Afrique & Monde

Sommet de Luanda : l’Afrique à la recherche de solutions concrètes pour ses infrastructures

Du 28 au 31 octobre 2025, Luanda, capitale de l’Angola, accueille un sommet crucial sur le financement des infrastructures en Afrique. L’enjeu : mobiliser les milliards nécessaires pour répondre aux ambitions continentales, dans un contexte de tensions économiques et de compétition géostratégique accrue. Organisé par l’AUDA-NEPAD et la Commission de l’Union africaine, ce sommet se tient à un moment décisif. Le continent fait face à un déficit de financement des infrastructures dépassant les 100 milliards de dollars par an, selon les estimations de l’Union africaine. À l’horizon 2040, c’est 1 300 milliards de dollars qui devront être levés pour concrétiser des projets structurants, notamment dans le secteur de l’énergie. L’un des piliers de cette ambition est le Plan directeur des systèmes électriques continentaux (CMP), conçu pour jeter les bases d’un marché unique de l’électricité. Objectif : connecter les réseaux nationaux, favoriser les énergies renouvelables, et améliorer l’accès à l’électricité pour des centaines de millions d’Africains. Une bataille géoéconomique à enjeux multiples Au-delà des promesses techniques, ce sommet s’inscrit dans une logique géoéconomique plus large. L’Afrique cherche à diversifier ses sources de financement et à sortir d’une dépendance excessive vis-à-vis des bailleurs traditionnels. Des partenariats plus équilibrés avec les pays émergents (Chine, Inde, Turquie, Brésil) sont recherchés, tout comme une meilleure mobilisation des ressources internes et des marchés de capitaux africains. La présence attendue de banques de développement, de fonds souverains africains et d’investisseurs privés vise à établir des modèles de financement innovants et durables, là où les aides classiques ont montré leurs limites. Une opportunité de leadership pour l’Angola Pour Luanda, l’enjeu est aussi diplomatique. En accueillant ce sommet, l’Angola affirme sa volonté de jouer un rôle de pivot régional dans la planification continentale des infrastructures. Ce positionnement s’inscrit dans la stratégie du président João Lourenço, qui cherche à renforcer le poids de son pays au sein de l’Union africaine et des grandes initiatives panafricaines. Mais l’ambition africaine ne pourra aboutir que si elle s’accompagne d’un cadre réglementaire harmonisé, d’une bonne gouvernance des projets, et d’une volonté politique ferme pour dépasser les blocages nationaux.

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Enclavement africain : de l’isolement à la connexion stratégique

