spéciale » sera introduite, avec un plafond de 10 % des crédits du budget de l’État. Cette réforme a pour objectif de centraliser, justifier et rationaliser les dépenses non programmées, tout en réduisant les risques de corruption. Réactions de l’opposition : « Une victoire incomplète » La classe politique d’opposition, notamment le MRC de Maurice Kamto – candidat à l’élection présidentiel sous la bannière Manidem – et le PCRN de Cabral Libii, a accueilli favorablement l’annonce, mais déplore une absence de poursuites concrètes contre les responsables identifiés. Selon un communiqué du MRC : « Cette suppression est la preuve d’une mauvaise gestion longtemps dénoncée. Si elle n’est pas suivie d’enquêtes judiciaires et de sanctions exemplaires, elle restera un simple effet d’annonce ». L’opposition appelle également à plus de transparence sur les résultats de l’audit, à une publication des noms des agents impliqués, et à une réforme globale des mécanismes de contrôle budgétaire. Comparaisons régionales *Rwanda : Avec un indice de perception de la corruption élevé (57/100), le Rwanda est l’un des rares pays de la sous-région à avoir réussi à réduire significativement la corruption, grâce à la numérisation des services publics, des sanctions sévère et un engagement politique contre l’impunité. *RDC & RCA : En République Démocratique du Congo et en Centrafrique, les lignes budgétaires équivalentes sont souvent encore plus opaques, avec très peu de contrôle parlementaire ou citoyen. L’indice Open Budget Survey 2023 classe la RCA à 6/100, l’un des pires scores au monde. *Cameroun : Avec 50/100 au même indice, le Cameroun se situe au-dessus de la moyenne régionale, mais loin des standards internationaux. La suppression des lignes 65 et 94 pourrait permettre une remontée significative dans les classements internationaux, à condition que la réforme soit réelle, suivie et auditable. Implications pour l’élection présidentielle de 2025 * Certains observateurs, y voient une manœuvre politique pour désarmer les critiques internes (clans rivaux au sein du régime) ;montrer une image réformiste à la communauté internationale ; restaurer la légitimité du pouvoir avant l’élection prévue fin 2025. *Mobilisation de l’opposition : Des mouvements citoyens comme « 11 millions d’inscrits » visent à encourager l’enrôlement des jeunes sur les listes électorales. La réforme budgétaire pourrait alimenter leur discours, en montrant que le changement est possible si la pression citoyenne augmente. *Risque de désillusion : Si aucune suite judiciaire n’est donnée à l’audit et que les mêmes mécanismes de détournement se réinstallent ailleurs, cela pourrait aggraver le désenchantement politique, en particulier chez les jeunes, qui représentent près de 60 % de la population électorale, mais dont beaucoup restent non-inscrits. Rupture ou recyclage du système ? La suppression des lignes 65 et 94 représente une occasion historique de restaurer la transparence budgétaire au Cameroun. Elle constitue un signal fort, mais son efficacité dépendra de la volonté politique à poursuivre les fautifs ; de la réforme structurelle des mécanismes de contrôle. Dans le contexte sensible de la présidentielle de 2025, cette réforme budgétaire pourrait devenir un tournant décisif – soit en instaurant une nouvelle ère de gestion publique, soit en révélant une énième opération de communication sans suite. Noël Ndong

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Économie bleue : le Gabon avance, le Cameroun cherche sa voie dans un Golfe de Guinée sous tension

