4 novembre 2025

Cameroun : Biya réélu, le Sénat et la francophonie misent sur la stabilité

À trois jours de la prestation de serment, le Sénat camerounais félicite Paul Biya pour sa réélection et reçoit le soutien de parlementaires francophones, tandis que l’opposition maintient sa contestation. Le pays avance sur une ligne de crête entre message institutionnel et attentes citoyennes. Sénat : message d’apaisement et soutien au président Le 3 novembre, le Sénat camerounais a ouvert sa troisième session ordinaire en saluant officiellement la réélection de Paul Biya, vainqueur du scrutin du 12 octobre 2025. Le vice-président Aboubakary Abdoulaye, au nom de Marcel Niat Njifenji, a rendu hommage au « peuple camerounais pour sa maturité politique et son attachement à la paix », tout en dénonçant les « ingérences étrangères » et les appels à la contestation. Les sénateurs ont insisté sur la nécessité de relancer l’économie, de lutter contre la corruption, de développer les infrastructures et de créer des emplois pour les jeunes, plaçant ces objectifs au cœur du nouveau septennat. Entre soutien institutionnel et contestation populaire Le discours sénatorial s’aligne sur la position du RDPC, parti au pouvoir, qui célèbre le 43ᵉ anniversaire de l’accession de Paul Biya au pouvoir. Mais certains candidats, comme Issa Tchiroma Bakary, contestent toujours les résultats et appellent à des « villes mortes » dans plusieurs régions, illustrant la fracture entre institutions et population. Le soutien des parlementaires francophones La session sénatoriale a également bénéficié d’un appui international symbolique : des parlementaires francophones de l’Assemblée parlementaire de la Francophonie (APF) ont salué « la maturité du processus électoral et l’importance de la stabilité politique ». Selon eux, le respect des institutions et le dialogue national sont essentiels pour renforcer la démocratie et la coopération régionale. Ce soutien souligne la légitimité internationale du nouveau mandat et met en avant le rôle actif de la francophonie dans l’accompagnement des transitions politiques en Afrique. Un rôle clé pour le Sénat Abdoulaye a rappelé : « Dans une élection, il n’y a ni vainqueur, ni vaincu, mais un peuple qui triomphe ». Le Sénat promet de contrôler l’action gouvernementale et d’accompagner le développement local, avec l’examen du budget 2026 comme premier test concret du nouveau septennat. À trois jours de la prestation de serment, le Sénat et ses alliés francophones envoient un message d’unité. Mais beaucoup attendent encore des actes concrets pour restaurer la confiance et réduire les fractures post-électorales. La question reste ouverte : la parole parlementaire et francophone suffira-t-elle à réconcilier les Camerounais après un scrutin marqué par des tensions persistantes ?

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Afrique pétrolière : Brazzaville choisit l’indépendance financière

La 48ᵉ session de l’APPO à Brazzaville confirme la volonté des pays africains producteurs de pétrole de financer eux-mêmes leurs projets énergétiques. La Banque africaine de l’énergie, avec un capital initial de 5 milliards de dollars, devient le symbole de cette ambition d’autonomie face aux bailleurs occidentaux. Deux ans après son lancement, la Banque africaine de l’énergie (BAE) commence à se concrétiser. Dotée d’un capital initial de 5 milliards de dollars, l’institution créée en 2022 par l’Organisation africaine des pays producteurs de pétrole (APPO) et Afreximbank vise à permettre au continent de financer ses projets énergétiques sans dépendre des bailleurs occidentaux, qui se détournent progressivement des hydrocarbures. La capitale congolaise accueille cette semaine la 48ᵉ session du Conseil des ministres de l’APPO, présidée par Bruno Jean Richard Itoua. Dix-huit États membres participent, parmi eux l’Algérie, représentée par le ministre de l’Énergie Mohamed Arkab et le PDG de Sonatrach, Noureddine Daoudi. Les discussions portent sur la consolidation du projet bancaire, la coordination des politiques pétrolières africaines et les réformes institutionnelles prévues pour renforcer l’efficacité de l’APPO. L’accord de création de la BAE a été signé en juin 2024 au Caire, et sa ratification par la Côte d’Ivoire en juillet constitue une avancée symbolique. Le lancement opérationnel reste prévu pour 2025-2026, tandis qu’Afreximbank s’est engagée à mobiliser jusqu’à 19 milliards de dollars supplémentaires. À ce jour, 45 % du capital initial a été réuni, un indicateur à la fois d’adhésion et des défis financiers à relever. La BAE répond à une urgence stratégique : les institutions financières occidentales réduisent leurs investissements dans le pétrole et le gaz au nom de la transition climatique. Pour les pays africains producteurs, renoncer à leurs ressources n’est pas une option. « Cette banque est un instrument clé pour l’autonomie énergétique et la résilience économique du continent », souligne un diplomate africain à Addis-Abeba. Le sommet de Brazzaville coïncide avec le 4ᵉ Congrès africain sur le contenu local, placé sous le patronage du président Denis Sassou Nguesso. L’objectif est d’augmenter la participation des entreprises africaines dans l’exploitation pétrolière et gazière, un secteur encore largement dominé par les multinationales étrangères. Depuis sa création en 1987, l’APPO regroupe les principaux producteurs africains, dont le Nigeria, l’Angola, la Libye, l’Égypte et l’Algérie. Dans un marché mondial bouleversé par la transition énergétique et les pressions internationales, l’organisation cherche à préserver la souveraineté africaine sur ses hydrocarbures. Le sommet confirme une ambition claire : l’Afrique pétrolière veut reprendre la main sur son destin énergétique, et la BAE en est le symbole le plus tangible, malgré les défis financiers et institutionnels qui restent à surmonter.

