15 juillet 2025

France-Afrique : la fin d’une tutelle, l’heure d’un partenariat adulte ?

Entre désillusions postcoloniales et espoirs de refondation, Paris est sommé de redéfinir sa place dans une Afrique plurielle, stratégique et souveraine. Alors que la France retire ses dernières bases militaires au Sahel et au Sénégal, la relation franco-africaine traverse une crise de légitimité inédite. Trois siècles d’histoire, faits de domination, d’alliances, de mémoire partagée, semblent aujourd’hui peser plus qu’ils ne rapprochent. « Ce n’est pas la présence de la France que nous rejetons, c’est son incapacité à nous voir comme égaux », confie un diplomate. D’un lien historique à une perte d’influence accélérée Avec plus de 4 500 soldats déployés dans le Sahel en 2020, la France a longtemps été perçue comme le garant sécuritaire de la région. Mais depuis 2021, le Mali, le Burkina Faso, le Niger et la Centrafrique ont rompu avec Paris, l’accusant d’ingérence politique et d’échec sécuritaire. Les critiques, alimentées par des campagnes russes et un ressentiment endogène, traduisent une jeunesse africaine en quête de souveraineté. « La France est confrontée à une génération qui n’a pas connu la colonisation, mais qui en subit les séquelles symboliques », analyse un chercheur de l’Institut français des relations internationales (IFRI). Coopération ou dépendance ? La France reste le 2e investisseur en Afrique subsaharienne, après la Chine, et consacre près d’un tiers de son aide publique au continent. Pourtant, cette aide est de plus en plus perçue comme asymétrique. Un étudiant étranger sur trois en France est africain, mais la coopération éducative reste marquée par une logique descendante. Vers une refondation crédible ? Le chef d’Etat français, Emmanuel Macron a promis une « nouvelle relation » fondée sur la transparence, la co-construction et le respect des souverainetés africaines. Mais la Françafrique continue de hanter les esprits, et l’heure n’est plus aux symboles mais aux actes. « Il faut que la France accepte d’être un partenaire parmi d’autres, dans un continent désormais multipolaire », estime une analyste africaine à l’UA. Noël Ndong

France-Afrique : la fin d’une tutelle, l’heure d’un partenariat adulte ? Read More »

Sanaga-Maritime : Édéa au carrefour des promesses industrielles et des fractures sociales

Située au cœur d’un axe stratégique entre Douala et Yaoundé, la ville d’Édéa cristallise les espoirs de développement industriel du Cameroun, mais fait face à des défis criants en matière d’inclusion sociale, d’infrastructures et de gouvernance. À 60 kilomètres de Douala, Édéa, chef-lieu du département de la Sanaga-Maritime, s’impose comme un pôle industriel historique au Cameroun. Dotée d’une centrale hydroélectrique majeure sur la Sanaga, d’une usine d’aluminium exploitée par Alucam, d’infrastructures portuaires en développement, et d’un réseau ferroviaire stratégique, la ville possède un potentiel économique considérable. Pourtant, sur le terrain, les promesses de développement se heurtent à des inégalités structurelles et à une gouvernance locale fragile. Un territoire riche en atouts… mal exploités Le département est traversé par des corridors logistiques cruciaux reliant les capitales économiques et politiques du pays. Il dispose aussi d’une biodiversité importante, d’un potentiel agricole sous-exploité (hévéa, palmier à huile, manioc, cacao) et d’un patrimoine touristique naturel et historique méconnu. La présence d’industries lourdes et de grandes entreprises agro-industrielles comme SOCAPALM ou Hevecam devrait logiquement tirer l’économie locale vers le haut. Mais la réalité est plus contrastée : chômage des jeunes, faible industrialisation en aval, pollution environnementale, expropriations foncières mal encadrées. « Le développement ne profite qu’à une minorité, et les populations locales peinent à en voir les retombées concrètes », explique un cadre local de la société civile, sous couvert d’anonymat. Déficit d’infrastructures et urbanisation anarchique La ville d’Édéa souffre d’un déficit chronique d’infrastructures de base : routes secondaires en mauvais état, accès limité à l’eau potable dans les zones rurales, services de santé saturés, équipements scolaires insuffisants. L’urbanisation progresse sans plan directeur clair, posant des risques en termes de sécurité, d’environnement et de cohésion sociale. La croissance démographique rapide, couplée à un exode rural mal maîtrisé, accentue les tensions foncières. De nombreux jeunes, sans emploi ni formation adéquate, se retrouvent marginalisés, ce qui nourrit des frustrations susceptibles d’alimenter l’instabilité sociale. Enjeux géopolitiques et de souveraineté économique Sur le plan stratégique, la Sanaga-Maritime joue un rôle pivot dans la stratégie énergétique nationale. La rivière Sanaga alimente plusieurs barrages majeurs, et des projets hydroélectriques supplémentaires sont en cours d’étude. « Celui qui contrôle l’énergie contrôle le développement », observe un analyste camerounais en intelligence économique. Cependant, la dépendance à des multinationales étrangères pour l’exploitation des ressources critiques (bauxite, aluminium, agro-industries) interroge la souveraineté économique locale. Le tissu industriel local reste embryonnaire, faute de politiques d’incitation à la transformation locale ou à la montée en gamme des chaînes de valeur. Quelles perspectives ? Pour que la Sanaga-Maritime devienne un vrai moteur du développement inclusif, plusieurs leviers sont nécessaires : • Un plan d’aménagement du territoire clair, intégrant les dimensions économique, sociale et écologique ; • Un dialogue transparent entre les industriels, les pouvoirs publics et les communautés locales, notamment sur les questions foncières ; • Un investissement accru dans la formation professionnelle, l’agro-industrie locale et l’économie circulaire ; • Une gouvernance locale renforcée, capable de planifier et de surveiller l’impact des investissements. À Édéa, le développement est en marche, mais il avance sur une ligne de crête. Entre opportunités industrielles majeures et inégalités persistantes, l’avenir du département dépendra de sa capacité à concilier modernisation économique, inclusion sociale et gestion responsable des ressources. La Sanaga-Maritime a les cartes en main – reste à savoir si les acteurs en présence sauront jouer une partie gagnante pour la population. Noël Ndong

Sanaga-Maritime : Édéa au carrefour des promesses industrielles et des fractures sociales Read More »

Scroll to Top