13 octobre 2025

France–Afrique : Le gouvernement Lecornu à l’épreuve du continent stratégique

En dévoilant la composition de son gouvernement le 12 octobre, le Premier ministre français Sébastien Lecornu n’a pas seulement cherché à stabiliser la politique intérieure d’une France fracturée. Sébatien Lecornu a aussi posé les bases d’un repositionnement stratégique, notamment vis-à-vis de l’Afrique. Dans un contexte de recul d’influence française sur le continent, le nouveau gouvernement entend conjuguer réalisme diplomatique, partenariats économiques ciblés et sécurité partagée. « La France doit parler d’égal à égal avec l’Afrique, non plus au nom de l’histoire, mais au nom de l’avenir », aurait confié un proche du Premier ministre. Une diplomatie en reconquête La reconduction de Jean-Noël Barrot aux Affaires étrangères et la nomination de Catherine Vautrin aux Armées témoignent d’un double impératif : réaffirmer la présence stratégique française tout en réinventant les relations bilatérales dans un environnement post-Françafrique. Depuis le retrait progressif des forces françaises du Sahel et la montée en puissance d’acteurs concurrents – notamment la Russie, la Chine et la Turquie-, Paris cherche à transformer ses liens traditionnels en coopérations pragmatiques, axées sur la sécurité maritime, les infrastructures numériques et la formation des élites locales. Selon un diplomate africain à Paris, « l’enjeu n’est plus militaire, il est économique et culturel. L’Afrique attend des solutions, pas des leçons ». Économie et influence : la bataille du soft power Sous la houlette de Roland Lescure à l’Économie et de Nicolas Forissier au Commerce extérieur, le gouvernement Lecornu pourrait privilégier une stratégie de compétitivité partagée, s’appuyant sur les entreprises françaises encore actives en Afrique : énergie, transport, télécommunications, agriculture durable. La nomination d’Éléonore Caroit à la Francophonie traduit aussi une volonté de reconstruire un récit d’influence autour de la langue et de l’innovation, à l’heure où le français demeure parlé par plus de 300 millions de locuteurs, dont 60 % en Afrique. « La bataille économique africaine est aussi une bataille narrative », estime un analyste en intelligence économique. « Si la France veut rester audible, elle doit redevenir utile ». Une approche sécuritaire redéfinie Le binôme Laurent Nuñez (Intérieur) – Catherine Vautrin (Armées) incarne une vision de la sécurité intégrée : lutte contre le terrorisme transnational, contrôle migratoire concerté, cybermenaces, protection des diasporas. Lecornu, ancien ministre des Armées, maîtrise les enjeux militaires africains et pourrait promouvoir une logique partenariale où la France n’agit plus seule, mais en coalition avec les acteurs régionaux et européens. Les coopérations de défense pourraient désormais s’inscrire dans le cadre d’un « pacte de stabilité africaine », fondé sur la formation, le renseignement et la sécurité des zones maritimes – en particulier dans le Golfe de Guinée. Lecornu, l’équilibriste de Matignon De retour à Matignon dans un climat de crise politique, Sébastien Lecornu hérite d’un mandat à double dimension : rétablir la confiance interne et réaffirmer la présence internationale. Ses marges de manœuvre restent étroites, mais son profil – technicien du pouvoir, connaisseur des dossiers de défense – pourrait lui permettre d’ancrer une nouvelle doctrine africaine, moins idéologique, plus stratégique. Pour les observateurs, le « moment Lecornu » pourrait marquer une transition de l’influence vers l’interdépendance, où la France chercherait non plus à dominer, mais à durer. Grille de lecture stratégique Axe Objectif Risque Opportunité Politique intérieure Stabiliser le pays, adopter le budget Blocage parlementaire Consolidation du leadership de Lecornu Diplomatie africaine Repositionner la France Rejet du récit néocolonial Coopérations régionales et francophonie économique Sécurité Mutualiser les capacités régionales Retrait symbolique perçu comme un abandon Création d’un cadre africain de sécurité partagée Économie Rééquilibrer les échanges Concurrence chinoise et turque Nouvelles filières (énergie, numérique, agro-industrie) Influence Moderniser la francophonie Perte d’attractivité culturelle Innovation, éducation et diplomatie culturelle

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Cameroun-Présidentielle 2025 : Silence stratégique d’Issa Tchiroma

