Territoires & Société

Etoudi – 12 octobre 2025 (Cameroun) : ELECAM engage les candidats dans le processus de supervision

À deux mois de l’élection présidentielle prévue pour le 12 octobre 2025, Elections Cameroon (ELECAM) poursuit la mise en place progressive de son dispositif électoral. Dans un communiqué publié ce week-end, l’organe en charge de l’organisation des scrutins invite les douze candidats définitivement retenus à désigner leurs représentants au sein des commissions départementales de supervision. Ces structures, présentes dans les chefs-lieux de département, jouent un rôle central dans le suivi du processus électoral au niveau local. Leur mission est d’assurer la régularité des opérations électorales, en permettant une surveillance multipartite – un levier de transparence souvent revendiqué par les formations politiques et la société civile. « Les candidats ou leurs mandataires sont invités à se rapprocher des services régionaux ou départementaux d’ELECAM pour déposer les noms de leurs représentants », indique le communiqué. Un processus institutionnel dans un contexte de prudence Si cette étape s’inscrit dans la continuité du calendrier électoral, elle intervient dans un climat politique empreint de réserves, notamment du côté des partis d’opposition. Ces derniers, bien que légalement intégrés au processus, continuent d’exprimer des doutes sur les garanties offertes par le cadre électoral actuel. Des déclarations récentes d’acteurs du Rassemblement Démocratique du Peuple Camerounais (RDPC), parti au pouvoir, critiquant l’attitude de certaines formations comme le Mouvement pour la Renaissance du Cameroun (MRC), ont suscité des réactions. L’un des cadres du parti majoritaire, Essomba Bengono, a affirmé que « le MRC ne prépare pas les élections, mais une contestation », une sortie perçue comme polémique par plusieurs observateurs. Ces tensions verbales témoignent d’un environnement politique toujours polarisé, où la suspicion envers l’organe électoral persiste, malgré le respect formel des échéances. Une liste de candidats validée sans surprise Sur les 13 dossiers initialement acceptés par ELECAM, un seul, celui de Hilaire Macaire Dzipan, a été écarté à l’issue du contentieux électoral devant le Conseil constitutionnel. La demande de réintégration formulée par Christine Moullende (Mouvement Progressiste) n’a pas été retenue. Au final, douze candidats participeront à la course, dont le président sortant Paul Biya. Il se retrouve face à onze concurrents, issus de formations diverses, avec des profils et programmes contrastés. Si la pluralité des candidatures est saluée dans certains cercles, la réalité de la compétition politique continue de faire débat, dans un système jugé par plusieurs analystes comme marqué par une forte concentration du pouvoir exécutif. Vers un scrutin sous observation La mise en place des commissions de supervision marque un jalon important dans la préparation du scrutin. Toutefois, la confiance dans le processus reste partielle, tant pour une partie de l’opinion publique que pour les partenaires internationaux. Plusieurs points sensibles, comme la composition perçue comme déséquilibrée d’ELECAM, ou le mode de publication des résultats, reviennent régulièrement dans les critiques adressées au cadre électoral camerounais. En 2018, des contestations avaient émergé autour de l’issue du scrutin, alimentées par une absence perçue de transparence dans le dépouillement et l’annonce des résultats. Une élection à forts enjeux, mais à l’issue incertaine Dans les prochaines semaines, les regards se porteront sur la campagne électorale, l’équité d’accès aux médias publics, et la capacité des institutions à garantir un traitement impartial des candidats. Si le respect des étapes techniques du calendrier électoral est globalement observé, la légitimité du scrutin dépendra aussi de la perception de son intégrité. À l’heure où le Cameroun est confronté à de nombreux défis – économiques, sécuritaires et sociaux -, cette élection présidentielle représente un test important pour ses institutions. Plus encore qu’un simple exercice démocratique, elle interroge sur la capacité du système politique à évoluer dans un cadre pacifique, pluraliste et inclusif.