En juillet 2025, le Gabon a officialisé sa stratégie nationale pour l’économie bleue, ambitionnant de structurer durablement ses secteurs maritime et halieutique. Présentée par la ministre de la Mer, cette feuille de route s’articule autour de six axes prioritaires : gouvernance, cadre juridique, infrastructures, surveillance, durabilité et coopération. « Le Gabon fait le choix d’un développement intégré et durable des ressources maritimes. C’est une réponse à la fois économique, sociale et environnementale », a souligné Laurence Ndong. Cameroun : un potentiel à structurer Le Cameroun, pourtant doté de 402 km de côtes et d’un potentiel halieutique estimé à 150 000 tonnes/an, ne dispose pas encore d’une stratégie d’économie bleue unifiée. Les efforts sont dispersés entre modernisation portuaire, accords bilatéraux de pêche, et projets côtiers ponctuels. Dr Hugues Nguemwo, expert en économie maritime basé à Douala, explique : « Il manque une vision intersectorielle, articulée à la planification nationale et aux enjeux climatiques et sécuritaires ». Ajoutant : « Le Gabon donne l’exemple d’une gouvernance cohérente. Le Cameroun gagnerait à s’en inspirer pour valoriser ses ressources et sécuriser son espace maritime ». Une région sous haute tension : les risques maritimes croissants Le Golfe de Guinée, qui s’étend de la Guinée au Congo, est devenu en une décennie l’épine dorsale maritime de l’Afrique de l’Ouest et centrale, mais aussi une zone à haut risque. Il concentre plus de 40 % des incidents de piraterie maritime en Afrique, selon l’Office maritime international (OMI, 2024). « La piraterie a évolué vers des formes plus organisées, impliquant parfois des complicités locales, et affectant les chaînes logistiques », note un rapport de l’Institut d’études de sécurité basé à Dakar. Autres menaces majeures : Face à cela, la coordination régionale demeure limitée, malgré la mise en place de mécanismes tels que le Code de conduite de Yaoundé (2013) et les centres régionaux de sécurité maritime (CRESMAO et CRESMAC). « Sans une coopération régionale renforcée et des stratégies nationales robustes, le potentiel économique de la mer restera vulnérable », alerte un officier de la Commission du Golfe de Guinée. Alors que le Gabon structure son économie bleue dans une approche proactive et durable, le Cameroun dispose d’atouts stratégiques mais manque encore d’un cadre politique intégré. Dans un Golfe de Guinée en proie à des risques croissants, la souveraineté maritime, la sécurité des ressources et l’attractivité économique dépendent désormais d’une vision partagée, sécurisée et écologiquement viable. Noël Ndong

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UNESCO : nouveau retrait des Etats-Unis, une fracture dans l’engagement multilatéral

Le gouvernement américain a annoncé un nouveau retrait de l’UNESCO (Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture), effectif au 31 décembre 2026. Il s’agit du troisième retrait historique des Etats-Unis depuis 1945 : après les départs de 1984  sous Reagan et 2018 sous Trump I , puis la réintégration en 2023 sous l’administration Biden. L’administration Trump II avance que l’UNESCO promeut des agendas « divisifs« , jugés contraires aux intérêts nationaux : soutien à la reconnaissance de l’État palestinien, biais anti-israélien, initiatives « DEI » (diversité, équité, inclusion) qualifiées de « woke« . Impact budgétaire et stratégique Les États-Unis contribuaient à environ 8 % du budget de l’UNESCO (contre 20‑22 % jusqu’en 2011), et leur départ entraînera une réduction notable des financements couverts, notamment en matière d’éducation, patrimoine et droits humains. Bien que moins dépendante qu’auparavant, l’agence subira néanmoins les effets sur certains programmes clés, notamment ceux soutenus historiquement par les États-Unis. Enjeux géopolitiques et diplomatiques Ce retrait s’inscrit dans la doctrine « America First », marquée par une défiance vis-à-vis des organisations multilatérales. Il reprend la logique de retrait d’autres entités internationales telles que l’OMS ou le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies. Des critiques mentionnent une tentative de neutralisation de l’influence croissante de la Chine au sein de l’UNESCO, notamment dans les domaines éducatifs et technologiques. En s’éloignant, les États-Unis perdent une position stratégique dans la légitimation des normes globales. Réactions et périmètre d’impact La directrice générale de l’UNESCO, Audrey Azoulay, a exprimé ses regrets tout en assurant que l’organisation resterait résiliente, renforcée par ses financements diversifiés. Pour les experts, ce retrait pourrait affaiblir la lutte contre les inégalités éducatives, la protection du patrimoine mondial, la mémoire de l’Holocauste, ou encore la liberté de la presse, domaines dans lesquels les États-Unis jouaient un rôle pivot. Noël Ndong