Face aux désavantages logistiques et commerciaux, l’Afrique enclavée s’allie à l’ONU et à des initiatives régionales comme le Maroc Atlantique pour transformer son handicap géographique en levier géoéconomique. Une mutation qui interroge les équilibres régionaux et la gouvernance mondiale. Par-delà les frontières, un nouvel agenda se dessine pour les seize pays africains privés d’accès à la mer. Marginalisés dans le commerce mondial, tributaires de corridors instables et freinés dans leur industrialisation, ces États – de l’Éthiopie au Zimbabwe – concentrent un paradoxe : riches en ressources, pauvres en débouchés. La Conférence de l’ONU sur les pays sans littoral, qui vient de tenir à Awaza, dans le Turkimenistan, a voulu rompre avec cette logique en dévoilant une feuille de route structurante. Derrière la technicité des réformes prônées – intégration régionale, numérisation douanière, modernisation logistique – se joue une bataille plus vaste : celle de la souveraineté économique. L’intégration par la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf) permet déjà de rediriger les flux vers des marchés intra-africains en croissance, tandis que les gains des corridors logistiques – comme celui de l’Afrique de l’Est – montrent que l’efficacité peut naître de la coopération. En Afrique centrale, où l’enclavement est aggravé par des conflits et une gouvernance fragile (Centrafrique, Tchad), ces avancées restent cependant embryonnaires, freinées par une instabilité politique structurelle. Mais le tournant pourrait venir de l’extérieur du cadre onusien. À l’instar de l’initiative Maroc Atlantique, qui ambitionne d’offrir aux pays sahéliens un accès stratégique à l’Atlantique via des infrastructures modernes, la géopolitique du désenclavement prend une nouvelle dimension. Ce projet, en apparence logistique, s’inscrit dans une dynamique plus large de rééquilibrage géoéconomique, où le Maroc cherche à renforcer son rôle pivot entre l’Afrique de l’Ouest et l’Europe. Pour le Sahel, c’est l’opportunité d’un ancrage alternatif face à un environnement régional sous tension – notamment avec le recentrage de l’AES sur des enjeux de souveraineté. Dans cette reconfiguration, le numérique s’affirme comme catalyseur. Si les exportations digitales des pays enclavés ne représentent encore que 0,3 % des flux mondiaux, leur croissance est fulgurante. Les services en ligne, insensibles aux barrières physiques, pourraient à terme compenser le déficit d’accès aux marchés maritimes – à condition que les inégalités d’accès au haut débit et à la 4G soient corrigées. Enfin, les minéraux critiques et le tourisme ouvrent d’autres horizons. Ressources convoitées pour la transition énergétique mondiale, afflux touristique post-COVID, démographie jeune : les atouts ne manquent pas. Mais sans réforme structurelle de l’architecture financière internationale – dette, fiscalité, investissements – point de développement durable. Comme l’a martelé la CNUCED à Séville : pas de prospérité sans cohérence des systèmes. Le désenclavement n’est plus une simple affaire de routes ou de ports, mais une question de stratégie collective, d’intelligence économique et de volonté diplomatique. Pour l’Afrique centrale comme pour l’ensemble des pays enclavés, c’est un test grandeur nature de solidarité régionale et de leadership. Car l’alternative n’est pas seulement entre isolement et intégration, mais entre survie subie et développement choisi.

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Etoudi -12 octobre 2025 (Cameroun) : l’opposition veut s’unir, mais les lignes de fracture persistent

À deux mois de la présidentielle d’octobre, les tractations pour une candidature unique dans l’opposition se multiplient. Si la volonté de changement est affichée, les divergences profondes entre les acteurs freinent une alliance crédible et durable. Officiellement, ils sont 11 candidats à avoir été validés par le Conseil constitutionnel pour affronter Paul Biya, au pouvoir depuis 42 ans. En réalité, une partie de ces candidats s’emploie, en coulisses, à bâtir une coalition. Objectif affiché : éviter une dispersion fatale des voix comme en 2018, où l’opposition, divisée, avait permis au président sortant de l’emporter avec 71,28 % des suffrages, selon les chiffres officiels. Mais au-delà des intentions, cette coalition peine à prendre forme de manière structurée. Si les points de convergence ne manquent pas – résolution de la crise anglophone, révision constitutionnelle, réduction du mandat présidentiel à 5 ans renouvelable une fois – , les désaccords sur la personnalité à porter et la stratégie à adopter demeurent profonds. « Il y a une volonté claire de certains candidats d’aller ensemble. Mais nous en sommes encore à la gestion des susceptibilités et des ambitions individuelles », confie un proche conseiller d’Akere Muna, sous couvert d’anonymat. Bello Bouba en tête, mais contesté Parmi les figures évoquées pour conduire une éventuelle coalition, Bello Bouba Maïgari semble bénéficier d’un certain avantage. Ancien ministre, ancien Premier ministre, et issu du Nord – une région qui représente à elle seule près de 30 % du corps électoral –, il est vu par certains comme un compromis possible. « Il est perçu comme expérimenté et capable de rassurer certaines élites », analyse le politologue Njoya Moussa. « Mais son passé gouvernemental joue contre lui auprès des électeurs en quête de rupture ». Ce choix divise également dans les bases militantes, où certains dénoncent une stratégie élitiste, détachée des dynamiques populaires réelles. Une opposition à géométrie variable D’autres noms comme Cabral Libii, Akere Muna, ou encore Maurice Kamto (dont la candidature a été écartée) circulent dans les discussions. Le MRC de Kamto, bien qu’absent de la course, conserve une forte influence, notamment en zone urbaine et dans la diaspora. Brice Tchana, journaliste politique, estime qu’« il ne faut pas sous-estimer l’impact symbolique de Kamto. Un ralliement clair de sa part peut totalement rééquilibrer la dynamique ». Pourtant, l’opposition peine à définir des mécanismes concrets de fonctionnement commun : quelle gouvernance ? Quel partage du pouvoir en cas de victoire ? Quelle stratégie de campagne ? Autant de questions qui restent, pour l’instant, sans réponse claire. Une union qui risque de rester cosmétique ! L’obsession d’un « candidat unique » risque, selon certains observateurs, de masquer un manque de fond. Si l’unité arithmétique peut séduire, elle ne saurait remplacer une vision politique partagée, ni résoudre les fractures idéologiques, régionales et générationnelles au sein de l’opposition. Pour Lilian Ntamack, analyste politique, « une alliance sans cohésion de projet est une coquille vide. Le risque, c’est de créer une union de façade qui s’effondrera au premier désaccord stratégique ». 2018, un précédent En 2018 déjà, des appels similaires à l’unité avaient échoué à la dernière minute. Le camp Biya, lui, capitalise sur cette instabilité. À défaut d’une réforme profonde du système électoral, l’opposition ne peut compter que sur elle-même pour espérer une alternance.