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Cameroun – Extrême-Nord : enlèvement de onze civils sur l’axe Kousseri-Maroua, Boko Haram de nouveau en cause

Une attaque armée survenue mercredi matin dans la région de l’Extrême-Nord du Cameroun a conduit à l’enlèvement de onze personnes, ont confirmé les autorités locales jeudi. L’incident a eu lieu sur un axe routier stratégique reliant Kousseri à Maroua, à proximité de la frontière avec le Nigeria. Le bus de transport public, circulant sur la route nationale n°1, a été intercepté par un groupe d’hommes armés, vraisemblablement membres de Boko Haram, selon les premières analyses sécuritaires. Les assaillants ont contraint les passagers à descendre, ont relâché les femmes et le chauffeur, et ont emmené onze hommes adultes vers une destination inconnue. Aucune revendication n’a encore été formulée, mais l’attaque porte la signature classique du groupe jihadiste, actif dans la région depuis plus d’une décennie. Ce mode opératoire – embuscade sur axe routier, sélection des otages, retrait rapide – est typique des stratégies de harcèlement et d’enlèvement utilisées pour alimenter les réseaux de rançon, d’endoctrinement ou de recrutement forcé. Une zone sous haute tension depuis plus de dix ans L’Extrême-Nord camerounais, et en particulier les zones de Logone-et-Chari et du Mayo-Sava, constitue depuis 2013 l’un des points névralgiques de la guerre asymétrique que mène Boko Haram contre les États riverains du bassin du lac Tchad. Le Cameroun y a déployé d’importants moyens militaires, notamment via le BIR (Bataillon d’intervention rapide) et les comités de vigilance locaux, appuyés par la Force multinationale mixte (FMM), en coordination avec le Tchad, le Nigeria et le Niger. Malgré ces efforts, le groupe jihadiste continue de tirer profit de la porosité des frontières, de la pauvreté endémique et de la difficulté d’accès à certaines zones rurales. Le retrait progressif de certaines forces régionales et l’usure des dispositifs de surveillance facilitent la résurgence d’attaques ciblées, souvent dirigées contre des civils ou des cibles logistiques. Conséquences humanitaires et enjeux sécuritaires Outre l’insécurité routière qu’elle renforce, cette attaque souligne la persistance d’un risque élevé pour les populations civiles, déjà affectées par des déplacements massifs (plus de 350 000 déplacés internes selon l’OCHA en 2024) et la détérioration des conditions de vie dans la région. Elle relance également le débat sur l’efficacité des dispositifs de renseignement territorial, le manque de couverture sécuritaire permanente sur les grands axes, et la nécessité de renforcer la coopération transfrontalière avec les pays voisins. Le gouvernement camerounais n’a, pour l’instant, pas communiqué officiellement sur les mesures prises à la suite de l’incident.

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TICAD9 : Japon-Afrique, une alliance stratégique fondée sur la jeunesse et l’innovation

