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France‑Cameroun : Paris salue Biya, une relation stratégique plus que jamais calibrée

« Paul Biya m’est apparu comme un homme d’État qui tient véritablement les manches du pays », confie Thierry Marchand, au terme d’une audience empreinte de respect et d’enjeu, marquant son engagement à bâtir une relation « adaptée au XXIᵉ siècle ». Un au revoir symbolique, un partenariat recalibré Le 29 août 2025, au Palais de l’Unité, Paul Biya a reçu Thierry Marchand, ambassadeur de France en fin de mission. Cette audience, dense et feutrée, a permis d’esquisser les contours d’un partenariat bilatéral solide, multiforme et empreint de réciprocité. Politique, économique, culturel, sécuritaire : les domaines évoqués témoignent d’une volonté partagée d’asseoir les relations sur de nouveaux piliers. Thierry Marchand souligne qu’il a retrouvé un président conscient, informé et résolu, prêt à se lancer dans une nouvelle campagne présidentielle – une illustration de la posture de stabilité que Paris valorise chez son homologue camerounais. Géopolitique et diplomatie stratégique Cette transition diplomatique s’inscrit dans une reconfiguration du partenariat France–Cameroun, autrefois asymétrique, désormais pensé comme une tresse tissée de lucidité, d’amitié et de coopération adaptative. La visite d’adieu de l’ambassadeur intervient dans un contexte africain où les États ré-évaluent leurs alliances. Le Cameroun, avec sa stabilité relative, sa position stratégique en Afrique centrale, et ses atouts portuaires et sécuritaires, demeure un pilier pour les intérêts français dans la région. Coopération économique et mémoire partagée Marchand incarne aussi cette volonté française de co-construire des initiatives durables : qu’il s’agisse de visa simplifiés pour les alumni camerounais, d’investissements économiques – plus de 200 entreprises françaises opèrent localement-, ou encore du financement par an, à hauteur de 200 millions d’euros, dans le cadre des dispositifs du C2D (Contrat de Désendettement et Développement). Sur le plan mémoriel, la remise du rapport de la commission mixte (historique 1945–1971) constitue un jalon fort, phase décisive de « thérapie collective » selon les mots mêmes de l’ambassadeur. Ces travaux ont été remis à Emmanuel Macron en janvier 2025 dans un effort de transparence et de réconciliation historique. Sécurité, enjeux globaux et diplomatie multiforme L’entretien au Palais d’Étoudi a également permis de s’inscrire dans une actualité mondiale tourmentée : crises sécuritaires en Europe, au Moyen-Orient comme en Afrique ont été évoquées durant 90 minutes d’échanges bilatéraux approfondis. Une dimension qui souligne l’importance stratégique du Cameroun pour la diplomatie française, notamment dans un monde multipolaire et fracturé. Une relation Biya–France marquée par la continuité diplomatique Depuis François Mitterrand jusqu’à Emmanuel Macron, la relation entre la France et Paul Biya s’est articulée autour de la stabilité comme boussole. François Mitterrand le considérait comme un « homme de dialogue » ; Jacques Chirac comme un garant de la francophonie ; Sarkozy fut plus distant, tandis que Emmanuel Macron, depuis 2022, a tenté d’opérer un aggiornamento mémoriel et stratégique. Mais le fond reste inchangé : le soutien français ne vise pas une alternance, mais une transition contrôlée.

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Boko Haram/Cameroun : une coopération régionale permet la libération de dix enfants

