Afrique & Monde

Présidentielle 2025 au Cameroun : la bataille du Nord, terrain décisif d’une élection sous tension

« Le Nord, c’est plus qu’un enjeu électoral : c’est le thermomètre de la stabilité politique au Cameroun », confie un diplomate en poste à Yaoundé. À moins de deux mois de l’élection présidentielle prévue le 12 octobre, la région septentrionale du Cameroun cristallise toutes les attentions. En toile de fond : un rapport de force stratégique entre les figures politiques historiques, les poids lourds du régime et des ambitions régionales renouvelées. Une mobilisation avant l’heure Maroua, chef-lieu de l’Extrême-Nord, bruisse déjà du tumulte préélectoral. Officiellement, ce n’était qu’une « visite de travail économique ». Officieusement, l’escale très politique du ministre des Finances Louis-Paul Motaze, accompagné d’une imposante délégation gouvernementale, a marqué le lancement informel de la campagne du président sortant Paul Biya. Le chef de l’État n’a pas encore révélé ses intentions pour cette élection, mais son parti, le RDPC, occupe déjà le terrain avec méthode. Le Nord, une région convoitée et stratégique Le septentrion (Adamaoua, Nord, Extrême-Nord) représente plus de 35 % du corps électoral camerounais – un poids démographique déterminant. Historiquement acquis au RDPC, le Nord est devenu un espace de recomposition politique. Le retour d’Issa Tchiroma Bakary, ex-ministre et figure charismatique de Garoua, tout comme la tournée de Bello Bouba Maïgari (UNDP), confirment un changement de tempo. « Si le RDPC échoue à verrouiller le Nord, c’est toute la structure de son pouvoir qui s’effondre », analyse un chercheur en géopolitique basé à Douala. Sécurité, développement : les failles d’un bastion Malgré cette agitation politique, le septentrion demeure confronté à d’importants défis : Une Insécurité persistante due aux incursions de Boko Haram à la frontière nigériane ; la Faiblesse des infrastructures, accentuée par les inondations saisonnières ; la Pauvreté chronique, avec un taux de pauvreté estimé à plus de 65 % dans certaines zones rurales. Ces facteurs nourrissent une frustration grandissante, que les opposants espèrent canaliser en capital politique. « Le septentrion n’est pas qu’un grenier électoral, c’est un espace à reconquérir socialement et économiquement », affirme un analyste local. Perspectives Dans un contexte de vieillissement du leadership national, la présidentielle de 2025 pourrait signer l’amorce d’un tournant générationnel. En coulisses, la communauté internationale reste vigilante : UE, États-Unis, Union africaine surveillent l’évolution du climat préélectoral, tandis que les partenaires économiques chinois et français scrutent la stabilité du pays, pilier sous-régional en Afrique centrale. L’enjeu dépasse donc le seul verdict des urnes : il s’agit de la gestion d’une succession sous haute tension, dans un pays à la fois fragile et central pour l’équilibre régional.

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Classement de Shanghai 2025 : l’Afrique décroche du Top 1000

Avec seulement 17 universités classées contre 20 l’an passé, le continent enregistre un recul inquiétant qui reflète ses fragilités chroniques en matière de recherche, de financement et de gouvernance universitaire. Le classement 2025 de Shanghai Ranking, l’un des plus influents au monde dans le domaine universitaire, confirme une tendance inquiétante : l’Afrique peine à s’imposer dans l’élite académique mondiale. Cette année, seulement 17 universités africaines apparaissent dans le Top 1000, contre 20 en 2024. Une contre-performance significative, dans un contexte mondial où la compétition pour l’excellence académique s’intensifie. Un classement dominé par l’Occident Comme chaque année, les premières places sont largement trustées par les universités anglo-saxonnes : Harvard, Stanford, MIT, Cambridge ou encore Berkeley dominent le haut du tableau. Sur les 20 premières institutions mondiales, 16 sont américaines, 2 britanniques, 1 française (Paris-Saclay) et 1 chinoise (Tsinghua). Le Shanghai Ranking repose sur des critères strictement axés sur la performance scientifique et académique : nombre de Prix Nobel, médailles Fields, chercheurs les plus cités, publications dans Nature et Science, ou encore impact des publications indexées. Ces indicateurs favorisent les établissements disposant d’un écosystème de recherche robuste et financé, ce qui creuse l’écart entre les grandes puissances universitaires et les pays en développement. Afrique : une performance concentrée et inégale Sur les 17 universités africaines présentes dans le classement : Deux pays concentrent donc plus de 80 % des universités africaines classées. Le reste du continent, y compris des poids lourds démographiques comme le Nigeria, le Kenya ou la RDC, est absent du classement, révélant une fracture dans l’investissement et les politiques de l’enseignement supérieur. Les mieux classées sont sud-africaines : Côté égyptien, Cairo University arrive en tête, dans la tranche 401-500, suivie d’Alexandria University et Ain Shams University. Les autres institutions africaines présentes : Un recul inquiétant Trois universités africaines sortent du classement cette année : Ce retrait souligne le manque de continuité et la fragilité des politiques de recherche sur le continent. Une dynamique à reconstruire Le recul africain s’explique par plusieurs facteurs structurels : À titre de comparaison, des pays comme la Chine, l’Inde ou la Corée du Sud, grâce à une stratégie nationale d’excellence académique, voient leur nombre d’universités classées progresser chaque année. Recommandations pour un sursaut africain Pour espérer remonter dans les classements mondiaux, les pays africains doivent : Le Shanghai Ranking 2025 agit ici comme un miroir sévère, révélant à la fois les retards du continent et le potentiel encore inexploité de son capital humain. Pour transformer la formation supérieure en levier de développement, l’Afrique devra investir massivement dans l’excellence scientifique – et rompre avec le cycle de sous-performance.