À la veille de la Conférence de Yokohama, Tokyo réaffirme son engagement envers un développement africain co-construit, porté par les jeunes et la sécurité humaine. À quelques jours de l’ouverture de la 9ᵉ Conférence internationale de Tokyo sur le développement de l’Afrique (TICAD9), qui se tiendra du 20 au 22 août à Yokohama, le Japon réaffirme, par la voix de Tanaka Akihiko, président de la JICA (Agence japonaise de coopération internationale), une vision stratégique du partenariat nippo-africain : un développement fondé sur l’innovation, la jeunesse et la coopération équitable. « L’avenir n’est pas quelque chose à recevoir, c’est quelque chose à construire, ensemble », affirme-t-il dans une tribune. Une vision fondée sur la sécurité humaine Face aux défis mondiaux croissants – changement climatique, fragmentation géopolitique, inégalités économiques -, le Japon s’appuie sur un principe fondateur de sa coopération : la sécurité humaine, qui vise à garantir la dignité, la résilience et l’autonomie des individus. Ce principe, inscrit dans la nouvelle charte de l’APD japonaise révisée en 2023, se décline sur le terrain africain à travers des initiatives concrètes. La Coalition pour le développement du riz en Afrique (CARD), lancée en 2008, a permis de doubler la production de riz sur le continent en dix ans. Objectif 2030 : atteindre 56 millions de tonnes et faire de l’Afrique une puissance agricole autosuffisante. Miser sur la jeunesse comme moteur de transformation Avec un Africain sur quatre dans le monde d’ici 2050, le Japon perçoit la jeunesse africaine comme un levier stratégique. Les programmes comme ABE (African Business Education), lancé en 2013, ont permis à près de 2 000 étudiants africains d’étudier et de travailler au Japon. Parmi eux, Pelonomi Moiloa, créatrice de Lelapa AI, incarne la réussite d’un transfert technologique Sud-Nord réciproque. En 2025, la JICA élargit cet engagement avec TOMONI Africa : un programme d’échanges visant à rapprocher les jeunesses japonaise et africaine autour de projets culturels, éducatifs et économiques. « Tomoni » signifie “ensemble” en japonais, une philosophie de coopération horizontale plutôt que descendante. Innovation et financement : la nouvelle ère de la coopération Au-delà des aides classiques, le Japon franchit une étape historique. La JICA, dont le mandat a été élargi par la loi en avril 2025, peut désormais prendre des risques financiers pour catalyser les investissements privés. Un virage stratégique incarné par l’initiative IDEA (Impact Investing for Development of Emerging Africa), qui vise à orienter les capitaux vers les start-ups africaines dans les secteurs clés : climat, santé, numérique. Déjà, le Nigeria a reçu un premier don pour soutenir l’écosystème des startups locales. Ce geste inaugure une nouvelle diplomatie économique nippone : soutenir l’émergence africaine par le biais d’une économie d’impact, mêlant capital, innovation et autonomie locale. Coopération multilatérale et sud-sud : une diplomatie globale Le format multilatéral de TICAD – associant États, secteur privé et société civile – reste un modèle de référence. Le Japon coopère étroitement avec le Secrétariat de la ZLECAf pour bâtir une zone économique africaine intégrée, et soutient les corridors logistiques régionaux. La JICA mise également sur des partenariats triangulaires, notamment avec l’Indonésie, le Brésil ou l’Égypte, pour partager expertises et technologies avec les pays africains. Une diplomatie du « co-développement » qui ancre l’Afrique dans une géopolitique multipolaire, hors du seul prisme Chine-Occident. Vers une diplomatie de co-création L’Afrique est à un carrefour historique. Les vulnérabilités – gouvernance, conflits, pauvreté – sont profondes, mais le potentiel démographique et entrepreneurial est immense. Le Japon choisit d’y répondre non par l’assistanat, mais par une coopération de co-création, fondée sur le respect, la confiance et la responsabilité partagée. À Yokohama, TICAD9 ne se limitera pas à des annonces de financements. Elle incarne une transformation plus profonde : celle d’un partenariat égalitaire, où la jeunesse et l’innovation deviennent les piliers d’un avenir commun, construit main dans la main.

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Afrique – IA : L’Union africaine trace la ligne rouge pour la souveraineté des peuples autochtones

