Culture & Patrimoine

France – Chute libre à Matignon : Bayrou éjecté, l’Afrique oubliée

François Bayrou n’aura tenu que 97 jours à Matignon, renversé par une motion de défiance historique.  Avec seulement 194 votes favorables contre 364 opposants, il devient le premier Premier ministre de la Ve République à échouer sur un vote de confiance qu’il n’était pas obligé de solliciter. Cette chute brutale met fin à une cohabitation de plus en plus conflictuelle avec Emmanuel Macron, marquée par des désaccords ouverts sur la politique budgétaire, la réforme fiscale, et la gouvernance africaine. L’Afrique : l’angle mort François Bayrou Sur le plan international, la politique africaine de François Bayrou a été quasi-invisible. Durant ses trois mois à Matignon, François Bayrou n’a laissé aucune empreinte significative sur la politique africaine de la France. Ni discours structurant, ni déplacement officiel, ni stratégie renouvelée : l’Afrique a été reléguée au second plan, dans un moment pourtant critique pour les relations franco-africaines. Face à la montée des régimes militaires hostiles à Paris au Sahel, à la progression de l’influence russe (notamment via les groupes paramilitaires comme Wagner), et au rejet croissant de la présence française dans plusieurs pays, François Bayrou a opté pour le silence, laissant le Quai d’Orsay et l’Élysée gérer seuls un dossier de plus en plus sensible. Cette posture en retrait a accentué la perception d’une France en perte totale de repères sur le continent africain, après les humiliations successives au Mali, au Burkina Faso et au Niger. Là où ses prédécesseurs à Matignon, même affaiblis, tentaient de jouer un rôle d’équilibre entre le président et les ministères, François Bayrou s’est contenté d’un rôle de figurant sur les grands dossiers internationaux. Ce désengagement a aussi privé la majorité d’une occasion de refonder le narratif de la France en Afrique, à l’heure où de nombreuses voix réclament une coopération moins verticale, plus économique et culturelle que sécuritaire. En interne, certains diplomates évoquent même une « perte de cap politique« , doublée d’une absence de coordination entre Matignon et le ministère des Armées, alors que les bases françaises ferment les unes après les autres dans une indifférence assumée du gouvernement. En définitive, la politique africaine de François Bayrou aura été celle du vide, symptomatique d’un Premier ministre affaibli, accaparé par les tensions budgétaires nationales, et sans appui diplomatique réel. Ce vide stratégique, dans une période où l’influence française est mise en cause sur tous les fronts, restera l’un des échecs silencieux de son bref passage à Matignon.

France – Chute libre à Matignon : Bayrou éjecté, l’Afrique oubliée Read More »

Malende, 24 Heures de Sang : Le conflit anglophone ressurgit en pleine campagne présidentielle

Alors que le pays se dirige vers une élection présidentielle majeure le 12 octobre, la résurgence des violences dans le Sud-Ouest remet la crise anglophone au cœur des priorités nationales et régionales. Une attaque à l’engin explosif improvisé suivie d’une embuscade a coûté la vie à neuf militaires camerounais les 5 et 6 septembre. Le drame, survenu dans la localité rurale de Malende, rappelle que le conflit dans les régions anglophones, entré dans sa neuvième année, reste un défi multidimensionnel pour l’État, malgré les efforts de stabilisation déployés depuis 2017. « Nos forces ont payé un lourd tribut pour la défense de l’intégrité nationale. Mais leur sacrifice ne sera pas vain », a déclaré Joseph Beti Assomo, ministre délégué à la Défense, lors d’un hommage officiel. Sécurité : entre progrès réels et vulnérabilités persistantes Depuis le lancement du plan de stabilisation du Nord-Ouest et du Sud-Ouest (NOSO), les autorités affirment avoir repris le contrôle de plusieurs zones sensibles. Toutefois, des groupes séparatistes armés continuent d’opérer dans des zones enclavées, recourant à des tactiques asymétriques. « L’utilisation d’explosifs artisanaux prouve l’évolution tactique de groupes isolés mais déterminés. Ce sont des menaces mobiles, difficiles à contenir par des moyens classiques », analyse le colonel (er) Douala Manga Bell, expert en stratégie militaire. Une guerre qui fragilise l’environnement des affaires Selon la Banque mondiale, le conflit a engendré une perte économique estimée à 1,2 milliard de dollars entre 2017 et 2024, en grande partie due à la désorganisation des chaînes de production agricoles (cacao, palmier à huile, banane) et au ralentissement du corridor logistique Douala–Mamfe–Ekok. « Les entreprises opérant dans la zone travaillent en mode résilient. L’État a sécurisé les zones économiques prioritaires, mais l’incertitude reste un frein à l’investissement direct étranger », note Dr. Brice Nsombo, économiste à l’Université de Yaoundé II. Une crise locale, aux résonances régionales Le Cameroun, pilier de stabilité au cœur du Golfe de Guinée, fait face à une instabilité territoriale qui, si elle n’est pas contenue, pourrait avoir des implications transfrontalières.« Le conflit reste contenu, mais il alimente des dynamiques régionales – trafic d’armes, flux de déplacés, fragilité des frontières », explique Marie Cissé, analyste à l’ISS Africa. « Le Nigeria suit de près la situation, notamment dans les États frontaliers de Cross River et Taraba ». 2025 : une présidentielle sous haute vigilance À un mois de l’élection présidentielle, les acteurs politiques adoptent des postures contrastées. Le gouvernement privilégie la continuité sécuritaire et institutionnelle, misant sur la « résilience de l’État ». L’opposition appelle à une relance du dialogue national. « La paix durable passe par une réponse à la fois politique, sociale et sécuritaire. Le dialogue reste ouvert pour ceux qui rejettent la violence », affirme une source proche de la primature. Certains leaders d’opinion anglophones plaident pour une réforme de la gouvernance territoriale, à travers un débat sur le fédéralisme ou le renforcement de la décentralisation. Dialogue et réconciliation : vers un nouveau format ? Malgré l’organisation du Grand Dialogue National en 2019 et la mise en place des Régions, la crise n’a pas totalement trouvé de solution politique. Des partenaires internationaux, notamment le Vatican et certaines ONG, continuent de proposer leur médiation.« Un compromis durable nécessitera une solution camerounaise, mais soutenue par des acteurs neutres. Il ne s’agit pas de céder à la division, mais d’apaiser une mémoire collective blessée », souligne un diplomate en poste à Yaoundé. Le drame de Malende réactive une réalité souvent reléguée au second plan dans le débat international : le Cameroun reste confronté à une crise hybride, à la fois militaire, politique, identitaire et économique. Pour les autorités camerounaises, l’enjeu est de parvenir à une désescalade durable, sans compromettre l’unité nationale. Pour les partenaires internationaux, le moment semble venu d’un engagement discret mais stratégique, avant que le statu quo ne dégénère en impasse prolongée. En chiffres (2025)