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USA, Expulsions

États‑Unis : Eswatini, première escale pour cinq déportés « sans pays »

Dans le cadre d’un programme controversé de déportations vers des pays tiers, les États-Unis ont expulsé cinq individus condamnés pour crimes graves (meurtre, viol sur mineur) vers Eswatini, petit royaume d’Afrique australe de 1,2 million d’habitants. Ces personnes, originaires du Vietnam, de Jamaïque, de Cuba, du Yémen et du Laos, avaient vu leurs pays refuser leur réadmission, privant Washington de l’alternative classique de renvoi direct: d’où le recours inédit à une déportation vers un État tiers. À ce jour, cinq individus ont été expédiés vers Eswatini au cours de la deuxième quinzaine de juillet 2025. Il ne s’agit que de la deuxième opération en Afrique en juillet, après l’expulsion de huit hommes vers le Soudan du Sud quelques jours auparavant. Aucun autre vol vers Eswatini n’a été confirmé depuis – malgré des spéculations sur d’éventuelles autres coopérations classifiées. Conditions de détention : confinement strict Dès leur arrivée, les cinq ont été placés en isolement cellulaire, vraisemblablement au Matsapha Correctional Complex, prison de haute sécurité située près de Mbabane. Le gouvernement eswatinien considère ces détenus comme étant « en transit » et envisage une réexpédition progressive vers leurs pays d’origine, mais sans délai annoncé. Enjeux diplomatiques et géopolitiques La décision de Washington suit une décision de la Cour suprême américaine du 23 juin 2025, autorisant les déportations vers des pays tiers, même sans lien juridique ou familial. Eswatini est une monarchie. Plusieurs voix dénoncent un accord secret, probablement obtenu via des concessions politiques ou économiques américaines. Dimension stratégique, intelligence économique Ce procédé exprime une stratégie de territorialisation sécuritaire : ne pouvant pas renvoyer certaines catégories de migrants vers leurs pays d’origine, l’administration privilégie des États vulnérables mais coopératifs. Cela permet de maintenir un discours sécuritaire domestique tout en contournant les blocages diplomatiques classiques. Certains observateurs y voient une mise sous influence discrète : Eswatini (comme précédemment d’autres pays africains ou latino-américains) pourrait être incité à collaborer en échange d’avantages bilatéraux, inscrivant cette politique dans une logique d’intelligence économique globalisée. Risques juridiques et droits humains Les ONG alertent sur une possible violation du principe de non-refoulement : l’absence d’accès à un recours individuel, la détention prolongée en isolement, ainsi que l’opacité des accords sont perçus comme contraires au droit international. Essentiellement, en absence d’évaluations claires, des individus accusés de crimes, même graves, peuvent ne pas bénéficier d’un procès équitable ou d’une procédure transparente. Noël Ndong

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RDC – M23 : un cessez-le-feu fragile dans une guerre de trente ans