  L’intégration des peuples autochtones dans l’ère numérique est devenue une question de souveraineté, de justice et de sécurité. L’Union africaine appelle à un encadrement stratégique et inclusif de l’intelligence artificielle pour éviter une nouvelle marginalisation. « L’IA ne doit pas perpétuer les injustices historiques », alerte la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (CADHP), organe consultatif de l’Union africaine (UA), à l’occasion de la Journée internationale des peuples autochtones. Au cœur des débats : l’intégration éthique des peuples autochtones africains dans l’essor des technologies émergentes, notamment l’intelligence artificielle (IA), alors que la compétition numérique mondiale s’accélère. Une question stratégique et géopolitique En Afrique, les peuples autochtones – souvent gardiens des écosystèmes vitaux du continent – se trouvent aujourd’hui à la croisée des chemins : entre reconnaissance de leurs droits et menaces d’une nouvelle forme d’exclusion, cette fois numérique. Leur marginalisation, souvent héritée des dynamiques coloniales et postcoloniales, risque d’être reconduite si les États et les acteurs technologiques n’intègrent pas leurs besoins et savoirs dans les stratégies nationales et régionales. « L’IA doit être construite avec et pour les peuples autochtones », insiste Aimé Ange Wilfrid Bininga, ministre congolais de la Justice et des Droits humains. Un message politique fort dans un contexte où les technologies, si elles ne sont pas encadrées, peuvent alimenter des logiques d’extraction de données, de désinformation, voire de perte de souveraineté culturelle et territoriale. Données, savoirs, territoires : la souveraineté en question L’UA appelle les États africains à intégrer dans leurs stratégies numériques le « consentement libre, préalable et éclairé » des communautés concernées. Une disposition qui s’inscrit dans la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, mais qui peine encore à se traduire en politiques publiques concrètes. Car au-delà des droits humains, c’est aussi une bataille stratégique pour la souveraineté des données. Nombre de savoirs autochtones – liés à l’environnement, à la santé, aux langues – sont aujourd’hui numérisés sans cadre légal clair, souvent exploités par des entreprises étrangères ou des projets technologiques non supervisés. « Il est impératif de mettre fin aux pratiques abusives et d’engager un véritable partenariat avec les communautés autochtones », souligne la CADHP. Cela implique une refonte des cadres juridiques, un dialogue inclusif, mais aussi une coopération entre gouvernements, secteur privé, société civile et universités. Risque sécuritaire : exclusion numérique et fracture culturelle Si les peuples autochtones sont exclus du développement de l’IA, les conséquences ne seront pas uniquement sociales ou culturelles, mais également sécuritaires. Marginalisation accrue, érosion identitaire, conflits fonciers aggravés par des projets technologiques imposés : les signaux d’alerte se multiplient. Audrey Azoulay, directrice générale de l’UNESCO, avertit : « En l’absence de dispositions pour garantir un développement éthique de l’IA, nous risquons de renforcer des préjugés néfastes et de dénaturer les langues autochtones ». Dans certains pays comme le Tchad ou la Tanzanie, des initiatives pilotes montrent qu’une collaboration respectueuse est possible. L’IA y est utilisée pour traduire les savoirs ancestraux en données environnementales ou climatiques, intégrées dans des programmes de gestion durable des ressources. Un modèle prometteur, mais encore trop marginal. Vers une diplomatie numérique panafricaine ? À l’heure où l’Afrique cherche à renforcer sa voix dans la gouvernance mondiale de l’IA – notamment à travers le Fonds africain pour l’IA éthique lancé en 2024 – la protection des droits des peuples autochtones devient une pierre angulaire de la diplomatie numérique africaine. Il s’agit désormais pour l’Union africaine d’articuler les objectifs du développement technologique avec les principes de justice historique, de diversité culturelle et de souveraineté économique. L’intelligence artificielle ne peut être un progrès pour l’Afrique que si elle respecte ses peuples les plus enracinés. L’enjeu n’est pas technologique mais civilisationnel : bâtir un avenir numérique inclusif ou répéter les erreurs du passé.

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Sommet de Luanda : l’Afrique à la recherche de solutions concrètes pour ses infrastructures

