Triangle Atlantique : la France tente de refonder les relations Europe-Afrique-Brésil
De la mémoire coloniale à la diplomatie climatique, la France cherche un nouvel axe stratégique entre l’Europe, le Brésil et l’Afrique Sous les lumières de Salvador de Bahia, Emmanuel Macron a choisi le symbole et la scène. En évoquant la transformation de l’ancien « triangle de la honte » – celui du commerce triangulaire – en « triangle amoureux » entre l’Europe, le Brésil et l’Afrique, le président français esquisse plus qu’un geste mémoriel : une vision géopolitique. Derrière la métaphore culturelle, il plaide pour une relation transatlantique ré-imaginée, ancrée dans la culture, la durabilité et la souveraineté partagée. Le message s’adresse à un monde fracturé. Le Brésil de Lula s’impose comme porte-voix du Sud global, l’Afrique cherche à convertir son potentiel agricole et énergétique en pouvoir géo-économique, tandis qu’une Europe dépendante en ressources et en marchés tente de se redéfinir dans un ordre post-occidental. Dans cette équation, Macron veut faire de la triangulation atlantique un levier stratégique : reconnecter les continents par leurs mémoires et leurs transitions. Du commerce des hommes au commerce du vivant Les anciennes routes de l’esclavage sont devenues les nouveaux corridors de l’économie verte. L’Amazonie, les savanes africaines et les plaines européennes partagent désormais les mêmes menaces : déforestation, stress hydrique, volatilité alimentaire et financiarisation du carbone. Le changement climatique ne crée plus seulement des déséquilibres écologiques, mais de véritables lignes de fracture géopolitiques. En reliant Europe, Afrique et Amérique du Sud, Paris cherche à bâtir un arc transatlantique de coopération environnementale. L’objectif : conjuguer savoirs traditionnels africains, puissance agricole brésilienne et technologies européennes pour façonner une économie circulaire et décarbonée. Ce triangle aurait pour cœur la biodiversité, pour colonne vertébrale la sécurité alimentaire, et pour moteur la régulation du carbone. Soft power et rééquilibrage des influences La visite de Macron à Bahia, ponctuée de références à l’héritage afro-brésilien et à la restitution du patrimoine africain, illustre un soft power réparateur. Il s’agit de retisser la confiance culturelle et symbolique avec les partenaires du Sud, à l’heure où la France perd de l’influence au Sahel et sur le continent africain. Mais ce projet reste fragile. Pour devenir un véritable espace d’innovation et non un slogan, le « triangle amoureux » devra s’incarner dans des investissements équitables, une gouvernance partagée et une diplomatie climatique cohérente.Faute de quoi, l’Atlantique Sud – ce carrefour d’histoires et de ressources – risquerait de redevenir non pas un lien, mais un champ de rivalités.
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