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Accusations russes : l’Ukraine au cœur d’un théâtre d’ombres au Sahel et en Afrique centrale ?

Moscou lance une nouvelle offensive diplomatique : la Russie affirme avoir identifié une présence structurée d’instructeurs ukrainiens de drones dans plusieurs zones sensibles du continent africain, notamment au Sahel et en Afrique centrale. Ces allégations, relayées par l’agence TASS, imputent à Kiev un rôle actif dans des opérations paramilitaires clandestines, en soutien à des groupes armés qualifiés de terroristes. Ce que dit Moscou Selon Alexander Ivanov, directeur du Syndicat des officiers pour la sécurité internationale, une organisation proche du Kremlin : « Des instructeurs ukrainiens opèrent au Mali, au Soudan, en République démocratique du Congo, en République centrafricaine et au Tchad. Ils fournissent des drones – notamment des Mavic 3 modifiés – aux groupes armés et coordonnent des attaques contre les forces gouvernementales ». Alexander Ivanov affirme également que des livraisons clandestines ont été identifiées vers le Burkina Faso, la Somalie et la Libye, et accuse Kiev d’avoir équipé le groupe islamiste ADF (Forces démocratiques alliées) pour alimenter l’instabilité entre la RDC et le Rwanda. « Une attaque serait planifiée contre la RDC depuis un territoire sous contrôle ougandais afin d’en accuser Kampala », a-t-il ajouté. Décryptage géopolitique et sécuritaire Ces accusations, non vérifiées à ce stade par des sources indépendantes, s’inscrivent dans un contexte de recomposition stratégique en Afrique : Intérêts économiques et enjeux stratégiques Chiffres clés & points chauds Pays cité Allégation russe Acteurs impliqués Enjeu géostratégique Mali Formation de groupes terroristes par Kiev Ukrainiens, groupes armés locaux Zone d’influence post-française RDC Soutien à l’ADF Ukraine, ADF Frontière RDC-Rwanda, minerais RCA Appui à milices hostiles au pouvoir Kiev vs alliés russes (FACA/Wagner) Terrain stratégique russe Soudan Drones à factions rebelles Conflit civil complexe Accès à la mer Rouge Tchad Formation clandestine Instabilité régionale Position clé dans le Sahel Intelligence stratégique et guerre de l’information Les propos d’Ivanov s’inscrivent dans une offensive narrative russe, visant à : Silence de Kiev, prudence des analystes Au moment de la publication, aucune réaction officielle ukrainienne n’a été enregistrée. Des observateurs estiment cependant que ces accusations pourraient aussi servir à préparer une campagne diplomatique russe au prochain sommet Russie-Afrique. Un échiquier qui s’élargit L’Afrique devient un nouvel espace de confrontation indirecte entre puissances belligérantes d’Europe de l’Est. L’intrusion supposée de l’Ukraine dans les affaires sécuritaires du Sahel pourrait, si elle était confirmée, modifier durablement les équilibres politiques et militaires en Afrique subsaharienne. Pour l’instant, la prudence reste de mise : la guerre de l’information bat son plein, les faits restent à établir, mais les signaux d’un nouvel arc de tension géostratégique sont bien là.