Malende, 24 Heures de Sang : Le conflit anglophone ressurgit en pleine campagne présidentielle Read More »

Banques communautaires : le moteur méconnu de la finance au Cameroun

Dans un paysage financier où les grandes banques traditionnelles semblent hors de portée pour nombre de Camerounais, émergent des forces souvent invisibles : les banques communautaires. Parmi elles, le Community Credit Company (CCC Plc) s’impose comme un acteur central, associant inclusion, proximité et innovation. CCC Plc : croissance, réseau et service Créée en novembre 1998 en tant que coopérative, transformée en société anonyme, CCC Plc est aujourd’hui une institution de microfinance de deuxième catégorie, réglementée par la COBAC, et active au Cameroun depuis plus de 24 ans. Une institution orientée client… mais fragile CCC se distingue par sa proximité, sa disponibilité de services gratuits, et ses innovations numériques. Toutefois, la pression réglementaire et les coûts de conformité restent élevés pour un acteur de cette taille. « Nous sommes traités comme des banques commerciales, alors que nous opérons avec les moyens du bord et pour des publics à très faible revenu », regrette un dirigeant du secteur microfinance. Comparaison : CCC vs CCA‑Bank — deux modèles complémentaires Institution CCC Plc CCA‑Bank Création 1998 comme coopérative, microfinance 1997 coopérative, devenue banque universelle en 2018 Réseau 18 succursales ≈ 54 agences (2024) et 60+ ATM Clientèle > 120 000 comptes 533 400 clients servis (2022) Actifs – 862 M USD (2022) Leadership DG : Ngoh Walters Tebid DG : Marguerite Fonkwen Atanga Le Crédit Communautaire d’Afrique Bank (CCA‑Bank), bien que né des principes de la microfinance, est devenu un acteur établi du secteur bancaire. Il affiche des performances solides, notamment via : Perspectives : vers une synergie entre proximité et institution CCC incarne l’inclusion financière de proximité : accessible, proche, flexible. CCA‑Bank représente la solidité institutionnelle, la diversification de services, et un accès aux financements internationaux. Pour les experts, l’avenir est dans une hybridation réussie : renforcer la capacité locale (CCC) tout en facilitant leur intégration au système bancaire formel (CCA‑Bank). « L’inclusion financière ne peut pas reposer uniquement sur les banques classiques. Les banques communautaires sont une réponse locale, agile et efficace aux défis de l’accès au financement », rappelle une spécialiste du secteur. Au Cameroun et en Afrique centrale, les banques communautaires comme CCC Plc jouent un rôle vital pour des millions de clients invisibilisés par le système bancaire traditionnel. Pour tirer pleinement parti de leur potentiel, il conviendra de décongestionner les contraintes réglementaires, accompagner la digitalisation, et favoriser les partenariats intelligents entre acteurs communautaires et banques universelles. C’est ainsi que se construit une finance réellement inclusive, durable et résiliente.

