16 juillet 2025

Moussa Faki Mahamat, le diplomate du Sud global en mission pour la planète

Ancien président de la Commission de l’Union africaine, le Tchadien Moussa Faki Mahamat est nommé Envoyé spécial de l’ONU pour le Pacte 4P – une mission à haute intensité diplomatique, au cœur des fractures du système mondial. Le 1er juillet 2025, à Séville, l’ONU a donné un nouveau visage à son ambition de réforme du financement du développement : Moussa Faki Mahamat, 65 ans, est officiellement désigné Envoyé spécial pour les objectifs du Pacte pour la Prospérité des Peuples et de la Planète (4P). « Il n’y a pas de prospérité sans justice, pas de planète viable sans équité », a-t-il lancé dans un discours à la tonalité offensive. L’ex-Premier ministre tchadien et ancien président de la Commission de l’Union africaine (2017–2025) incarne une diplomatie du Sud global qui refuse la marginalisation et appelle à une refondation multilatérale. Son profil, à la fois panafricain, pragmatique et multilingue, en fait un pont stratégique entre blocs hétérogènes dans un monde financiarisé et géopolitiquement instable. Un rôle clé au carrefour des enjeux mondiaux Le Pacte 4P s’attaque à six chantiers : dette, fiscalité, capitaux, climat, infrastructures sociales, investissement d’impact. Il répond à une urgence : l’Afrique paie jusqu’à 5 fois plus cher l’accès aux marchés financiers que les pays du Nord. « Le système est asymétrique et vulnérabilisant », alerte António Guterres. Pour Vera Songwe, ex-directrice de la CEA : « Nous avons besoin de bâtisseurs de ponts, pas de forteresses. Moussa Faki peut l’être. » Diplomatie du développement, nouvelle géopolitique Sa présence remarquée à Kigali, lors de l’International Security Conference on Africa, montre que développement et sécurité sont désormais liés. Les fractures économiques alimentent l’instabilité. Faki devra éviter que le financement du développement ne se fracture lui aussi, entre BRICS, G7 et Sud global. « Le moment est venu d’avoir une voix du Sud au centre du débat mondial », affirme Nardos Bekele-Thomas (NEPAD). Avec ce mandat, Moussa Faki incarne une nouvelle diplomatie africaine : stratégique, inclusive et globale. Noël Ndong

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Sénégal : la France tourne la page militaire, mais redessine son influence

Le 18 juillet 2025, la France restituera sa dernière base militaire au Sénégal, mettant fin à plus de 60 ans de présence ininterrompue. Ce retrait s’inscrit dans une stratégie de transformation des relations franco-africaines, marquée par un changement de méthode, non de positionnement. Un retrait historique, mais structuré La base militaire de Ouakam, dernier bastion français au Sénégal, sera officiellement remise aux autorités sénégalaises le 18 juillet. L’annonce a été faite par l’ambassadrice de France à Dakar, Christine Fages, lors de la réception du 14 juillet. « Conformément aux orientations présidentielles, la France va restituer au Sénégal les emprises militaires des EFS dans quatre jours », a-t-elle déclaré. Cette opération s’inscrit dans un retrait progressif amorcé depuis mars 2025, incluant les sites de Rufisque, Maréchal, Saint-Exupéry et Contre-Amiral Protet, sous la supervision de la commission conjointe franco-sénégalaise. Elle met un terme à une présence militaire remontant à l’indépendance du Sénégal en 1960. D’un dispositif militaire à un partenariat stratégique Ce retrait n’est pas un désengagement, mais une reconfiguration. « Notre relation est désormais franche, équilibrée et assumée », a souligné Christine Fages. L’objectif est de dépasser le modèle post-colonial pour construire une coopération axée sur la formation, l’interopérabilité et la montée en compétence des forces locales. Le Sénégal, pôle de stabilité démocratique dans une région marquée par l’instabilité et le rejet de la France (Mali, Niger, Burkina Faso), devient un partenaire clé de ce nouveau paradigme. Noël Ndong

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le Diy-Gid-Biy , déclaré patrimoine mondial de l'Unesco