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Sénégal : Bassirou Diomaye Faye invité du Medef à Paris

Le président sénégalais prendra la parole devant le patronat français les 27 et 28 août. Le président du Sénégal, Bassirou Diomaye Faye, est attendu à Paris les 27 et 28 août pour intervenir lors de la Rencontre des entrepreneurs de France (REF), organisée par le Mouvement des entreprises de France (Medef), qui fédère les principales organisations patronales françaises. La participation de Bassirou Diomaye Faye intervient à la suite de son déplacement au Japon, où il a assisté à la Conférence internationale de Tokyo sur le développement de l’Afrique (Ticad). Selon Africa Intelligence, le président sénégalais précédera à Paris le chef du gouvernement, Ousmane Sonko, attendu le 23 septembre pour le forum d’affaires BIG, organisé par Bpifrance à l’Accor Arena. En marge de ce rendez-vous, un entretien bilatéral est prévu entre Ousmane Sonko et François Bayrou. Quelques jours plus tard, le 26 septembre, Business France consacrera un forum d’affaires exclusivement au Sénégal, qui se tiendra au palais du Luxembourg, siège du Sénat français. Ces invitations successives témoignent de l’importance accordée par les acteurs économiques français aux nouvelles orientations politiques et économiques du Sénégal. Elles s’inscrivent dans une séquence où Dakar cherche à diversifier ses partenariats tout en consolidant son attractivité auprès des investisseurs internationaux. Contexte bilatéral : des relations mouvementées En parallèle de ces rapprochements, le Sénégal a vécu ces derniers mois des tensions marquées avec la France, notamment autour de figures politiques comme Ousmane Sonko et du retrait militaire français du territoire. Le Premier ministre Ousmane Sonko n’a jamais caché son hostilité à l’égard de la présence française au Sénégal. Il l’a qualifiée d’« incompatible avec la souveraineté » du pays, tout en soutenant que cela ne remettait pas en cause les accords de défense existants. En décembre 2024, il a annoncé la fermeture de toutes les bases militaires étrangères, visant implicitement celles de la France. Quelques mois plus tard, il a affirmé que cette décision était pleinement décidée par le Sénégal, sans suggestion française. La France a mis fin à sa présence militaire permanente au Sénégal le 17 juillet 2025, marquant la restitution officielle de ses dernières installations, après plus de six décennies d’une présence militaire continue. Cela fait suite à une demande formelle du président Faye dès novembre 2024, estimant que « la souveraineté ne s’accommode pas de la présence de bases étrangères ». Le dossier du massacre de Thiaroye, survenu en décembre 1944, continue de peser sur les relations bilatérales. Ousmane Sonko a réclamé l’ouverture complète des archives françaises sur cet épisode meurtrier – où des tirailleurs sénégalais furent réprimés pour avoir réclamé leurs droits de démobilisation – estimant que la France ne peut fixer unilatéralement le nombre des victimes.

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Présidentielle 2025/ Cameroun : le Groupe de Foumban plaide pour une opposition unie, sans imposer l’unité