Au lendemain du scrutin présidentiel du 12 octobre 2025, le Cameroun entre dans une zone d’incertitude politique. Tandis que les résultats officiels se font attendre, Issa Tchiroma Bakary, l’un des principaux prétendants à la magistrature suprême, a publié un message laconique assurant de sa sécurité. Entre silence tactique, pressions populaires et incertitudes institutionnelles, l’après-vote dessine un tournant stratégique pour le pays. Un message crypté, une posture calculée « Peuple camerounais, vous avez parlé massivement et moi, à mon tour, je m’adresserai à vous bientôt. Je suis en sécurité et en santé », a déclaré Issa Tchiroma Bakary, le 12 octobre 2025, via Facebook. Ce court message, publié au lendemain du scrutin présidentiel sur les réseaux sociaux, est la première prise de parole publique du candidat du Front pour le salut national du Cameroun (FNSC). Aucun commentaire supplémentaire, aucune revendication, mais une promesse de « s’adresser bientôt » au peuple. Un silence interprété par de nombreux analystes comme un geste de retenue stratégique dans un contexte particulièrement volatile. Des résultats attendus dans une atmosphère électrique Alors que la Commission électorale n’a encore rendu aucun résultat officiel, les premières tendances circulant sur les réseaux sociaux dessinent un paysage électoral partagé : Issa Tchiroma et le président sortant Paul Biya seraient en tête dans plusieurs régions clés. Les grandes agglomérations urbaines – Douala, Yaoundé, Bafoussam – semblent avoir fortement voté pour le changement. « Les zones urbaines regroupent près de 60 % de la population. Les tendances montrent une poussée significative pour Issa Tchiroma, reflet des aspirations au renouveau », a déclaré Ateki Seta Caxton, autre candidat en lice, tout en appelant à la prudence. Une transition risquée, une stabilité en jeu Le Cameroun, pivot géopolitique en Afrique centrale, n’a jamais connu d’alternance politique réelle depuis son indépendance. Paul Biya, au pouvoir depuis 1982, représente l’un des derniers bastions de longévité présidentielle sur le continent et dans le monde. Une éventuelle victoire de l’opposition, inédite, redessinerait les équilibres politiques, économiques et sécuritaires du pays. Dans les régions anglophones du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, les revendications séparatistes et les tensions militaires persistent. Dans l’Extrême-Nord, Boko Haram reste une menace intermittente. Toute instabilité post-électorale pourrait être exploitée par ces foyers de crise. Les puissances étrangères observent en silence La communauté internationale suit le processus avec une extrême attention. L’Union africaine, la CEEAC, l’UE, les États-Unis, la Chine et la Russie ont tous déployé des observateurs. Officiellement, aucun acteur ne s’est encore prononcé, mais des diplomates en poste à Yaoundé évoquent en privé « un moment critique pour la stabilité régionale ». Selon une source diplomatique européenne :« Il s’agit d’un test de maturité démocratique. Toute manipulation des résultats pourrait engendrer une perte de crédibilité durable pour les institutions camerounaises ». Une économie en attente, un climat d’affaires sous pression En veille stratégique, les milieux d’affaires attendent. L’économie camerounaise, fragilisée par la dette (estimée à 48 % du PIB), la dépendance au pétrole, et une jeunesse massivement sous-employée, pourrait bénéficier d’un renouvellement du leadership. Mais les incertitudes actuelles retardent les décisions d’investissement. Le taux de chômage des jeunes frôle les 35 %, selon les estimations du ministère de l’Économie. Les projets dans l’agro-industrie, les transports, et l’énergie sont en pause, en attente de clarté politique. Pour les grandes entreprises opérant dans le pays, la stabilité des institutions et la transparence du processus électoral seront déterminantes. Une sortie de crise encore incertaine Les jours à venir seront cruciaux. Le message d’Issa Tchiroma n’exclut aucun scénario : contestation, reconnaissance, ou appel à un processus de transition. Sa posture actuelle semble viser à éviter l’escalade tout en renforçant sa légitimité politique. « Notre pays a trop souffert. Ce n’est pas le moment d’ajouter de nouvelles blessures », a plaidé Ateki Caxton dans un message empreint d’appel au calme. Le Cameroun au bord d’un tournant L’issue du scrutin présidentiel de 2025 pourrait marquer un basculement historique pour le Cameroun. Dans cette période de grande incertitude, où chaque mot peut peser lourd, Issa Tchiroma semble avoir choisi la stratégie du silence diplomatique. Un silence qui, en politique, vaut parfois plus qu’un discours.

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