Cameroun : le Diy-Gid-Biy rejoint le patrimoine mondial, une victoire culturelle aux retombées géostratégiques

« L’Afrique a longtemps été oubliée du patrimoine mondial. Il est temps d’y rééquilibrer l’histoire », déclare le Directrice générale de l’UNESCO, Audrey Azoulay. Pour le directeur du Centre du patrimoine mondial de l’UNESCO, Lazare Eloundou Assomo,  « ce classement est un acte de reconnaissance mais aussi un appel à protéger ces héritages menacés ». À l’occasion de sa 47ᵉ session élargie, le Comité du patrimoine mondial de l’UNESCO a inscrit, le 11 juillet, le paysage culturel de Diy-Gid-Biy, dans les Monts Mandara (Nord Cameroun), sur la prestigieuse liste du patrimoine mondial. Cette distinction offre au Cameroun une arme de diplomatie culturelle, dans une région sous pression sécuritaire. « Le Cameroun tient là un joyau archéologique et diplomatique », déclare Marc-Antoine Pérouse de Montclos, chercheur à l’IRIS. Une mémoire ancrée, un message universel Le site, vieux de 500 à 800 ans, couvre 2 500 hectares de vestiges agricoles et religieux. Il illustre l’adaptation de sociétés montagnardes à un environnement rude, par la construction de terrasses, de fortifications en pierre sèche et de lieux de culte ancestraux. « Diy-Gid-Biy incarne l’ingéniosité sociale de peuples souvent marginalisés dans les récits nationaux. Ce classement est une réhabilitation historique», souligne Pr. Baba Wamé, anthropologue camerounais. Une réponse culturelle à l’instabilité Inscrit dans une zone frontalière touchée par Boko Haram, le site devient un levier de stabilisation identitaire. « La culture est un facteur de résilience. Valoriser le patrimoine, c’est renforcer les ancrages face à l’extrémisme », indique Mahamat Saleh Annadif, ancien représentant de l’ONU pour l’Afrique de l’Ouest. « La jeunesse locale ne protégera que ce qu’elle connaît et valorise. C’est un pari sur la paix à long terme », note le Coordonnateur de la Fondation Cameroun Mémoire. Un potentiel économique et diplomatique « L’inscription de Diy-Gid-Biy montre que le Cameroun peut exister autrement que par les tensions politiques », déclare un diplomate français à l’UNESCO. « Ce site peut devenir un symbole de diplomatie culturelle régionale si Yaoundé s’en donne les moyens », rappelle un  Analyste à l’ISS (Institute for Security Studies). Un signal continental, des défis durables Avec moins de 10 % des sites mondiaux classés situés en Afrique, mais près de 25 % en danger, l’inscription du Diy-Gid-Biy et du Mont Mulanje (Malawi) agit comme un rappel de l’urgence de préservation. « Les sites africains sont les plus vulnérables : conflits, extraction illégale, oubli institutionnel. Le défi commence après le classement », confie Aissata Tall Sall, ancienne ministre sénégalaise de la Culture. Patrimoine mondial, enjeu national Derrière ce classement symbolique, se joue une stratégie d’influence. Le Cameroun, au carrefour du politique, du sécuritaire et du culturel, peut transformer ce label en moteur de réconciliation territoriale, d’ouverture diplomatique et d’investissement durable. À condition de le protéger avec rigueur. Noël Ndong

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France-Guinée équatoriale : Duel Juridique à La Haye pour un Hôtel Particulier