« La paix est un choix… une responsabilité à construire », a déclaré le ministre de l’Intérieur de la RDC. Un fragile espoir de paix refait surface à l’est de la République démocratique du Congo (RDC). Le gouvernement de Kinshasa et les représentants du groupe rebelle M23, soutenu par le Rwanda, ont signé LE 19 juillet à Doha une déclaration d’intention en vue d’un cessez-le-feu permanent, prélude à un « accord de paix global ». Si le ministre de l’Intérieur, Jacquemain Shabani, se dit « pleinement convaincu » que le pays est « proche de la paix », l’histoire récente invite à la prudence : les précédents accords de cessez-le-feu ont souvent été violés, parfois dans les semaines suivant leur signature. Depuis 30 ans, l’est du pays – région frontalière du Rwanda et de l’Ouganda, riche en or, coltan et cobalt – reste enlisé dans un conflit multidimensionnel, où s’entrelacent rivalités ethniques, enjeux économiques, influences régionales et faillite de l’État. Le retour du M23, mouvement politico-militaire déjà actif entre 2012 et 2013, a ravivé les tensions depuis fin 2021, avec une offensive éclair menée en appui de troupes rwandaises, selon Kinshasa et l’ONU. Face à une armée congolaise débordée, les combats ont provoqué des milliers de morts et plus d’un million de déplacés, accentuant une crise humanitaire aiguë. La déclaration de Doha prévoit une feuille de route pour la restauration de l’autorité de l’État dans les zones sous contrôle du M23. Kinshasa y voit une première étape vers un redéploiement administratif et sécuritaire, précisant que ce retrait se fera dans le cadre d’un processus négocié, ce qui a suscité des critiques au sein de l’opinion publique congolaise, impatiente de voir un retour immédiat des institutions. Malgré ce nouveau cadre diplomatique, les lignes de front n’ont pas bougé depuis février, et le terrain reste instable. Le M23 continue d’affronter une myriade de milices locales pro-Kinshasa, dans une logique de guerre asymétrique difficile à contenir. Cette guérilla permanente, conjuguée à l’implication d’acteurs non étatiques et de puissances voisines, complexifie toute issue militaire ou politique durable. Pour les autorités congolaises, la réussite du processus repose sur une double dynamique : un soutien populaire renforcé et des concessions mutuelles. « Nous voulons une paix définitive, une paix durable », a martelé le ministre de la Communication Patrick Muyaya, en appelant à un effort collectif de reconstruction. Si la signature de Doha constitue un jalon symbolique, le chemin vers la paix réelle demeure semé d’incertitudes. Les partenaires régionaux, l’Union africaine et les Nations unies seront scrutés quant à leur capacité à garantir la mise en œuvre et le respect des engagements. En RDC, où chaque cessez-le-feu a jusqu’ici précédé une nouvelle flambée de violences, la vigilance reste de mise. Noël Ndong

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La population mondiale à l'horizon 2100

10 milliards d’habitants ? Le monde au bord du basculement démographique

« L’humanité n’a jamais été aussi nombreuse… ni aussi proche du déclin », selon  le rapport des Nations unies sur la population mondiale, 2025. Alors que la planète se prépare à franchir le cap des 10 milliards d’habitants vers 2050, une vérité plus discrète s’impose dans les modèles démographiques des Nations unies : le pic de population mondiale pourrait être atteint plus tôt que prévu, suivi d’un déclin global dès la fin du siècle. En 2022, l’humanité comptait 8 milliards de personnes. D’ici à 2080, la courbe pourrait commencer à s’inverser, amorçant un retournement historique sans précédent. Une stagnation qui masque un basculement En vingt ans, la population mondiale a gagné deux milliards d’habitants. Les 60 prochaines années devraient produire le même résultat – mais à un rythme plus lent, signe d’un essoufflement. Le rapport onusien indique que la population mondiale diminuera de 13 millions de personnes d’ici à 2100, si les tendances actuelles se confirment. Le taux de natalité plonge, tandis que la mortalité repart à la hausse, aggravée par les pandémies, les conflits et le vieillissement. Vieillir plus vite que l’on ne naît Le tournant est déjà perceptible : en 2030, il y aura plus de personnes âgées de plus de 80 ans que d’enfants de moins d’un an. À l’échelle mondiale, les plus de 65 ans dépasseront les moins de 18 ans dès 2080, redéfinissant les priorités économiques, sociales et sanitaires des États. « Nous entrons dans une ère où la démographie devient un facteur de vulnérabilité stratégique », indique un analyste de l’Institut international des études démographiques (IIED). Des pays au seuil de saturation Un quart de l’humanité vit déjà dans des pays dits « démographiquement saturés », c’est-à-dire où les infrastructures, les ressources et l’environnement ne peuvent plus soutenir une croissance continue. Des mégapoles tentaculaires en Afrique, en Asie et en Amérique latine concentrent les défis du siècle : gestion de l’eau, urbanisation incontrôlée, alimentation, emploi. Conséquences économiques et stratégiques Le vieillissement global reconfigure les modèles économiques : réduction de la population active, explosion des dépenses de santé, crise des retraites, et redéploiement des investissements. Des pays comme le Japon, l’Italie, ou la Corée du Sud expérimentent déjà cette transition démographique à marche forcée, et certains experts estiment qu’elle pourrait affecter la compétitivité globale de ces économies d’ici 2050. L’intelligence économique à l’ère post-démographique À long terme, la démographie devient un outil d’anticipation stratégique. Les géants technologiques et industriels investissent dans l’automatisation, la robotique, l’intelligence artificielle pour compenser la raréfaction des forces vives. La guerre de demain pourrait aussi être une guerre de cerveaux, entre nations jeunes et vieillissantes, entre créativité démographique et épuisement social. L’humanité approche du sommet de sa courbe démographique. Derrière le chiffre symbolique des 10 milliards se profile une autre réalité : le monde entre dans une ère de décroissance silencieuse, porteuse d’opportunités écologiques… mais aussi de fragilités économiques et géopolitiques inédites. Noël Ndong