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Gabon : l’amnistie des putschistes, entre réconciliation et stratégie

Le gouvernement efface les condamnations des putschs de 2019 et 2023, dans un geste d’apaisement aux implications politiques et régionales. Le gouvernement gabonais a franchi un cap symbolique le 12 août en adoptant une ordonnance d’amnistie générale couvrant les deux principaux épisodes de déstabilisation politique des dernières années : le coup d’État du 30 août 2023 ayant renversé Ali Bongo, et la tentative manquée de 2019 menée par le lieutenant Kelly Ondo Obiang. Cette mesure bénéficie aux membres du Comité pour la transition et la restauration des institutions (CTRI), mais aussi aux auteurs du coup d’état de 2019 toujours emprisonnés. Parmi eux, Kelly Ondo Obiang, que le président de transition Brice Oligui Nguema avait publiquement désigné comme son « petit frère », et dont l’avocat salue aujourd’hui un « soulagement ». Une volonté d’apaisement, mais aussi de consolidation Présentée comme un geste de réconciliation nationale, l’amnistie vise à refermer un cycle de crises institutionnelles. Elle permet également au président de transition de renforcer son image d’homme d’unité, tout en resserrant les rangs autour de son pouvoir. Cette décision soulève cependant des interrogations sur le message envoyé aux forces armées : la réhabilitation de putschistes pourrait, à terme, brouiller les repères démocratiques. Vers un nouveau modèle économique Dans le même temps, l’exécutif a annoncé un virage économique marqué : réduction du déficit, fin des exonérations fiscales, incitations à la création de valeur ajoutée, et réservations de certains métiers aux Gabonais. Ces réformes visent à atteindre un ambitieux objectif de 10 % de croissance et à freiner l’hémorragie de matières premières exportées sans transformation locale. Regard sous-régional : un précédent aux effets ambigus Dans une Afrique centrale marquée par une instabilité rampante (Tchad, RDC, Cameroun), cette amnistie pourrait inspirer d’autres transitions, ou au contraire inquiéter les régimes en place. Si elle peut être perçue comme un geste d’ouverture, elle risque aussi de légitimer, aux yeux de certains, le recours à la force pour accéder au pouvoir. Dans un contexte géopolitique tendu, le Gabon cherche donc un équilibre délicat : solder le passé, relancer l’économie, tout en évitant de fragiliser les fondations d’un retour à un ordre démocratique durable.