Le mardi 15 juillet, la France et la Guinée équatoriale se sont retrouvés devant la Cour internationale de justice (CIJ) à La Haye, marquant un tournant significatif dans la bataille juridique entourant un hôtel particulier parisien, estimé à plus de 100 millions d’euros.  La Guinée équatoriale a sollicité des ordonnances d’urgence, affirmant avoir été spoliée de son bien immobilier par les autorités françaises. Cette confrontation est le résultat d’une condamnation pénale du vice-président équatoguinéen, Teodoro Nguema Obiang Mangue, communément appelé Teodorin. En 2021, ce dernier avait été condamné à trois ans de prison avec sursis et à une amende de 30 millions d’euros pour corruption, ce qui a conduit à la saisie de l’immeuble par la France au titre d’une loi sur la lutte contre les biens mal acquis. « La France a agi légalement en vertu de la loi pour combattre la corruption« , déclarent certains observateurs occidentaux,. Cependant, la Guinée équatoriale voit cette saisie comme une ingérence dans ses affaires internes. « Nous exigeons un accès immédiat et complet à notre propriété« , a clamé un porte-parole du gouvernement équatoguinéen. Un Bien immobilier au coeur de la diplomatie La question de la nature juridique de l’immeuble fait également surface. Malabo soutient qu’il s’agit d’une ambassade, violant ainsi la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques. En revanche, Paris maintient que cet immeuble n’est qu’une résidence privée, une position qui avait déjà été validée par la CIJ en 2016. La décision de la CIJ, attendue, pourrait influencer la dynamique des relations franco-équato-guinéennes. Non seulement elle pourrait déterminer l’avenir de la propriété de l’avenue Foch, mais elle pourrait également avoir des implications plus larges sur les droits diplomatiques à l’échelle internationale. Impact politique et économique Ce cas soulève des questions plus larges sur la gouvernance des ressources naturelles en Afrique. Alors que la Guinée équatoriale s’efforce de se défaire de son image occidentale de régime corrompu, cette bataille juridique revêt une dimension stratégique. Le pays, riche en pétrole, cherche à attirer des investissements étrangers tout en consolidant son image sur la scène mondiale. Cette affaire met également en lumière les défis auxquels sont confrontés les États en matière de justice internationale et d’application des décisions, illustrant la nécessité d’un engagement plus fort à l’échelle mondiale pour faire appliquer la gouvernance et protéger les droits de l’homme. Les décisions de la CIJ, bien qu’elles soient contraignantes, dépendent souvent de la volonté des États à les mettre en œuvre. Le verdict de la CIJ pourrait redéfinir non seulement les relations entre la France et la Guinée équatoriale, mais aussi influencer la manière dont la communauté internationale aborde la gouvernance et la responsabilité des dirigeants dans la gestion de leurs pays. Noël Ndong

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Cameroun : Emmanuel Kundé s’en est allé, un héritage stratégique pour l’Afrique

Disparu le 16 mai 2025 à l’âge de 69 ans, Emmanuel Kundé ne fut pas seulement un grand footballeur. Emmanuel Kundé fut un acteur-clé du rayonnement du Cameroun, de l’Afrique et d’un soft power sportif qui a su conjuguer talent, discipline et fierté nationale. Le 12 juillet 2025, Kakak, – près de Ndom, dans le département de la Sanaga maritime – a accueilli les obsèques d’une légende. Emmanuel Kundé, – qui signifie l’indépendance – deux fois champion d’Afrique (1984, 1988), héros du mondial 1990, s’est éteint à Yaoundé le 16 mai. « Il incarnait l’âme d’un football africain conquérant, digne et discipliné », confie Michel Kaham, son ancien coéquipier. Présents aux funérailles : Roger Milla, Samuel Eto’o, figures d’une même dynastie de football patriote. Né en 1956, formé au Canon de Yaoundé, Emmanuel Kundé, s’impose dès les années 1970 comme défenseur central au style sobre mais décisif. Il incarne une Afrique montante sur la scène sportive mondiale. Son penalty contre l’Angleterre en quart de finale du Mondial 1990 en Italie – devant 70 000 spectateurs et des milliards de téléspectateurs – est entré dans l’histoire. Pour la première fois, une équipe africaine atteignait ce stade de la compétition. Ce geste n’était pas seulement sportif : il était géopolitique. Un symbole du soft power camerounais Dans les années 1980-90, alors que l’Afrique peine à exister politiquement sur la scène internationale, des figures comme Kundé Emmanuel, offrent une autre image du continent : celle de la performance, du mérite, de la maîtrise. Le football devient une vitrine diplomatique. L’impact d’un Kundé dans l’imaginaire collectif est comparable à celui d’un Mandela dans le rugby : unificateur, respecté au-delà des frontières. Un héritage pour la jeunesse et l’économie du sport Après sa carrière, Emmanuel Kundé entraîne, transmet, structure. À une époque où l’intelligence économique passe aussi par l’exportation des talents et le rayonnement des ligues nationales, sa trajectoire inspire une politique sportive plus structurée. Le Cameroun, aujourd’hui exportateur de joueurs et organisateur de compétitions, lui doit une part de cette crédibilité. Emmanuel Kundé fut plus qu’un défenseur : un diplomate du terrain, un bâtisseur de respect, un ambassadeur d’un Cameroun qui voulait exister par le mérite. Sa disparition referme une époque, mais son influence, elle, continue d’irriguer les enjeux politiques, culturels et économiques du sport africain contemporain. Noël Ndong