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Cameroun/Intelligence Artificielle : une ambition réaliste ou un mirage numérique ?

Lancée début juillet par la ministre des Postes et Télécommunications, Minette Libom Li Likeng, la Stratégie Nationale d’Intelligence Artificielle (SNIA) du Cameroun propose une transformation numérique ambitieuse à l’horizon 2040. Mais cette vision peut-elle réellement être mise en œuvre ? Et à quel coût ? Un écart entre ambition et capacités actuelles Le plan prévoit la création d’un GPT multilingue camerounais, 15 nœuds d’Edge Computing à énergie solaire, et la formation de 4 000 spécialistes IA par an via 5 centres d’excellence. Or, le budget initial global estimé avoisinerait 400 à 600 milliards FCFA (environ 650 à 1 milliard USD sur 15 ans) selon les premières analyses d’experts en politiques publiques numériques. À titre de comparaison, le Cameroun consacre aujourd’hui moins de 0,8 % de son PIB à la recherche et au numérique combinés. Infrastructures insuffisantes Le pays accuse encore un retard critique en connectivité (pénétration Internet de 34 % en 2025 selon DataReportal), et une capacité énergétique fragile (taux d’électrification rural à 28 %). Déployer des centres IA alimentés à l’énergie solaire nécessite non seulement des investissements lourds, mais aussi des compétences techniques peu disponibles localement à grande échelle. Formation : l’autre pilier incertain Former 4 000 experts par an représenterait près de 20 % de la capacité actuelle des universités technologiques du Cameroun. Le défi est donc autant financier qu’organisationnel. L’État devra s’appuyer sur des partenariats public-privé et une coopération accrue avec des institutions internationales (AFD, BAD, Banque mondiale). Positionnement géopolitique en Afrique centrale Politiquement, la SNIA sert aussi de levier pour positionner le Cameroun comme leader technologique régional, face à un environnement sous-régional encore peu structuré en matière d’IA. Mais sans coordination active avec ses voisins (Congo, Gabon, Tchad), la promesse d’un réseau IA d’Afrique centrale pourrait rester théorique. La stratégie camerounaise d’IA est visionnaire, mais sa réalisation dépendra d’un alignement rare entre volonté politique, financements durables, infrastructures numériques, et capital humain. Si ces conditions sont réunies, le Cameroun pourrait devenir un véritable hub technologique régional. Sinon, la SNIA risque de rester un catalogue d’intentions sans transformation concrète. Noël Ndong

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Afrique centrale & Cameroun : une croissance démographique à double tranchant