Une opération conjointe menée par les forces du Cameroun, du Nigeria et du Tchad a permis la libération de dix enfants enlevés par des éléments présumés de Boko Haram dans l’Extrême-Nord camerounais. Un adolescent n’a pas survécu à la captivité. Une semaine après leur enlèvement, dix enfants camerounais ont été libérés ce jeudi dans la région de l’Extrême-Nord, à la suite d’une opération conjointe menée par les forces armées et de sécurité du Cameroun, du Nigeria et du Tchad, appuyées par la Force multinationale mixte (FMM). Selon le gouverneur de la région, les enfants avaient été kidnappés le 13 août alors qu’ils se trouvaient à bord d’un bus assurant la liaison entre Kousseri et Maroua, sur la route nationale N°1. L’attaque a été attribuée à des membres présumés de Boko Haram, un groupe islamiste actif depuis plus d’une décennie autour du bassin du lac Tchad. Les enfants ont été retrouvés vivants à environ vingt kilomètres de la frontière nigériane, mais un adolescent enlevé au même moment a malheureusement été tué par les ravisseurs, ont précisé les autorités locales. Une coordination régionale en progrès Cette libération marque un succès important pour la coopération régionale contre Boko Haram. La Force multinationale mixte, qui regroupe les armées du Cameroun, du Nigeria, du Tchad et du Niger, a renforcé ses opérations transfrontalières dans les zones reculées du lac Tchad, où le groupe djihadiste reste actif malgré des revers militaires répétés. L’efficacité de cette dernière opération met en lumière la montée en puissance des mécanismes de coordination entre les forces armées des trois pays directement concernés, dans une région où les frontières poreuses facilitent les mouvements des groupes armés. L’Extrême-Nord toujours sous pression Depuis 2014, la région de l’Extrême-Nord du Cameroun reste l’un des points chauds du conflit contre Boko Haram, avec des centaines d’attaques, de kidnappings et de déplacements forcés. Bien que l’activité du groupe ait diminué par rapport à son pic, il conserve une capacité de nuisance importante, notamment via des cellules locales opérant de manière mobile. Les enlèvements d’enfants et de civils restent une stratégie de terreur utilisée pour obtenir rançons, recruter de force ou déstabiliser les communautés locales. Une dynamique à maintenir La récente opération de libération montre que la réponse militaire régionale peut porter ses fruits lorsqu’elle est rapide, coordonnée et appuyée par des échanges d’information efficaces. Mais les analystes sécuritaires soulignent que la seule dimension militaire ne suffira pas à éradiquer durablement l’insurrection islamiste. La stabilisation de la région exige aussi des programmes de développement, de réinsertion des ex-combattants et de renforcement de l’État dans les zones rurales marginalisées où Boko Haram recrute. La libération des enfants est un motif de soulagement, mais elle rappelle aussi la fragilité persistante des zones frontalières du bassin du lac Tchad. La consolidation des acquis sécuritaires passera par une approche régionale intégrée, mêlant sécurité, développement et résilience communautaire. Lutte contre Boko Haram : Chronologie synthétique opérations régionales 🔹 2015 – Création de la Force multinationale mixte (FMM) 🔹 2015 – Opération « Lafiya Dole » (Nigeria) 🔹 2016 – Offensive conjointe Nigéria–Cameroun–Tchad 🔹 2017 – Début des opérations transfrontalières coordonnées 🔹 2020 – « Colère de Bohoma » (Tchad) 🔹 2021 – Mort d’Abubakar Shekau 🔹 2022 – Reprise des opérations dans les zones insulaires du lac Tchad 🔹 2023 – Offensive autour de Kukawa (Nigeria) 🔹 Août 2024 – Opération transfrontalière « Shara » 🔹Août 2025 – Libération de dix enfants au Cameroun

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Déchets au Cameroun : Une dette publique de 7,7 milliards FCFA asphyxie le système de collecte

Alors que Yaoundé étouffe sous les ordures, l’État camerounais reste redevable de 7,7 milliards FCFA à Hysacam, principal opérateur de collecte des déchets. Une dette persistante qui illustre les limites structurelles d’un modèle de gestion urbaine en crise. « Sans moyens, il n’y a pas de salubrité« , déclare un haut responsable d’Hysacam. Depuis un an, le montant de la dette que l’État camerounais doit à l’entreprise – 7,7 milliards FCFA selon la Caisse autonome d’amortissement (CAA) – est resté inchangé, au détriment de la capacité opérationnelle du groupe et de la propreté urbaine. Présente dans les principales villes du pays depuis plus de 30 ans, Hygiène et salubrité du Cameroun (Hysacam) fait aujourd’hui face à des retards de paiement chroniques, une trésorerie affaiblie, et une incapacité à renouveler ou entretenir son parc de camions – au moment même où les déchets s’amoncellent dans la capitale. Une crise systémique : plus qu’un défaut de paiement En février 2024, la Communauté urbaine de Yaoundé (CUY) a tenté de contourner le monopole historique d’Hysacam en introduisant un second opérateur, Thychlof Sarl. Mais le problème est structurel, non concurrentiel. Selon Hysacam, multiplier les prestataires sans corriger les déficits de financement revient à répéter les erreurs à plus grande échelle. « Même à trois ou quatre entreprises, le manque de fonds condamnera tout le système », alertait un cadre d’Hysacam début 2024. En principe, les collectivités territoriales décentralisées (CTD) sont les maîtres d’ouvrage. Mais 85 % des paiements proviennent en réalité du Trésor public, lequel fonctionne sous la contrainte du compte unique du Trésor, retardant les décaissements. « Vous pouvez avoir des crédits votés, mais aucune disponibilité réelle à cause des tensions de trésorerie », rappelait en 2024 Luc Messi Atangana, maire de Yaoundé. Un besoin de 15 milliards, une réponse divisée par deux Selon Jean Pierre Ymele, directeur général d’Hysacam, le coût réel d’une collecte efficace à Yaoundé s’élève à 15 milliards FCFA par an. Or, moins de la moitié est effectivement mobilisée, souvent avec plusieurs mois de retard. Résultat : véhicules immobilisés, salaires différés, fréquence de collecte en baisse. Pour maintenir un service minimum, l’entreprise a dû s’endetter. En avril 2025, elle a levé 5 milliards FCFA auprès d’Afriland First Bank pour acquérir 80 camions, dont seulement 20 ont été livrés à ce jour. Le contrat prévoit 50 camions pour Yaoundé, mais il en faudrait 150 à 200 selon les estimations internes. Une taxe aux résultats incertains Instauré en 2019, un droit d’accise spécial de 0,5 % sur les marchandises importées devait pérenniser le financement de la collecte. Pourtant, les retards de reversement par la douane, via le Feicom, limitent son efficacité. La taxe peine à atteindre les objectifs affichés et ne stabilise pas les finances locales. Une crise locale, un défi national Si Yaoundé cristallise l’attention, le problème est généralisé. Partout où Hysacam opère – Douala, Bafoussam, Garoua… – les effets sont les mêmes : salaires non versés, matériel obsolète, services ralentis. Le renouvellement des contrats en mars 2025, après une longue période d’incertitude, n’a pas permis de redresser la situation. Les documents contractuels restent inaccessibles au public, et les montagnes d’ordures visibles dans les rues en disent plus que les rapports administratifs. Tant que la dette ne sera pas résorbée et qu’un financement stable ne sera pas garanti, aucun prestataire ne pourra inverser la tendance. La crise actuelle dans la gestion des déchets à Yaoundé est moins un problème logistique qu’un révélateur d’un système budgétaire et institutionnel défaillant.