Alors que la présidentielle de 2025 se profile à l’horizon au Cameroun, le « Groupe de Foumban » émerge comme une dynamique nouvelle au sein de l’opposition. Porté notamment par des figures comme Jean Moïse Mbog, militant du Front du salut national pour le Cameroun (FSNC), ce groupe affirme ne pas viser une coalition partisane classique, mais plutôt une union stratégique de l’opposition, fondée sur une éthique de non-agression et de responsabilité politique. Sur le plateau de l’émission « Grand Débat » de Cam 10 Télévision, Jean Moïse Mbog a précisé les contours du projet : « Il ne s’agit pas d’une coalition. C’est un appel à l’unité de l’opposition dans l’attitude et le discours. Le problème du Cameroun, c’est le RDPC. Il ne faut pas se tromper d’adversaire ». Cette sortie intervient après certaines tensions entre partis d’opposition, notamment avec le PURS et le SDF, qui ont suscité de vives réactions au sein même du groupe. Pourtant, un communiqué publié à l’issue des travaux de Foumban et Yaoundé (8–10 juin 2025) faisait bel et bien référence à une « candidature consensuelle », qui semble aujourd’hui reléguée au second plan. Malgré les divergences d’interprétation, les membres du groupe assurent qu’ils poursuivent les consultations avec d’autres leaders politiques, dans un esprit d’ouverture. L’avenir dira si cette stratégie portera ses fruits. Analyse politique et géopolitique 1. Une opposition fragmentée mais en éveil Le groupe de Foumban témoigne d’une prise de conscience progressive au sein de l’opposition camerounaise : face à un pouvoir centralisé et solidement enraciné depuis plus de quatre décennies, la division est contre-productive. La démarche vise à neutraliser les dynamiques centrifuges (disputes internes, rivalités de leadership, tribalisme politique) qui affaiblissent toute alternative crédible au régime du RDPC. 2. Le paradoxe de l’unité sans fusion L’ambiguïté du message est palpable : d’un côté, le discours de non-agression semble prôner une unité morale ou tactique de l’opposition, sans contrainte organisationnelle ; de l’autre, les textes issus des réunions de juin 2025 mentionnent clairement une volonté de candidature consensuelle – une notion plus exigeante, pouvant aboutir à une candidature unique, ce qui nécessiterait des compromis importants. Ce flou stratégique pourrait être à double tranchant : 3. Le RDPC : ciment paradoxal de l’opposition L’idée que « le problème du Cameroun, c’est le RDPC » agit comme force centripète : elle pousse les opposants à se regarder en alliés potentiels, au nom d’un adversaire commun. Mais elle risque aussi d’être trop réductrice. Sans proposition alternative claire et concertée, la critique du régime peut sembler creuse. 4. Enjeux géopolitiques internes Le choix du nom « Groupe de Foumban » est symbolique : Foumban est historiquement associé à la conférence constitutionnelle de 1961 qui a scellé la réunification du Cameroun. En se réclamant de cet héritage, le groupe vise à incarner une légitimité nationale et historique. C’est aussi une réponse implicite aux accusations récurrentes de régionalisme ou de tribalisation de l’opposition. Perspectives, forces et handicaps 1. Forces (Centripètes) 2.Handicaps (Centrifuges) Le Groupe de Foumban représente une tentative originale de reconfiguration de l’espace politique oppositionnel camerounais, non pas par la fusion, mais par la cohésion minimale. Dans un contexte où la démocratie reste verrouillée et la participation politique minée par la défiance, cette initiative peut créer une dynamique positive – à condition qu’elle gagne en clarté, en inclusion et en organisation. D’ici l’échéance de 2025, l’enjeu sera de savoir si cette convergence peut aboutir à un leadership crédible, partagé, et stratégiquement efficace, ou si elle retombera dans les travers bien connus de la division.

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RDC : Joseph Kabila accusé de trahison, Kinshasa frappe fort