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Cameroun : Paul Biya candidat pour un 8e mandat,  continuité stratégique dans un contexte régional instable

Entre stabilité institutionnelle, vision régalienne et appuis internationaux discrets, Yaoundé joue la carte de l’expérience. À 92 ans, le président Paul Biya, au pouvoir depuis 1982, a confirmé sa candidature à l’élection présidentielle d’octobre 2025. Une décision qui, selon ses partisans et une frange de la communauté internationale, incarne la continuité politique et la stabilité institutionnelle dans un environnement régional fragilisé par des coups d’État, des insurrections djihadistes et des crises de gouvernance. « Mon devoir est de préserver l’unité, la paix et les acquis de la République », a déclaré le chef de l’État dans une allocution sobre, diffusée depuis le palais d’Etoudi. Un choix de stabilité dans un environnement à haut risque Le Cameroun, frontalier du Tchad, de la République centrafricaine et du Nigeria, reste un pilier stratégique en Afrique centrale, en particulier dans la lutte contre Boko Haram, les réseaux criminels transfrontaliers et les mouvements séparatistes. Face à l’instabilité rampante dans la sous-région, Paul Biya se positionne comme le garant d’un État fort, diplomatiquement aligné et militairement structuré. « La continuité à Yaoundé est essentielle pour préserver l’équilibre régional », confie un diplomate européen sous couvert d’anonymat. La position mesurée des partenaires internationaux La France n’a pas officiellement commenté la candidature, mais Paris entretient des relations « pragmatiques » avec Yaoundé, saluant « la stabilité d’un partenaire clé ». Le Quai d’Orsay rappelle « la nécessité d’un processus électoral transparent et pacifique ». L’Union européenne, qui finance des programmes de gouvernance et de décentralisation, prône la « participation inclusive » et se dit attentive à l’environnement pré-électoral, tout en reconnaissant l’importance du rôle du Cameroun dans la lutte antiterroriste régionale. Quant aux États-Unis, s’ils restent critiques sur la situation des droits humains, ils soulignent l’intérêt stratégique du Cameroun dans la région du Golfe de Guinée. Le Département d’État plaide pour « un climat électoral libre et sécurisé », sans remettre en cause la légitimité de la candidature de Paul Biya. Gouvernance et trajectoire économique sous contrôle Avec une croissance attendue à 3,7 % en 2025 (Banque mondiale), des projets énergétiques majeurs en cours (GNL, barrages), et une monnaie arrimée à l’euro via la BEAC, le Cameroun reste économiquement résilient malgré les défis. Sous Biya, le pays a entamé une politique de décentralisation progressive et renforcé sa coopération militaire avec la France, l’Allemagne, Israël et les États-Unis. « Ce pays tient debout grâce à une diplomatie constante et un leadership calme, dans un monde agité », résume un analyste de l’International Crisis Group. Un enjeu de souveraineté maîtrisée Pour les partisans de Paul Biya, sa nouvelle candidature s’inscrit dans une vision de stabilité maîtrisée, refusant les transitions forcées ou les bouleversements institutionnels brusques. La candidature de Paul Biya n’est pas qu’un enjeu national, c’est un signal adressé à une région et à une communauté internationale en quête de points d’ancrage. Face aux incertitudes africaines, Yaoundé mise sur la stabilité, l’expérience et le contrôle des équilibres internes. Une stratégie qui, pour ses soutiens, a permis au Cameroun d’éviter les effondrements observés ailleurs. Chiffres clés : Noël Ndong 

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