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Cameroun : 18 arrestations à Douala, la CONAC frappe fort contre la corruption

Une opération coup de poing révèle l’ampleur des fraudes dans la région du Littoral et marque un tournant dans la lutte anti-corruption. La Commission Nationale Anti-Corruption (CONAC) a procédé à 18 arrestations à la suite d’une campagne anti-corruption d’une semaine dans la région du Littoral, selon le président de l’institution, Dr. Dieudonné Massi Gams. Cette opération baptisée « Special Crusade » s’est achevée à Douala avec des résultats qualifiés de spectaculaires, révélant une corruption généralisée dans divers secteurs. Parmi les domaines visés figurent l’extorsion, les fraudes administratives, les détournements de fonds publics, ainsi que des abus de fonction par des agents municipaux. Les plaintes traitées ont notamment mis en lumière des pratiques illégales chez des conducteurs de moto-taxis, commerçants, mais aussi dans l’administration foncière, où des ventes illicites de terrains et des titres fonciers frauduleux ont été recensés. Sur les 80 dénonciations reçues, 61 concernaient des cas déjà existants dans la région, tandis que 19 nouveaux signalements ont été enregistrés. L’opération a également mis en évidence l’efficacité de canaux numériques comme WhatsApp, utilisés pour recueillir les plaintes de manière discrète, favorisant ainsi la participation citoyenne. Pour Dr. Massi Gams, ces arrestations ne constituent qu’une étape : « La commission ne se reposera pas tant que ce fléau social ne sera pas éradiqué », a-t-il affirmé. Il a aussi réitéré l’engagement de la CONAC à intensifier ce type d’opérations sur l’ensemble du territoire national. Cette action de terrain relance le débat sur l’impact réel des campagnes anti-corruption au Cameroun, où les efforts institutionnels se heurtent encore à une corruption enracinée dans les pratiques quotidiennes. Reste à savoir si cette croisade marquera un tournant durable.

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Afrique : 155 000 morts en dix ans, l’insécurité islamiste s’étend et se transforme

La violence attribuée aux groupes islamistes militants atteint des sommets en Afrique, entre expansion territoriale, gains technologiques et fragilité accrue des États. .En une décennie, 155 000 morts ont été attribuées aux violences islamistes militantes sur le continent africain. En 2025, cette menace a atteint un nouveau pic de létalité avec 22 307 décès, en hausse de 60 % par rapport à la période 2020–2022. Trois régions concentrent 99 % des morts : le Sahel, la Somalie et le bassin du lac Tchad. Cette étude est l’œuvre duCentre d’études stratégiques de l’Afrique (CESA). Sahel : un effondrement sécuritaire Avec près de 10 700 morts cette année, le Sahel reste l’épicentre de la crise. Le Burkina Faso concentre 55 % de ces décès, suivi du Mali, où 81 % des 17 700 morts recensées depuis 2010 ont eu lieu après le coup d’État de 2020. La perte de contrôle territorial est massive : seulement 40 % du territoire burkinabè est sous contrôle gouvernemental, et environ 950 000 km² sont hors d’accès à l’autorité étatique dans la région, soit l’équivalent de la Tanzanie. Deux groupes dominent : le JNIM, affilié à al-Qaïda, et l’EIGS, lié à Daech. Le JNIM, actif au Mali et au Burkina Faso, contrôle de vastes zones et emploie de nouveaux moyens technologiques comme les drones et les engins explosifs improvisés, rendant la menace plus sophistiquée. Fait marquant : les forces maliennes et leurs alliés russes de Wagner/Africa Corps ont tué plus de civils (6 058) que les groupes djihadistes eux-mêmes (5 708) depuis 2021. Cette répression nourrit le discours de légitimation des groupes comme le JNIM, qui se présentent comme « protecteurs » des populations peules visées. Somalie : l’insurrection se mondialise En Somalie, 7 289 morts sont à déplorer en 2025. Al Shabaab, lié à al-Qaïda, reste la force dominante avec jusqu’à 200 M$ de revenus annuels. L’organisation bénéficie désormais du soutien opérationnel des Houthis du Yémen, ce qui lui a permis d’améliorer ses capacités de frappe, y compris avec des missiles balistiques et des drones. La montée en puissance de l’État islamique en Somalie (ISS) inquiète également. Cette branche locale, désormais dotée de 1 000 combattants, agit comme centre financier et logistique pour Daech au niveau global, selon l’ONU. Pour la première fois, ses opérations ont causé 1 065 morts cette année. Bassin du lac Tchad : résurgence tactique Le bassin du lac Tchad, où sévissent Boko Haram et l’ISWA, enregistre 3 982 morts, soit une hausse de 7 %. L’ISWA, de plus en plus structuré, a pris d’assaut 15 bases militaires au Nigeria cette année, utilisant vision nocturne et drones armés. Le pays a vu une augmentation de 18 % des morts, principalement dans l’État de Borno. La violence s’étend à de nouveaux territoires. Deux groupes, Lakurawa et Mahmuda, opèrent dans le nord-ouest du Nigeria, zone auparavant dominée par les « bandits ». Leurs liens avec des groupes sahéliens comme l’EIGS inquiètent les autorités. Zones secondaires : signaux faibles à surveiller Une menace en recomposition L’évolution géographique et technologique des groupes islamistes militants en Afrique souligne leur résilience et leur capacité d’adaptation. Leurs financements, leurs alliances (notamment transcontinentales), et leur ancrage territorial menacent désormais la souveraineté effective de plusieurs États, notamment au Sahel. Implications stratégiques : « Ce n’est pas uniquement un enjeu africain. La militarisation asymétrique des groupes islamistes militants menace aujourd’hui la stabilité de toute la bande sahélo-saharienne et les corridors maritimes mondiaux », explique un analyste du Centre d’études stratégiques de l’Afrique. Deux Chiffres à retenir : 155 000 morts en 10 ans imputables aux groupes islamistes militants en Afrique.22 307 morts en 2025, un record absolu.