Alors que la population mondiale devrait atteindre environ 10 milliards d’habitants d’ici 2050, l’Afrique centrale enregistre l’une des croissances les plus rapides au monde. Selon les projections démographiques actualisées de l’ONU (2024), la population de l’Afrique centrale atteindra près de 260 millions d’habitants en 2050, contre environ 183 millions en 2025. Cette région, qui regroupe notamment le Cameroun, le Tchad, la RCA, le Congo, le Gabon, la Guinée équatoriale et la RDC, sera un des foyers majeurs de la croissance africaine. Cameroun : un doublement en perspective Avec 28,6 millions d’habitants en 2025, le Cameroun pourrait franchir le cap des 50 millions à l’horizon 2050, si les tendances actuelles se maintiennent. Ce dynamisme s’explique par un taux de fécondité moyen de 4,3 enfants par femme, bien au-dessus de la moyenne mondiale (2,3). Le pays est aujourd’hui l’un des plus peuplés de la région, juste derrière la RDC. Dynamique urbaine et pression sur les infrastructures Plus de 60 % de la population camerounaise vivra en milieu urbain d’ici 2040, contre 57 % aujourd’hui. Les villes comme Douala, Yaoundé ou Garoua deviennent des pôles de pression démographique, avec une jeunesse massive (plus de 60 % ont moins de 25 ans) et des besoins accrus en éducation, santé, emploi et logement. Vers un rééquilibrage mondial Si le vieillissement s’accélère en Europe et en Asie – où les plus de 65 ans seront plus nombreux que les moins de 18 ans dès 2080-, l’Afrique centrale, elle, restera jeune et dynamique, mais confrontée à un défi d’insertion sociale et économique. « Cette jeunesse, c’est un dividende démographique, mais seulement si l’investissement dans le capital humain suit », avertit un expert démographe de la CEA. Le Cameroun et l’Afrique centrale s’inscrivent dans un futur où leur poids démographique pèsera lourd sur la scène économique et géopolitique. La vraie question n’est pas combien ils seront, mais dans quelles conditions ils vivront. Noël Ndong

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Cameroun : restitution des biens culturels, enjeux, jurisprudence et perspectives

Le Cameroun multiplie aujourd’hui les initiatives en faveur du rapatriement des biens culturels exportés pendant la colonisation – en particulier vers la France et l’Allemagne. Parmi les artefacts emblématiques visés se trouve le « Dzom So’o », masque initiatique Fang‑Beti conservé à Munich, objet central des négociations en cours entre Yaoundé et les autorités germanophones. Un comité interministériel, créé en 2022, coordonne ces démarches. Une délégation officielle a récemment visité Berlin, Stuttgart et Brême pour identifier plus de 40 000 objets camerounais en Allemagne, dont plus de 2 700 à Brême, et entamer les négociations de restitution. Cadre juridique international : conventions et prescription Le Cameroun s’appuie sur les conventions de 1970 (UNESCO) et de 1995 (UNIDROIT), ratifiées pour encadrer les demandes de restitution des biens « volés ou illicitement exportés ». Ces textes prévoient des obligations de diligence et un délai d’action légal (généralement entre trois et cinquante ans) pour engager des procédures de retour. Perceptions diplomatiques et contextes institutionnels Les Camerounais tels que le Prince Kum’a Ndumbe III dénoncent une gestion bureaucratique déséquilibrée du processus : le comité interministériel, jugé peu inclusif, serait dominé par des fonctionnaires, sans intégration suffisante des acteurs culturels et des communautés concernées. Enjeux géopolitiques, diplomatiques et de mémoire La restitution est à la fois un acte symbolique de reconnaissance et une exigence diplomatique. La France a entamé une réforme législative en 2020 pour faciliter les retours, mais a limité ses engagements à certaines anciennes colonies comme le Bénin et le Sénégal, laissant le Cameroun en marge. Malgré cela, un fonds franco-allemand de 2,1 millions d’euros soutient aujourd’hui des recherches de provenance sur les objets africains, priorisant les anciennes colonies allemandes (dont le Cameroun), dans le but d’éclairer les négociations à venir. La restitution des biens culturels camerounais est un enjeu juridique et diplomatique majeur. Le succès dépendra de la rigueur des inventaires, du respect des conventions internationales, et d’une approche inclusive et participative. Le chemin vers la restitution est encore long, mais la détermination de Yaoundé, alliée au mouvement global pour la mémoire décoloniale, ouvre une nouvelle ère dans la gestion du patrimoine africain. Noël Ndong

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