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Cameroun : Bello Bouba Maigari remplacé au gouvernement par Gabriel Mbaïrobé

La démission de Bello Bouba Maigari, ministre d’État chargé du Tourisme au Cameroun, a été officiellement acceptée par le gouvernement. Candidat à l’élection présidentielle prévue pour le 12 octobre 2025, il quitte ainsi ses fonctions ministérielles, ouvrant la voie à un remaniement temporaire. Selon un communiqué publié ce mercredi 6 août 2025 par le secrétaire général des services du Premier ministre, Magloire Séraphin Fouda, c’est Gabriel Mbaïrobé, actuellement ministre de l’Agriculture et du Développement rural, qui assurera l’intérim au ministère du Tourisme et des Loisirs. Cette décision vise à garantir la continuité des activités dans ce département clé, en attendant la nomination d’un successeur définitif. Le départ de Bello Bouba, figure politique majeure et président de l’Union Nationale pour la Démocratie et le Progrès (UNDp), intervient dans un contexte électoral important pour le Cameroun. Sa candidature à la présidentielle marque un tournant pour le parti et pourrait impacter la dynamique politique nationale. Ce remplacement intérimaire illustre la volonté du gouvernement de maintenir la stabilité administrative tout en s’adaptant aux évolutions politiques à venir. Gabriel Mbaïrobé, reconnu pour son expérience dans le secteur agricole, aura la responsabilité temporaire de superviser un secteur stratégique pour le tourisme et le développement économique du pays.

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L’UA investit dans le savoir stratégique : la plateforme ATTP au service d’un développement ancré dans l’expertise africaine

L’Union africaine (UA) franchit un pas stratégique dans la refondation de ses politiques publiques avec le lancement officiel de la plateforme ATTP (African Think Tank Platform). Cette initiative, soutenue financièrement par des partenaires comme la Banque mondiale et techniquement par l’AUDA-NEPAD et la Fondation ACBF, vise à transformer les cercles de réflexion africains en véritables catalyseurs de décisions politiques continentales. Dotée d’un budget de 50 millions USD sur cinq ans, elle ambitionne de combler le déficit chronique en recherche stratégique sur le continent. Un levier d’autonomie africaine Cette nouvelle plateforme s’inscrit dans une dynamique plus large de souveraineté intellectuelle africaine. En centralisant les propositions politiques à travers un comité indépendant d’experts (ICE) et des appels à projets compétitifs, l’UA cherche à créer une chaîne de valeur africaine du savoir, où les Think tanks ne se contentent plus d’être des prestataires de diagnostics, mais deviennent des acteurs du pilotage stratégique du continent. Ce projet vient répondre à une carence structurelle : l’Afrique produit moins de 1 % de la recherche mondiale. Cette marginalité épistémique freine la formulation de politiques adaptées aux réalités locales, laissant le champ libre à des modèles exogènes souvent inadaptés. En rassemblant les travaux de 3 à 5 Think tanks par consortium, avec des subventions allant jusqu’à 10 millions USD, l’ATTP vise à générer des solutions africaines fondées sur des preuves africaines. Penser les transitions du continent L’impact économique potentiel est considérable. Les thématiques prioritaires ciblées – transformation économique, climat, ZLECAf, flux financiers illicites, capital humain, sécurité alimentaire – recoupent les grands chantiers du développement continental. En intégrant systématiquement les Think tanks dans la conception de politiques sur ces enjeux, l’UA veut faire émerger une gouvernance économique plus réactive, interconnectée et contextualisée. Ce positionnement répond aussi aux impératifs de l’Agenda 2063, qui mise sur des cadres d’action cohérents, informés par les données (CRF, STISA-2024, etc.). Comme le souligne Selma Malika Haddadi, vice-présidente de la Commission de l’UA, « la réalisation de l’Agenda 2063 exige davantage que de simples aspirations. Elle nécessite des preuves ». Un enjeu stratégique pour l’influence africaine Enfin, le soutien affiché de bailleurs internationaux – dont la Banque mondiale – montre une reconnaissance croissante de l’intelligence stratégique africaine. Mais pour éviter toute dépendance, l’Afrique devra capitaliser sur cette plateforme pour construire une autonomie durable de la pensée stratégique, condition essentielle à une influence géopolitique crédible sur la scène mondiale.

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