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Afrique centrale : entre recul démocratique et éveil citoyen

Alors que les institutions démocratiques s’effritent, l’Afrique centrale voit émerger une nouvelle forme de citoyenneté active, portée par une jeunesse connectée et une société civile inventive. Le rapport Afrobaromètre 2025 met en lumière ce paradoxe africain dans une région particulièrement marquée par l’instabilité politique. Paradoxalement, 72 % des électeurs africains ont participé aux dernières élections nationales, selon l’enquête Afrobaromètre 2025, malgré un climat de défiance envers les institutions et une multiplication des dérives autoritaires. En Afrique centrale, cette situation est encore plus contrastée : les élections continuent, mais le cadre démocratique s’effondre. Des institutions affaiblies, une méfiance grandissante Dans des pays comme le Cameroun, le Congo ou la Guinée équatoriale, la longévité des régimes en place, souvent soutenue par des réformes constitutionnelles controversées, alimente la défiance. Afrobaromètre montre que la confiance envers les partis au pouvoir a chuté de 15 points en moyenne depuis 2011, tandis que celle envers les partis d’opposition a aussi reculé de 7 points. Au Tchad, les transitions militaires successives et les promesses de retour à l’ordre constitutionnel non tenues illustrent la fragilité des institutions. Résultat : le taux de participation formelle à des partis politiques est en baisse, à l’image du Burkina Faso (hors zone Afrique centrale mais comparable), où cet indicateur a chuté de 45 points en 12 ans. Une citoyenneté vivante, hors des cadres officiels Ce déclin institutionnel n’a pas tué l’engagement citoyen. 94 % des Africains, selon le rapport, participent à la vie politique sous d’autres formes. En Afrique centrale, cela se traduit par : « Les citoyens ne croient plus au vote comme levier de changement, mais ils croient encore en leur pouvoir d’agir, note une sociologue de l’Université de Kinshasa ». Liberté d’expression : une perception qui surprend Fait surprenant, 69 % des personnes interrogées se disent libres d’exprimer leurs opinions, même dans des pays où les journalistes et militants sont régulièrement muselés. Cette résilience traduit un changement culturel : les citoyens ne passent plus uniquement par les canaux classiques, mais par des espaces alternatifs, informels, souvent numériques ou communautaires. Un défi pour les partenaires internationaux Dans une région où l’influence occidentale recule au profit d’acteurs comme la Russie, la Chine ou la Turquie, la transformation des formes de participation politique impose une nouvelle approche de la gouvernance. « Il ne suffit plus d’organiser des élections encadrées. Il faut investir dans l’éducation civique, les médias indépendants, les lieux de débat, insiste un diplomate européen à Libreville ». Canaliser l’énergie citoyenne, un enjeu central L’Afrique centrale incarne à elle seule ce paradoxe du continent africain : une démocratie institutionnelle en crise, mais une société en quête de participation, de reconnaissance et de justice. Pour éviter que cette énergie ne se transforme en frustration, voire en violence, les États comme les partenaires internationaux doivent repenser en profondeur leurs méthodes d’appui à la gouvernance. La démocratie ne se mesure plus uniquement aux urnes, mais aussi dans la rue, sur les réseaux et dans les imaginaires citoyens. L’Afrique centrale, souvent caricaturée pour ses régimes autoritaires, pourrait bien être aussi le théâtre d’une réinvention silencieuse mais puissante de la citoyenneté.