Du 28 au 31 octobre 2025, Luanda, capitale de l’Angola, accueille un sommet crucial sur le financement des infrastructures en Afrique. L’enjeu : mobiliser les milliards nécessaires pour répondre aux ambitions continentales, dans un contexte de tensions économiques et de compétition géostratégique accrue. Organisé par l’AUDA-NEPAD et la Commission de l’Union africaine, ce sommet se tient à un moment décisif. Le continent fait face à un déficit de financement des infrastructures dépassant les 100 milliards de dollars par an, selon les estimations de l’Union africaine. À l’horizon 2040, c’est 1 300 milliards de dollars qui devront être levés pour concrétiser des projets structurants, notamment dans le secteur de l’énergie. L’un des piliers de cette ambition est le Plan directeur des systèmes électriques continentaux (CMP), conçu pour jeter les bases d’un marché unique de l’électricité. Objectif : connecter les réseaux nationaux, favoriser les énergies renouvelables, et améliorer l’accès à l’électricité pour des centaines de millions d’Africains. Une bataille géoéconomique à enjeux multiples Au-delà des promesses techniques, ce sommet s’inscrit dans une logique géoéconomique plus large. L’Afrique cherche à diversifier ses sources de financement et à sortir d’une dépendance excessive vis-à-vis des bailleurs traditionnels. Des partenariats plus équilibrés avec les pays émergents (Chine, Inde, Turquie, Brésil) sont recherchés, tout comme une meilleure mobilisation des ressources internes et des marchés de capitaux africains. La présence attendue de banques de développement, de fonds souverains africains et d’investisseurs privés vise à établir des modèles de financement innovants et durables, là où les aides classiques ont montré leurs limites. Une opportunité de leadership pour l’Angola Pour Luanda, l’enjeu est aussi diplomatique. En accueillant ce sommet, l’Angola affirme sa volonté de jouer un rôle de pivot régional dans la planification continentale des infrastructures. Ce positionnement s’inscrit dans la stratégie du président João Lourenço, qui cherche à renforcer le poids de son pays au sein de l’Union africaine et des grandes initiatives panafricaines. Mais l’ambition africaine ne pourra aboutir que si elle s’accompagne d’un cadre réglementaire harmonisé, d’une bonne gouvernance des projets, et d’une volonté politique ferme pour dépasser les blocages nationaux.

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Enclavement africain : de l’isolement à la connexion stratégique

Face aux désavantages logistiques et commerciaux, l’Afrique enclavée s’allie à l’ONU et à des initiatives régionales comme le Maroc Atlantique pour transformer son handicap géographique en levier géoéconomique. Une mutation qui interroge les équilibres régionaux et la gouvernance mondiale. Par-delà les frontières, un nouvel agenda se dessine pour les seize pays africains privés d’accès à la mer. Marginalisés dans le commerce mondial, tributaires de corridors instables et freinés dans leur industrialisation, ces États – de l’Éthiopie au Zimbabwe – concentrent un paradoxe : riches en ressources, pauvres en débouchés. La Conférence de l’ONU sur les pays sans littoral, qui vient de tenir à Awaza, dans le Turkimenistan, a voulu rompre avec cette logique en dévoilant une feuille de route structurante. Derrière la technicité des réformes prônées – intégration régionale, numérisation douanière, modernisation logistique – se joue une bataille plus vaste : celle de la souveraineté économique. L’intégration par la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf) permet déjà de rediriger les flux vers des marchés intra-africains en croissance, tandis que les gains des corridors logistiques – comme celui de l’Afrique de l’Est – montrent que l’efficacité peut naître de la coopération. En Afrique centrale, où l’enclavement est aggravé par des conflits et une gouvernance fragile (Centrafrique, Tchad), ces avancées restent cependant embryonnaires, freinées par une instabilité politique structurelle. Mais le tournant pourrait venir de l’extérieur du cadre onusien. À l’instar de l’initiative Maroc Atlantique, qui ambitionne d’offrir aux pays sahéliens un accès stratégique à l’Atlantique via des infrastructures modernes, la géopolitique du désenclavement prend une nouvelle dimension. Ce projet, en apparence logistique, s’inscrit dans une dynamique plus large de rééquilibrage géoéconomique, où le Maroc cherche à renforcer son rôle pivot entre l’Afrique de l’Ouest et l’Europe. Pour le Sahel, c’est l’opportunité d’un ancrage alternatif face à un environnement régional sous tension – notamment avec le recentrage de l’AES sur des enjeux de souveraineté. Dans cette reconfiguration, le numérique s’affirme comme catalyseur. Si les exportations digitales des pays enclavés ne représentent encore que 0,3 % des flux mondiaux, leur croissance est fulgurante. Les services en ligne, insensibles aux barrières physiques, pourraient à terme compenser le déficit d’accès aux marchés maritimes – à condition que les inégalités d’accès au haut débit et à la 4G soient corrigées. Enfin, les minéraux critiques et le tourisme ouvrent d’autres horizons. Ressources convoitées pour la transition énergétique mondiale, afflux touristique post-COVID, démographie jeune : les atouts ne manquent pas. Mais sans réforme structurelle de l’architecture financière internationale – dette, fiscalité, investissements – point de développement durable. Comme l’a martelé la CNUCED à Séville : pas de prospérité sans cohérence des systèmes. Le désenclavement n’est plus une simple affaire de routes ou de ports, mais une question de stratégie collective, d’intelligence économique et de volonté diplomatique. Pour l’Afrique centrale comme pour l’ensemble des pays enclavés, c’est un test grandeur nature de solidarité régionale et de leadership. Car l’alternative n’est pas seulement entre isolement et intégration, mais entre survie subie et développement choisi.