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Soudan : Paris s’élève contre les crimes d’El-Fasher

Face aux massacres attribués aux Forces de soutien rapide (FSR) au Nord-Darfour, la France condamne les exactions et exhorte les acteurs étrangers à cesser d’alimenter un conflit désormais géo-économique et régionalement déstabilisateur. La France a dénoncé avec vigueur les « atrocités à caractère ethnique » commises par les Forces de soutien rapide (FSR) à El-Fasher, dans le Nord-Darfour. Dans un communiqué, le ministère de l’Europe et des Affaires étrangères a évoqué « des exécutions sommaires, des viols et des massacres de civils », ainsi que des attaques contre des humanitaires. Paris a appelé à « la protection immédiate des populations » et exigé que « les auteurs répondent de leurs crimes devant la justice internationale ». Depuis la prise d’El-Fasher par les FSR, le 26 octobre, la situation humanitaire s’est effondrée. Issues des anciennes milices Janjawid, les FSR poursuivent une offensive marquée par une logique de purification ethnique. Selon les Nations unies, plus de 9 millions de Soudanais sont déplacés, dont 1,8 million réfugiés dans les pays voisins. Le Programme alimentaire mondial (PAM) estime que 25 millions de personnes, soit la moitié de la population, ont désormais besoin d’une aide d’urgence. La décision de Khartoum d’expulser des responsables du PAM a, selon Paris, « gravement compromis » la coordination humanitaire. Sur le plan politique, la guerre qui oppose depuis avril 2023 l’armée du général Abdel Fattah al-Burhane aux FSR du général Mohamed Hamdan Dagalo, dit Hemetti, menace de fracturer durablement le pays. L’Union africaine appelle à un « cessez-le-feu immédiat et vérifiable », tandis que le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, dénonce « une guerre alimentée par des soutiens extérieurs et des intérêts économiques concurrents ». En effet, le conflit soudanais est désormais autant militaire qu’économique. Les FSR contrôlent une partie des mines d’or du Darfour, dont la production alimente un trafic régional estimé à plus d’un milliard de dollars par an. Plusieurs rapports des Nations unies mettent en cause des circuits de contrebande reliant le Tchad, la Centrafrique et Dubaï. « L’or est devenu l’arme silencieuse de la guerre soudanaise », confie un diplomate. Sur la scène internationale, Paris s’aligne sur Washington, Londres et Bruxelles pour exiger la fin des livraisons d’armes et soutenir des sanctions ciblées contre les chefs militaires. Les bailleurs de fonds – Banque mondiale, FMI et Banque africaine de développement – maintiennent la suspension de leur aide, évaluée à plus de 2,5 milliards de dollars, en attente d’un retour à un pouvoir civil. Pour la diplomatie française, l’enjeu dépasse l’urgence humanitaire. « Le Soudan se situe au cœur d’un arc d’instabilité qui s’étend du Sahel à la mer Rouge », souligne un haut diplomate du Quai d’Orsay. Sans un sursaut collectif, le pays risque, selon les observateurs, une « somalisation prolongée » : une guerre sans fin où les rivalités ethniques, les trafics et l’économie de guerre s’autoalimentent dans un silence international préoccupant.