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Cameroon / Colonial War Acknowledged: A Strategic Turning Point in France’s African Policy

In an unprecedented act of historical acknowledgment, French President Emmanuel Macron has officially admitted that France conducted a true colonial war in Cameroon, both before and after the country’s independence in 1960. This diplomatic milestone – with geopolitical, memorial, and economic repercussions – forms part of the French president’s broader strategy to rebalance Franco-African relations. “It is my responsibility today to assume the role and responsibility of France in these events,” wrote Macron in a letter to Cameroonian President Paul Biya, published on August 12, 2025. The recognition is based on a comprehensive 1,000-page report by a commission of historians submitted in January 2025, led by Karine Ramondy, an expert in colonial conflicts. The report explicitly characterizes the French military operations as systemic violence with repressive, political, and lethal intent, targeting independence movements – in particular, the Union of the Peoples of Cameroon (UPC). A Historical and Strategic Shift Between 1955 and 1961, French forces conducted, according to historians, an asymmetric war against nationalist fighters in the Sanaga-Maritime, Bamiléké, and Southwest regions. Estimated civilian and military casualties: tens of thousands. Macron also acknowledged that the war continued beyond independence through French support to the authoritarian regime of Cameroon’s first president, Ahmadou Ahidjo. This recognition comes at a time when France is attempting to reposition its African policy, weakened by the rising influence of China, Turkey, and Russia, and a growing backlash against its military presence in the Sahel. “This recognition enables France to reactivate a weakened strategic link, in a region of Central Africa where the competition for influence is intensifying”, said a French diplomat on condition of anonymity. Memory, Politics, and Reparations: A Fragile Balance On the ground, reactions remain mixed. Mathieu Njassep, president of the Cameroonian Veterans Association (Asvecam), stated: “It’s good that he acknowledges it. But we expect more. France can pay reparations. It destroyed villages, roads, so many things…” The issue of financial or symbolic reparations, highly sensitive, is not addressed in the French president’s letter. Yet, it could emerge as a bilateral or legal point of contention, especially amid a politically tense environment in Yaoundé. Archive Diplomacy and Strategic Intelligence President Macron proposes the creation of a Franco-Cameroonian working group to facilitate continued research and open access to French archives. Beyond symbolism, this effort reflects a logic of historical intelligence. “Access to archives is essential not only to restore truth, but also to produce a shared memory that prevents political exploitation of past traumas,” notes historian Karine Ramondy. This documentary openness could also allow France to frame the narrative, especially at a time when information warfare on social media platforms is becoming a critical geopolitical tool. France’s Repositioning in Africa This announcement comes amid France’s military disengagement from the Sahel, a sharp decline in influence in West Africa, and the emergence of Russian-backed private security groups across the continent. In this context, Central Africa, with its historically pro-French stance, now appears as a key zone for France’s economic and strategic redeployment. Cameroon, due to its geographic location and natural resources (cocoa, oil, timber, natural gas), remains an essential economic partner, with Franco-Cameroonian trade reaching €1.1 billion in 2024. Towards a Postcolonial Redefinition? By acknowledging France’s responsibility in a long-silenced conflict, President Macron seeks to settle a historical debt while reaffirming an ambition: to reshape the Africa–France relationship on a foundation of truth – without, however, explicitly opening the door to reparations. A delicate balancing act, at the crossroads of historical duty, diplomatic strategy, and geo-economic priorities. Historical Events Referenced

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Cameroun/Guerre coloniale reconnue : un tournant stratégique dans la politique africaine de la France