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Etoudi – October 12, 2025 (Cameroon): The Opposition Seeks Unity, but Deep Divisions Remain

With just two months to go before the October presidential election, backroom negotiations among opposition figures for a single candidacy are multiplying. While the desire for change is openly expressed, deep divisions between key actors are hindering the formation of a credible and lasting alliance. Officially, 11 candidates have been approved by the Constitutional Council to challenge Paul Biya, who has been in power for 42 years. In reality, several of these candidates are working behind the scenes to build a coalition. Their stated goal: avoid the fatal fragmentation of votes that allowed the incumbent to win re-election in 2018 with 71.28% of the vote, according to official figures. Yet beyond good intentions, the coalition remains poorly structured. Points of convergence do exist – resolving the Anglophone crisis, constitutional reform, limiting the presidential term to five years, renewable once – but disagreements remain deep over who should lead and what strategy to adopt. “Some candidates are clearly willing to move forward together. But we are still stuck managing sensitivities and individual ambitions”, says a close adviser to Akere Muna, speaking on condition of anonymity. Bello Bouba in the Lead, But Divisive Among those considered to lead a possible coalition, Bello Bouba Maïgari appears to have an edge. A former minister, former Prime Minister, and native of the North – a region that alone accounts for nearly 30% of the electorate – he is seen by some as a potential compromise candidate. “He is perceived as experienced and able to reassure certain elites,” explains political analyst Njoya Moussa. “But his past in government works against him among voters seeking real change ”. His candidacy is also dividing grassroots supporters, with some criticizing it as an elitist strategy disconnected from the realities and demands of the broader population. An Opposition With Shifting Lines Other names, such as Cabral Libii, Akere Muna, and Maurice Kamto (whose candidacy was rejected), are still being discussed. Despite his absence from the race, Kamto’s party, the MRC, continues to wield significant influence, especially in urban areas and within the diaspora. “Kamto’s symbolic weight should not be underestimated. A clear endorsement from him could completely shift the balance”, notes political journalist Brice Tchana. Still, the opposition is struggling to define clear mechanisms for working together: What kind of governance? How would power be shared in the event of a victory? What campaign strategy should be adopted? These key questions remain largely unanswered. A Union at Risk of Being Superficial The obsession with a “single candidate” risks masking a deeper problem, observers warn. While numerical unity may be attractive, it cannot replace a shared political vision, nor resolve the ideological, regional, and generational divides within the opposition. “An alliance without project cohesion is an empty shell. The risk is forming a façade of unity that will collapse at the first strategic disagreement,” warns political analyst Lilian Ntamack. 2018: A Warning from the Past This isn’t the first time such an alliance has been attempted. In 2018, similar calls for unity fell apart at the last minute. The Biya camp, for its part, continues to benefit from the opposition’s instability. Without deep reform of the electoral system, the opposition can only rely on its own discipline, clarity of vision, and unity of purpose if it hopes to achieve change.