Dans une séquence judiciaire inédite à l’échelle du continent, la République démocratique du Congo (RDC) a franchi un seuil historique. La RDC a requis la peine de mort à l’encontre de l’ancien président Joseph Kabila, 53 ans, jugé par contumace pour « crimes de guerre », « trahison » et « organisation d’un mouvement insurrectionnel ». Un événement aux répercussions potentiellement majeures sur la stabilité politique, la sécurité régionale et les équilibres diplomatiques en Afrique centrale. Une accusation d’État : M23, AFC et coup d’État présumé Devant la Haute Cour militaire de Kinshasa, le général Lucien René Likulia, représentant du ministère public, a dressé un acte d’accusation d’une rare sévérité : « Joseph Kabila, en intelligence avec le Rwanda, a cherché à renverser par les armes le régime constitutionnel », a-t-il déclaré, affirmant que l’ex-président est l’un des initiateurs de l’Alliance Fleuve Congo (AFC), branche politique du groupe armé M23. Ce mouvement, soutenu par Kigali selon de multiples rapports de l’ONU et de la CIRGL, contrôle aujourd’hui Goma, Bukavu et d’importantes portions du Nord-Kivu et Sud-Kivu – zones stratégiques aux sous-sols riches en coltan, or et terres rares. Pour Kinshasa, la complicité de Kabila aurait permis « l’infiltration militaire et institutionnelle » de la RDC. La résurgence de la peine de mort, levier juridique et politique Le moratoire sur l’exécution capitale, en vigueur depuis 2003, a été levé en 2024 dans un contexte d’exacerbation sécuritaire. S’il n’a pas encore été appliqué, la menace juridique agit comme un instrument de dissuasion politique, notamment à l’encontre d’élites soupçonnées de collusion avec des groupes rebelles. Le parquet requiert également 20 ans de prison pour « apologie de crimes de guerre », 15 ans pour « complot », en plus de lourdes compensations financières exigées par les provinces parties civiles. Réactions en chaîne : risques de polarisation et de fragmentation Le Parti du Peuple pour la Reconstruction et la Démocratie (PPRD), formation politique de Joseph Kabila, dénonce une manœuvre : « C’est un procès politique, le régime cherche à dissimuler son échec diplomatique et militaire », a réagi Ferdinand Kambere, son secrétaire général adjoint. Pour l’opposition, cette procédure viserait à neutraliser un acteur politique toujours influent, alors que les élections de 2026 s’approchent. En toile de fond, ce procès intervient dans un contexte de tensions croissantes entre Kinshasa et Kigali, mais aussi de rivalités entre les blocs régionaux : la Communauté d’Afrique de l’Est (EAC), où le Rwanda joue un rôle-clé, et la Communauté de développement d’Afrique australe (SADC), dont la RDC est membre. Décryptage géopolitique : entre guerre hybride et compétition économique Au-delà du volet judiciaire, ce procès traduit une mutation des modes de confrontation en RDC : guerre hybride mêlant armes, narratif politique, cyber-influence et exploitation des ressources. Selon plusieurs analystes, l’ombre portée du M23 s’inscrit dans une logique de captation des ressources stratégiques : 70 % du coltan mondial est exploité en RDC, dont une grande partie transite via le Rwanda. Pour l’expert en intelligence économique Jean-Louis Atangana, « cette affaire révèle l’usage d’acteurs politiques comme leviers d’instabilité géoéconomique dans la région des Grands Lacs ». Un tournant pour l’Afrique des Grands Lacs ? L’issue de ce procès pourrait redéfinir les équilibres internes à la RDC comme les rapports de force régionaux. Si la peine capitale était confirmée, elle constituerait une première dans l’histoire moderne africaine contre un ancien chef d’État, avec des répercussions imprévisibles en matière de stabilité démocratique, sécurité frontalière et investissements internationaux. En jeu : l’intégrité territoriale de la RDC, la survie du régime Tshisekedi, et l’avenir de la gouvernance sécuritaire en Afrique centrale. « La justice ne doit pas devenir l’arme de la revanche politique. Mais ignorer les crimes compromettrait à jamais la paix », tranche une source diplomatique occidentale à Kinshasa.

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Cameroun : le rejet de la requête déclarant Paul Biya inéligible

Alors que la présidentielle du 12 octobre approche, le Conseil constitutionnel camerounais a rejeté la requête déposée par Me Akere Muna, candidat déclaré, visant à faire constater l’inéligibilité du président sortant Paul Biya. Ce dernier, âgé de 92 ans et au pouvoir depuis 1982, brigue un huitième mandat. Si la décision n’est pas surprenante au regard du cadre juridique actuel, elle soulève des interrogations sur l’état du droit électoral, le fonctionnement institutionnel et la perception de l’équité démocratique au Cameroun. Une requête politiquement audacieuse mais juridiquement fragile Dans son recours, Akere Muna invoquait l’inaptitude présumée de Paul Biya à gouverner, soulignant son âge avancé et sa faible visibilité publique. Il faisait notamment appel à l’article 118 du code électoral, qui prévoit qu’un candidat peut être déclaré inéligible s’il se trouve sous l’influence ou la dépendance d’un tiers ou d’une puissance étrangère. Mais le Conseil constitutionnel a estimé que les éléments apportés ne constituaient pas une preuve suffisante d’une telle dépendance. Aucun certificat médical, ni élément factuel concret ne permettait d’établir un empêchement juridique à la candidature du président sortant. Juridiquement, la Constitution camerounaise ne prévoit ni limite d’âge ni évaluation médicale obligatoire pour les candidats à la présidence. Le cadre légal laisse donc peu de marge pour une exclusion sur la base de l’âge ou de la capacité physique, à moins d’une procédure médicale officielle – qui reste absente du droit en vigueur. Une décision conforme à la loi, mais pas sans débats Le rejet de la requête est cohérent avec les textes en vigueur, mais il illustre aussi les limites du système électoral camerounais, où le droit reste peu adapté aux préoccupations modernes sur la gouvernance, la transparence et la responsabilité. Selon plusieurs observateurs, le recours d’Akere Muna visait surtout à ouvrir un débat public sur la légitimité démocratique du pouvoir en place. Dans ce sens, même rejetée, sa démarche a permis de ramener sur le devant de la scène des questions essentielles : l’alternance, la vitalité institutionnelle, l’état de santé des dirigeants, ou encore l’aptitude des juges constitutionnels à exercer leur mission de manière indépendante. Pour certains juristes, la décision du Conseil reflète la prédominance du formalisme juridique sur les considérations d’intérêt public, tandis que d’autres soulignent le risque de dérive si l’on permettait des exclusions de candidature sur des critères subjectifs ou politiques. Entre statu quo institutionnel et expression d’un malaise politique Cette affaire révèle surtout un clivage profond entre la légalité et la légitimité, entre un système qui fonctionne selon les règles établies, et une opinion publique qui aspire à plus de transparence, de renouvellement et de contrôle démocratique. L’âge de Paul Biya, son style de gouvernance très discret, et l’absence apparente de préparation à la succession renforceraient l’idée d’un pouvoir verrouillé, peu perméable à la critique, selon certains. D’un autre côté, ses partisans insistent sur la stabilité politique qu’il incarne, sur son droit à se présenter comme tout citoyen, et sur le rôle du peuple souverain dans le choix de ses dirigeants – à travers les urnes, non les tribunaux. Un moment révélateur à quelques semaines d’un scrutin crucial Le rejet de la requête d’Akere Muna ne constitue pas un événement juridique exceptionnel, mais il marque un moment politique significatif dans une élection aux enjeux élevés. Il interroge la place des institutions dans la régulation du pouvoir, la capacité de l’opposition à se faire entendre, et l’état général du débat démocratique dans un pays où l’alternance n’a jamais été vécue au sommet de l’État. La présidentielle de 2025 s’annonce comme un test pour la crédibilité du processus électoral, autant que pour la résilience d’un système en proie aux critiques mais toujours solidement ancré. La controverse reste la seule façon pour l’opposition de rester visible  – même si cela ne modifie pas l’issue judiciaire.