Dans une démarche inédite de reconnaissance historique,  le président français, Emmanuel Macron a officiellement admis que la France avait mené une véritable guerre coloniale au Cameroun avant et après son indépendance en 1960. Une reconnaissance diplomatique majeure, aux répercussions géopolitiques, mémorielles et économiques, qui s’inscrit dans la stratégie de rééquilibrage des relations franco-africaines du président français. « Il me revient d’assumer aujourd’hui le rôle et la responsabilité de la France dans ces événements », a écrit Emmanuel Macron dans un courrier adressé au président camerounais Paul Biya, publié le 12 août 2025. Cette reconnaissance s’appuie sur un rapport d’historiens de plus de 1 000 pages, remis en janvier 2025, présidé par Karine Ramondy, spécialiste des conflits coloniaux. Le document qualifie de manière explicite les actions militaires françaises de violences systémiques à caractère répressif, politique et meurtrier, contre les mouvements indépendantistes, en particulier l’Union des populations du Cameroun (UPC). Un tournant historique et stratégique De 1955 à 1961, les forces françaises ont conduit, selon les historiens, une guerre asymétrique contre les indépendantistes dans les régions de Sanaga-Maritime, Bamiléké et du Sud-Ouest. Estimations : des dizaines de milliers de morts civiles et militaires. Et, selon Emmanuel Macron, la guerre s’est poursuivie après l’indépendance, via le soutien de la France au régime autoritaire d’Ahmadou Ahidjo, premier président du Cameroun. Cette reconnaissance intervient alors que la France cherche à repositionner sa politique africaine, fragilisée par la montée de l’influence chinoise, turque et russe, et la remise en cause de sa présence militaire au Sahel. « Cette reconnaissance permet à la France de réactiver un lien stratégique affaibli, dans une région d’Afrique centrale où la compétition d’influence s’intensifie », estime un diplomate français sous couvert d’anonymat. Mémoire, politique et réparations : un équilibre délicat Sur le terrain, les réactions sont mitigées. Mathieu Njassep, président de l’Association des vétérans du Cameroun (Asvecam), déclare : « C’est bien, parce qu’il reconnaît. Mais nous attendons plus. La France peut payer des réparations. Elle a détruit des villages, des routes, tant de choses… » Le sujet des réparations financières ou symboliques, très sensible, n’est pas abordé dans la lettre présidentielle. Pourtant, il pourrait devenir un enjeu de négociation bilatérale, voire juridique, dans un contexte politique tendu à Yaoundé. Diplomatie des archives et intelligence stratégique Emmanuel Macron propose la création d’un groupe de travail franco-camerounais pour poursuivre la recherche et l’ouverture des archives. Cet engagement, au-delà du symbolisme, répond aussi à des logiques d’intelligence historique. « L’accès aux archives est une condition essentielle pour rétablir la vérité, mais aussi pour produire une mémoire partagée qui prévient l’instrumentalisation politique des blessures du passé », souligne Karine Ramondy. L’ouverture documentaire pourrait également permettre à la France de maîtriser le récit, à l’heure où la guerre informationnelle sur les réseaux sociaux devient un levier géopolitique. Repositionnement français en Afrique Cette annonce intervient dans un contexte régional marqué par le désengagement militaire français du Sahel, la perte d’influence en Afrique de l’Ouest, et la montée en puissance de la Russie via les groupes de sécurité privée. Dans ce cadre, l’Afrique centrale, historiquement francophile, apparaît comme une zone clé pour le redéploiement économique et stratégique français. Le Cameroun, fort de sa position géographique et de ses ressources (cacao, pétrole, bois, gaz naturel), reste un partenaire économique crucial, avec des échanges bilatéraux franco-camerounais avoisinant 1,1 milliard d’euros en 2024. Conclusion : vers une redéfinition postcoloniale ? En assumant la responsabilité de la France dans une guerre longtemps occultée, Emmanuel Macron cherche à solder une dette mémorielle, tout en réaffirmant une ambition : refonder la relation Afrique-France sur une base de vérité, sans pour autant ouvrir explicitement la voie à des réparations. Un pari délicat, entre devoir d’histoire, stratégie diplomatique, et impératifs géoéconomiques. Plusieurs épisodes mentionnés :

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Trump-Poutine/Sommet d’Alaska : Vers une paix à hauts risques en Ukraine ?