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Etoudi -12 octobre 2025 (Cameroun) : l’opposition veut s’unir, mais les lignes de fracture persistent

À deux mois de la présidentielle d’octobre, les tractations pour une candidature unique dans l’opposition se multiplient. Si la volonté de changement est affichée, les divergences profondes entre les acteurs freinent une alliance crédible et durable. Officiellement, ils sont 11 candidats à avoir été validés par le Conseil constitutionnel pour affronter Paul Biya, au pouvoir depuis 42 ans. En réalité, une partie de ces candidats s’emploie, en coulisses, à bâtir une coalition. Objectif affiché : éviter une dispersion fatale des voix comme en 2018, où l’opposition, divisée, avait permis au président sortant de l’emporter avec 71,28 % des suffrages, selon les chiffres officiels. Mais au-delà des intentions, cette coalition peine à prendre forme de manière structurée. Si les points de convergence ne manquent pas – résolution de la crise anglophone, révision constitutionnelle, réduction du mandat présidentiel à 5 ans renouvelable une fois – , les désaccords sur la personnalité à porter et la stratégie à adopter demeurent profonds. « Il y a une volonté claire de certains candidats d’aller ensemble. Mais nous en sommes encore à la gestion des susceptibilités et des ambitions individuelles », confie un proche conseiller d’Akere Muna, sous couvert d’anonymat. Bello Bouba en tête, mais contesté Parmi les figures évoquées pour conduire une éventuelle coalition, Bello Bouba Maïgari semble bénéficier d’un certain avantage. Ancien ministre, ancien Premier ministre, et issu du Nord – une région qui représente à elle seule près de 30 % du corps électoral –, il est vu par certains comme un compromis possible. « Il est perçu comme expérimenté et capable de rassurer certaines élites », analyse le politologue Njoya Moussa. « Mais son passé gouvernemental joue contre lui auprès des électeurs en quête de rupture ». Ce choix divise également dans les bases militantes, où certains dénoncent une stratégie élitiste, détachée des dynamiques populaires réelles. Une opposition à géométrie variable D’autres noms comme Cabral Libii, Akere Muna, ou encore Maurice Kamto (dont la candidature a été écartée) circulent dans les discussions. Le MRC de Kamto, bien qu’absent de la course, conserve une forte influence, notamment en zone urbaine et dans la diaspora. Brice Tchana, journaliste politique, estime qu’« il ne faut pas sous-estimer l’impact symbolique de Kamto. Un ralliement clair de sa part peut totalement rééquilibrer la dynamique ». Pourtant, l’opposition peine à définir des mécanismes concrets de fonctionnement commun : quelle gouvernance ? Quel partage du pouvoir en cas de victoire ? Quelle stratégie de campagne ? Autant de questions qui restent, pour l’instant, sans réponse claire. Une union qui risque de rester cosmétique ! L’obsession d’un « candidat unique » risque, selon certains observateurs, de masquer un manque de fond. Si l’unité arithmétique peut séduire, elle ne saurait remplacer une vision politique partagée, ni résoudre les fractures idéologiques, régionales et générationnelles au sein de l’opposition. Pour Lilian Ntamack, analyste politique, « une alliance sans cohésion de projet est une coquille vide. Le risque, c’est de créer une union de façade qui s’effondrera au premier désaccord stratégique ». 2018, un précédent En 2018 déjà, des appels similaires à l’unité avaient échoué à la dernière minute. Le camp Biya, lui, capitalise sur cette instabilité. À défaut d’une réforme profonde du système électoral, l’opposition ne peut compter que sur elle-même pour espérer une alternance.