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Boko Haram/Cameroun : une coopération régionale permet la libération de dix enfants

Une opération conjointe menée par les forces du Cameroun, du Nigeria et du Tchad a permis la libération de dix enfants enlevés par des éléments présumés de Boko Haram dans l’Extrême-Nord camerounais. Un adolescent n’a pas survécu à la captivité. Une semaine après leur enlèvement, dix enfants camerounais ont été libérés ce jeudi dans la région de l’Extrême-Nord, à la suite d’une opération conjointe menée par les forces armées et de sécurité du Cameroun, du Nigeria et du Tchad, appuyées par la Force multinationale mixte (FMM). Selon le gouverneur de la région, les enfants avaient été kidnappés le 13 août alors qu’ils se trouvaient à bord d’un bus assurant la liaison entre Kousseri et Maroua, sur la route nationale N°1. L’attaque a été attribuée à des membres présumés de Boko Haram, un groupe islamiste actif depuis plus d’une décennie autour du bassin du lac Tchad. Les enfants ont été retrouvés vivants à environ vingt kilomètres de la frontière nigériane, mais un adolescent enlevé au même moment a malheureusement été tué par les ravisseurs, ont précisé les autorités locales. Une coordination régionale en progrès Cette libération marque un succès important pour la coopération régionale contre Boko Haram. La Force multinationale mixte, qui regroupe les armées du Cameroun, du Nigeria, du Tchad et du Niger, a renforcé ses opérations transfrontalières dans les zones reculées du lac Tchad, où le groupe djihadiste reste actif malgré des revers militaires répétés. L’efficacité de cette dernière opération met en lumière la montée en puissance des mécanismes de coordination entre les forces armées des trois pays directement concernés, dans une région où les frontières poreuses facilitent les mouvements des groupes armés. L’Extrême-Nord toujours sous pression Depuis 2014, la région de l’Extrême-Nord du Cameroun reste l’un des points chauds du conflit contre Boko Haram, avec des centaines d’attaques, de kidnappings et de déplacements forcés. Bien que l’activité du groupe ait diminué par rapport à son pic, il conserve une capacité de nuisance importante, notamment via des cellules locales opérant de manière mobile. Les enlèvements d’enfants et de civils restent une stratégie de terreur utilisée pour obtenir rançons, recruter de force ou déstabiliser les communautés locales. Une dynamique à maintenir La récente opération de libération montre que la réponse militaire régionale peut porter ses fruits lorsqu’elle est rapide, coordonnée et appuyée par des échanges d’information efficaces. Mais les analystes sécuritaires soulignent que la seule dimension militaire ne suffira pas à éradiquer durablement l’insurrection islamiste. La stabilisation de la région exige aussi des programmes de développement, de réinsertion des ex-combattants et de renforcement de l’État dans les zones rurales marginalisées où Boko Haram recrute. La libération des enfants est un motif de soulagement, mais elle rappelle aussi la fragilité persistante des zones frontalières du bassin du lac Tchad. La consolidation des acquis sécuritaires passera par une approche régionale intégrée, mêlant sécurité, développement et résilience communautaire. Lutte contre Boko Haram : Chronologie synthétique opérations régionales 🔹 2015 – Création de la Force multinationale mixte (FMM) 🔹 2015 – Opération « Lafiya Dole » (Nigeria) 🔹 2016 – Offensive conjointe Nigéria–Cameroun–Tchad 🔹 2017 – Début des opérations transfrontalières coordonnées 🔹 2020 – « Colère de Bohoma » (Tchad) 🔹 2021 – Mort d’Abubakar Shekau 🔹 2022 – Reprise des opérations dans les zones insulaires du lac Tchad 🔹 2023 – Offensive autour de Kukawa (Nigeria) 🔹 Août 2024 – Opération transfrontalière « Shara » 🔹Août 2025 – Libération de dix enfants au Cameroun