Le 15 août, Donald Trump et Vladimir Poutine se retrouveront pour un sommet inédit en Alaska, dans ce qui pourrait devenir un tournant stratégique dans la guerre en Ukraine. Derrière l’annonce, une équation géopolitique explosive : Washington pousse à un cessez-le-feu, Moscou réclame la légitimation de ses conquêtes, et Kiev tente de préserver son intégrité territoriale sans perdre le soutien occidental. « Il y aura un certain échange de territoires dans l’intérêt des deux parties », a déclaré Donald Trump, suggérant une reconnaissance implicite des lignes de front actuelles au profit d’une paix durable. Ce discours, confirmé par le Kremlin, fait suite à des mois de tractations informelles entre diplomates russes et américains. Le conseiller du président russe, Yuri Ushakov, a confirmé que « les deux dirigeants se concentreront sur une solution pacifique à long terme ». Du côté ukrainien, Volodymyr Zelensky a maintenu une ligne rouge : pas de paix sans pression maximale sur Moscou, tout en admettant une impasse militaire croissante. Une paix à quel prix ? L’équation territoriale et stratégique Le projet d’accord, selon les révélations de Bloomberg, entérinerait de facto l’occupation russe d’environ 20 % du territoire ukrainien, y compris les quatre régions partiellement occupées (Louhansk, Donetsk, Zaporijia et Kherson), sans compter la Crimée annexée en 2014. Les forces russes, bien que non entièrement maîtresses de ces zones, consolideraient leur présence au détriment d’un retrait militaire plus large. Ce compromis, présenté comme « réaliste » par certains cercles trumpistes, choque les stratèges européens. « Cela revient à institutionnaliser l’agression armée comme un levier diplomatique », alerte une source diplomatique française. « Le mieux que les Ukrainiens puissent faire est de rester fermes dans leurs conditions, tout en remerciant les États-Unis pour leur soutien », estime Tyson Barker, de l’Atlantic Council. Qui gagne, qui perd ? Donald Trump, en campagne présidentielle, vise ici un coup d’éclat diplomatique pour galvaniser son électorat et se repositionner en faiseur de paix. Vladimir Poutine, confronté à une guerre d’usure et à une économie sous sanctions, espère sécuriser ses gains sans recourir à une mobilisation accrue. Mais pour Zelensky, la marge est étroite. Accepter un tel compromis reviendrait à signer un aveu de défaite, avec des conséquences politiques et sociales incalculables. Or, l’Ukraine ne peut se permettre une rupture avec Washington, encore moins en pleine reconstruction. Du côté européen, l’inquiétude monte. Une paix précipitée sans garanties pourrait fissurer l’unité de l’OTAN, marginaliser les négociateurs européens, et ouvrir un précédent dans la gestion des conflits gelés. Conséquences économiques et sécuritaires Outre le volet militaire, l’accord redessinerait les routes énergétiques, les couloirs logistiques et les flux d’investissement en Europe de l’Est. La Crimée resterait une épine géostratégique dans le flanc sud de l’Ukraine, avec des implications sur la Mer Noire et les exportations céréalières mondiales. Washington miserait sur un allègement progressif des sanctions envers Moscou, en échange d’un arrêt des hostilités. Une approche qui divise les analystes : levier d’influence ou capitulation morale ? Une paix fragile, une victoire incertaine Le sommet d’Alaska pourrait poser les bases d’un nouveau paradigme sécuritaire en Europe de l’Est. Mais à quel prix ? Si un accord est trouvé, il devra être accepté non seulement par les chancelleries, mais aussi par les opinions publiques, ukrainienne en tête. Le dilemme est entier : sauver des vies maintenant, ou préserver l’intégrité nationale sur le long terme ? En géopolitique, la paix est rarement gratuite. En Alaska, elle pourrait s’acheter au prix d’une cession territoriale majeure. L’Histoire jugera. Les réaction de l’UE, de la Chineet de l’ONU attendues après le sommet du 15 août. Chiffres clés :

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