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Gabon : l’amnistie des putschistes, entre réconciliation et stratégie

Le gouvernement efface les condamnations des putschs de 2019 et 2023, dans un geste d’apaisement aux implications politiques et régionales. Le gouvernement gabonais a franchi un cap symbolique le 12 août en adoptant une ordonnance d’amnistie générale couvrant les deux principaux épisodes de déstabilisation politique des dernières années : le coup d’État du 30 août 2023 ayant renversé Ali Bongo, et la tentative manquée de 2019 menée par le lieutenant Kelly Ondo Obiang. Cette mesure bénéficie aux membres du Comité pour la transition et la restauration des institutions (CTRI), mais aussi aux auteurs du coup d’état de 2019 toujours emprisonnés. Parmi eux, Kelly Ondo Obiang, que le président de transition Brice Oligui Nguema avait publiquement désigné comme son « petit frère », et dont l’avocat salue aujourd’hui un « soulagement ». Une volonté d’apaisement, mais aussi de consolidation Présentée comme un geste de réconciliation nationale, l’amnistie vise à refermer un cycle de crises institutionnelles. Elle permet également au président de transition de renforcer son image d’homme d’unité, tout en resserrant les rangs autour de son pouvoir. Cette décision soulève cependant des interrogations sur le message envoyé aux forces armées : la réhabilitation de putschistes pourrait, à terme, brouiller les repères démocratiques. Vers un nouveau modèle économique Dans le même temps, l’exécutif a annoncé un virage économique marqué : réduction du déficit, fin des exonérations fiscales, incitations à la création de valeur ajoutée, et réservations de certains métiers aux Gabonais. Ces réformes visent à atteindre un ambitieux objectif de 10 % de croissance et à freiner l’hémorragie de matières premières exportées sans transformation locale. Regard sous-régional : un précédent aux effets ambigus Dans une Afrique centrale marquée par une instabilité rampante (Tchad, RDC, Cameroun), cette amnistie pourrait inspirer d’autres transitions, ou au contraire inquiéter les régimes en place. Si elle peut être perçue comme un geste d’ouverture, elle risque aussi de légitimer, aux yeux de certains, le recours à la force pour accéder au pouvoir. Dans un contexte géopolitique tendu, le Gabon cherche donc un équilibre délicat : solder le passé, relancer l’économie, tout en évitant de fragiliser les fondations d’un retour à un ordre démocratique durable.

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Cameroun : 18 arrestations à Douala, la CONAC frappe fort contre la corruption

Une opération coup de poing révèle l’ampleur des fraudes dans la région du Littoral et marque un tournant dans la lutte anti-corruption. La Commission Nationale Anti-Corruption (CONAC) a procédé à 18 arrestations à la suite d’une campagne anti-corruption d’une semaine dans la région du Littoral, selon le président de l’institution, Dr. Dieudonné Massi Gams. Cette opération baptisée « Special Crusade » s’est achevée à Douala avec des résultats qualifiés de spectaculaires, révélant une corruption généralisée dans divers secteurs. Parmi les domaines visés figurent l’extorsion, les fraudes administratives, les détournements de fonds publics, ainsi que des abus de fonction par des agents municipaux. Les plaintes traitées ont notamment mis en lumière des pratiques illégales chez des conducteurs de moto-taxis, commerçants, mais aussi dans l’administration foncière, où des ventes illicites de terrains et des titres fonciers frauduleux ont été recensés. Sur les 80 dénonciations reçues, 61 concernaient des cas déjà existants dans la région, tandis que 19 nouveaux signalements ont été enregistrés. L’opération a également mis en évidence l’efficacité de canaux numériques comme WhatsApp, utilisés pour recueillir les plaintes de manière discrète, favorisant ainsi la participation citoyenne. Pour Dr. Massi Gams, ces arrestations ne constituent qu’une étape : « La commission ne se reposera pas tant que ce fléau social ne sera pas éradiqué », a-t-il affirmé. Il a aussi réitéré l’engagement de la CONAC à intensifier ce type d’opérations sur l’ensemble du territoire national. Cette action de terrain relance le débat sur l’impact réel des campagnes anti-corruption au Cameroun, où les efforts institutionnels se heurtent encore à une corruption enracinée dans les pratiques quotidiennes. Reste à savoir si cette croisade marquera un tournant durable.

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