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Cartographier autrement : l’Afrique défie l’héritage Mercator

En soutenant officiellement la campagne “Correct the Map”, l’Union africaine engage une offensive symbolique et géopolitique majeure. Objectif : redonner au continent sa juste représentation spatiale – et narrative – face aux distorsions héritées de l’époque coloniale. C’est une revendication cartographique, mais aux implications politiques profondes. L’Union africaine (UA) a annoncé son soutien à la campagne “Correct the Map”, qui exige le remplacement de la projection Mercator – omniprésente dans les atlas, les systèmes de navigation et les salles de classe – par la projection Equal Earth, plus fidèle aux proportions réelles des continents. Au cœur de ce plaidoyer : la réhabilitation visuelle, mentale et stratégique du continent africain, longtemps relégué à la marge – littéralement – sur les planisphères du monde. « Ce n’est pas une affaire de simple représentation, mais une question de souveraineté cognitive, de dignité et d’influence », affirme Selma Malika Haddadi, vice-présidente de la Commission de l’UA. Une distorsion historique, aux effets contemporains Créée en 1569, la projection de Gerardus Mercator a été pensée pour faciliter la navigation maritime. Mais cette carte allonge les terres proches des pôles et réduit celles de l’équateur, écrasant l’Afrique visuellement. Résultat : le Groenland paraît aussi grand que l’Afrique, alors qu’il est 14 fois plus petit. L’Europe et l’Amérique du Nord sont surdimensionnées. L’Afrique, visuellement diminuée, est aussi géopolitiquement marginalisée. Selon Fara Ndiaye, cofondatrice de Speak Up Africa, cette distorsion n’est pas neutre : « Elle alimente un imaginaire où l’Afrique est périphérique, inférieure. Cela commence dès l’enfance, à l’école ». Equal Earth : vers une carte plus juste Face à cela, des géographes américains ont mis au point en 2018 Equal Earth, une projection pseudo-cylindrique qui respecte la surface réelle des continents, sans sacrifier leur lisibilité. Déjà adoptée par la Banque mondiale, elle est soutenue par des acteurs africains comme Africa No Filter, qui militent pour son intégration dans l’éducation, les institutions et les interfaces numériques. La campagne vise aussi Google, qui continue d’utiliser Mercator par défaut sur mobile, malgré l’introduction du globe 3D sur desktop. « Il est temps que les outils numériques reflètent un monde équitable », souligne Moky Makura, directrice exécutive d’Africa No Filter. Cartes mentales, cartes de pouvoir La bataille cartographique est aussi une bataille de récit mondial. L’UA inscrit ce combat dans une dynamique plus large : restitution des biens culturels, débats sur les réparations coloniales, réforme des instances internationales (Conseil de sécurité de l’ONU, FMI, Banque mondiale). Changer la carte, c’est changer le centre de gravité symbolique. Car la carte façonne le regard, influence les politiques éducatives, médiatiques, diplomatiques. « Il ne s’agit pas de recentrer l’Afrique par orgueil, mais de corriger un déséquilibre structurel dans les outils de connaissance et de représentation », analyse un conseiller de la Commission UA. Un enjeu stratégique dans un monde en recomposition À l’horizon 2050, l’Afrique comptera près de 2,5 milliards d’habitants – soit un humain sur quatre. Riche en ressources critiques, au cœur des enjeux migratoires, énergétiques et climatiques, le continent attire les appétits : Chine, Russie, Turquie, puissances du Golfe et Occident y redoublent d’activisme. L’UA, en renforçant sa diplomatie du soft power, cherche à peser davantage dans l’agenda mondial. Ce changement de carte pourrait ainsi renforcer la posture stratégique de l’Afrique dans les négociations globales. Un petit pas symbolique, mais un levier d’influence majeur. Une demande portée jusqu’à l’ONU La campagne “Correct the Map” a officiellement saisi le Comité d’experts UN-GGIM (ONU) sur l’information géospatiale, qui examine actuellement la possibilité d’une recommandation mondiale sur les projections cartographiques. De plus en plus d’universitaires, ONG et diplomates hors d’Afrique appuient ce plaidoyer. Dans un monde où les cartes restent des instruments de pouvoir, décoloniser la représentation du globe devient un acte stratégique autant que pédagogique. « La carte est une arme silencieuse. L’Afrique demande simplement qu’on en change la mire », conclut un diplomate ouest-africain.