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Centrafrique : Faustin-Archange Touadéra, l’équilibriste du cœur de l’Afrique

À l’approche de la présidentielle du 28 décembre, le chef de l’État centrafricain affirme sa confiance en une victoire, tout en tentant de maintenir l’équilibre entre Paris et Moscou, dans un contexte régional marqué par la montée des tensions et l’instabilité du Soudan au Tchad. À quelques semaines du scrutin du 28 décembre, Faustin-Archange Touadéra aborde la campagne avec assurance. Dans un entretien à France 24, le président centrafricain déclare avoir « confiance » en sa réélection, évoquant les progrès du désarmement et la « stabilisation progressive » du pays. Onze des quatorze groupes armés ont accepté de déposer les armes », assure-t-il, citant les discussions en cours avec le MPC d’Al-Khatib, encore actif dans le nord du pays. Élu en 2016 et réélu en 2020, Faustin Touadéra met en avant la réconciliation et la reconstruction comme piliers de son bilan. Mais sur le terrain, la situation reste fragile. Selon les Nations unies, près de 60 % du territoire demeure sous l’influence de groupes armés, et plus de 3,4 millions de Centrafricains — soit la moitié de la population — dépendent toujours de l’aide humanitaire. Les violences intercommunautaires, les trafics transfrontaliers et la pauvreté structurelle alimentent un climat d’incertitude à la veille du vote. Face à une opposition divisée, dont une partie appelle au boycott, le président estime qu’elle « n’est pas constructive » et « n’est pas suivie par la population ». Plusieurs figures de la société civile dénoncent toutefois un processus verrouillé, évoquant un risque de scrutin « sans véritable compétition ». L’Union africaine et l’ONU appellent à garantir « des élections crédibles, inclusives et sécurisées », alors que certaines préfectures restent inaccessibles aux observateurs internationaux. Entre Paris et Moscou : une diplomatie d’équilibriste Sur le plan international, Touadéra s’efforce de ménager ses deux principaux partenaires : la France et la Russie. Après plusieurs années de tensions, le dialogue franco-centrafricain a repris en avril 2024. « Les choses se passent très bien avec Paris, nous avons mis en place une feuille de route », déclare le président. Ce rapprochement traduit une volonté de normaliser les relations bilatérales après une période dominée par l’influence russe. Depuis 2018, des centaines d’instructeurs liés au groupe Wagner — aujourd’hui réorganisé sous le nom Africa Corps — assurent la formation et la protection du régime. Interrogé sur un nouvel accord militaire avec Moscou, Touadéra reste évasif : « Ce n’est pas sur votre plateau que je vais m’étaler sur ces questions. Par courtoisie envers nos partenaires ». Et d’ajouter, en forme de réponse politique : « Je ne suis l’otage de personne ». Derrière la prudence diplomatique se joue un enjeu géoéconomique crucial : le contrôle des ressources minières, notamment l’or et les diamants. Ces richesses, qui représentent près de 40 % des exportations officielles, alimentent aussi des circuits de contrebande transfrontalière vers le Soudan, le Cameroun et le Tchad. Pour plusieurs observateurs, la Centrafrique s’est imposée comme un maillon du vaste réseau d’intérêts économiques et sécuritaires russes en Afrique centrale. Un environnement régional sous tension Au-delà de ses frontières, Bangui évolue dans un environnement régional instable. La guerre au Soudan, que Touadéra décrit comme « une source d’inquiétude sécuritaire majeure », favorise la circulation d’armes et de combattants vers le nord de la Centrafrique. Le Tchad voisin, dirigé par Mahamat Idriss Déby, redoute une contagion de l’instabilité, tandis que le Cameroun continue de faire face à des tensions dans ses régions anglophones. Dans ce contexte, la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC) peine à jouer un rôle de stabilisation. Les rivalités politiques internes — notamment entre Kinshasa, Libreville et Brazzaville — limitent sa capacité à agir. La fragilité centrafricaine devient ainsi le reflet d’une Afrique centrale fragmentée, où les transitions politiques, les trafics et la compétition des puissances extérieures s’entrecroisent. Les bailleurs internationaux — Banque mondiale, FMI, Union européenne — maintiennent leur soutien, mais sous conditions : bonne gouvernance, transparence dans les recettes minières et respect des droits politiques. Confiant, Faustin-Archange Touadéra cherche à apparaître comme l’homme fort d’un État sous tutelle partielle, mais en quête de souveraineté. Entre ambitions électorales et contraintes géostratégiques, le président centrafricain avance sur un fil ténu — celui d’un pouvoir fragile dans une région sous tension, où chaque élection devient un test de stabilité continentale.

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