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Afrique-Qatar : une offensive à 300 milliards pour redessiner les alliances stratégiques

Doha déploie ses ambitions sur le continent africain avec une tournée diplomatique et économique sans précédent. Cheikh Al Mansour Bin Jabor Bin Jassim Al Thani, envoyé spécial de l’émir, propose des investissements massifs dans dix pays, avec à la clé une redistribution des cartes géopolitiques, économiques et sécuritaires. Le Qatar change de dimension en Afrique. Si l’émirat du Golfe a longtemps cmlultivé un rôle de médiateur discret sur le continent, il franchit aujourd’hui un cap stratégique avec une promesse d’investissements colossaux : 300 milliards de dollars, dont une large partie sera dirigée vers l’Afrique à travers le conglomérat Al-Mansour Holding. À sa tête : Cheikh Al Mansour Bin Jabor Bin Jassim Al Thani, cousin de l’émir Tamim Ben Hamad Al Thani, homme de confiance et stratège de cette nouvelle « diplomatie d’influence ». Une tournée historique et ciblée Lancée le 13 août 2025, la tournée diplomatique et économique de Cheikh Al Mansour traverse dix pays stratégiques d’Afrique centrale, australe et orientale : RDC, Zambie, Tanzanie, Angola, Botswana, Burundi, Gabon, Mozambique, Zimbabwe et Centrafrique. Ces États ont en commun une richesse en ressources critiques (cobalt, cuivre, lithium, pétrole, gaz, terres rares) essentielles à la transition énergétique mondiale. « Notre objectif est clair : bâtir des ponts durables entre Doha et l’Afrique sur la base d’un partenariat mutuellement bénéfique », a déclaré Cheikh Al Mansour lors de son escale à Lusaka. Des chiffres qui marquent Dans tous les pays visités, les promesses incluent le transfert de compétences, la création d’emplois locaux et le développement de synergies logistiques avec Qatar Airways ou d’infrastructures aéroportuaires, sur le modèle du partenariat avec le Rwanda. Une triangulation d’influences Si cette initiative économique semble purement commerciale, elle s’inscrit dans un jeu géopolitique et sécuritaire plus large, où Doha cherche à prendre une place que la Chine, les États-Unis, les Émirats arabes unis et l’Arabie saoudite convoitent aussi. Le Qatar s’appuie ici sur une double approche : Selon un analyste du Geopolitical Futures Forum, « le Qatar s’inscrit dans une stratégie d’influence structurelle, là où les autres acteurs se positionnent souvent dans l’urgence ou la captation rapide des ressources ». Rivalités dans le Golfe et nouvelles routes de la puissance En arrière-plan, cette offensive économique reflète les tensions entre monarchies du Golfe, notamment avec les Émirats arabes unis et l’Arabie saoudite, déjà très actives en Afrique. Le Qatar, conscient de la finitude de ses ressources fossiles, accélère sa diversification et tente de créer des dépendances croisées durables sur un continent encore sous-capitalisé mais riche en ressources. Doha ne cache plus son ambition : devenir un acteur mondial de premier plan en combinant puissance financière, diplomatie d’influence et stratégie d’alliances durables. Vers un « moment Qatar » en Afrique ? Cette tournée historique pourrait bien marquer le début d’un réalignement des puissances économiques en Afrique. Le Qatar, petit par sa taille mais ambitieux dans sa vision, entend durablement ancrer son empreinte sur un continent stratégique. Si les promesses se traduisent en projets concrets, Doha pourrait devenir un partenaire incontournable de l’Afrique post-Covid et post-pétrole, en rupture avec les logiques extractivistes classiques.

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