Banques communautaires : le moteur méconnu de la finance au Cameroun Read More »

CEMAC – Les chefs d’État d’Afrique centrale attendus à Bangui : enjeux politiques et économiques au menu

Les six chefs d’État de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC) sont attendus le 10 septembre 2025 à Bangui, pour la 16ᵉ session ordinaire de leur conférence, dans un contexte marqué par des tensions géopolitiques régionales, des défis monétaires et un agenda économique sous pression. La rencontre réunira notamment Paul Biya (Cameroun), Denis Sassou Nguesso (Congo), Brice Clotaire Oligui Nguema (Gabon), Mahamat Idriss Déby Itno (Tchad), Theodoro Obiang Nguema (Guinée équatoriale) et Faustin Archange Touadéra (Centrafrique), pays hôte du sommet. Cette réunion s’annonce stratégique pour l’avenir de la zone, notamment en matière de réformes économiques, de mobilité régionale, de sécurité transfrontalière et de la gestion du franc CFA, encore sous tutelle du Trésor français. Un sommet précédé par la session ministérielle de l’UEAC Le 9 septembre, la 43ᵉ session ordinaire du Conseil des ministres de l’UEAC (Union économique de l’Afrique centrale, bras économique de la CEMAC) préparera les grands dossiers soumis à l’arbitrage des chefs d’État. Parmi eux : l’avancement de la libéralisation du marché intérieur, la mise en œuvre des projets intégrateurs (infrastructures, énergie, numérique), et la restructuration des économies post-COVID. Des attentes fortes, un contexte fragile Alors que plusieurs pays de la CEMAC font face à des transitions politiques sensibles, à des pressions sociales internes et à un affaiblissement des réserves de change, cette session à Bangui pourrait aussi raviver le débat sur la réforme du franc CFA, la mutualisation des moyens de défense et la coopération énergétique régionale. « La stabilité régionale dépendra désormais autant des décisions politiques que de la solidarité économique », estime un diplomate sous-régional basé à Yaoundé.

CEMAC – Les chefs d’État d’Afrique centrale attendus à Bangui : enjeux politiques et économiques au menu Read More »

Coupes budgétaires américaines : l’Afrique en première ligne face à la réduction des opérations de paix

Les opérations de maintien de la paix des Nations unies, particulièrement actives en Afrique, subissent de plein fouet les coupes budgétaires décidées par l’administration Trump. La semaine dernière, près de 4,9 milliards de dollars d’aide étrangère ont été annulés, dont 800 millions initialement destinés aux missions de paix. Une décision qui inquiète fortement l’ONU, alors que la moitié de ces opérations se déroulent sur le continent africain. Parmi les missions menacées, la Monusco, déployée dans l’est de la République démocratique du Congo, pourrait perdre 4 000 casques bleus, soit un tiers de ses effectifs. Le Soudan du Sud et la Centrafrique sont également concernés. Ces réductions pourraient avoir des conséquences dramatiques sur la protection des civils dans ces zones à haut risque. L’administration américaine justifie sa décision en dénonçant les échecs des missions, des affaires de corruption, ainsi que des abus commis par certains soldats de la paix, notamment en RDC et en Centrafrique. Washington accuse également l’ONU de mauvaise gestion financière, détournant selon elle les fonds destinés à la sécurité. Face à cette crise, l’ONU lance le plan d’austérité « ONU 80 » incluant le gel des embauches, des réductions de dépenses, et la suspension de certaines activités. De plus, la mission de l’Union africaine en Somalie (Aussom), en lutte contre les terroristes d’al-Shebab, reste sans financement solide après le retrait du soutien américain. Alors que les conflits se multiplient sur le continent, cette baisse du financement international pourrait fragiliser davantage des régions déjà instables.

Coupes budgétaires américaines : l’Afrique en première ligne face à la réduction des opérations de paix Read More »

Remittances : la manne invisible qui redessine l’économie africaine

Les transferts de fonds des diasporas africaines dépassent désormais l’aide publique au développement et l’investissement direct étranger. Et pourtant, leur potentiel structurel reste largement inexploité. Enquête sur un levier économique sous-estimé. 168 milliards de dollars. C’est le montant que pourraient atteindre les transferts de fonds vers l’Afrique d’ici 2043, selon une étude prospective de l’Institut pour les Études de Sécurité (ISS). Si ce scénario se concrétise, il placerait les remittances comme l’un des principaux moteurs du développement économique du continent, loin devant l’aide internationale et parfois même les investissements directs étrangers. Et pourtant, cette manne financière reste encore mal canalisée, peu intégrée aux circuits formels, et surtout politiquement sous-exploitée. Une source de financement stable… mais négligée En 2024, les envois de fonds des diasporas africaines ont atteint un niveau record de 95 milliards de dollars. Ces flux, répartis entre consommation familiale, dépenses de santé, frais scolaires et microprojets économiques, représentent 5,1 % du PIB africain contre 3,6 % en 2010. Dans des pays comme le Kenya, la Gambie, ou encore le Nigeria, les remittances représentent un filet de sécurité sociale parallèle. En Somalie, au Libéria ou au Soudan du Sud, elles atteignent parfois plus de 10 % du PIB, devenant un pilier économique vital dans des contextes d’effondrement étatique ou de dépendance humanitaire. Mais contrairement à l’investissement direct étranger – concentré sur les infrastructures, les matières premières ou les zones urbaines – les transferts de fonds irriguent directement les ménages, en milieu rural comme urbain, et répondent à des besoins quotidiens immédiats. Pourquoi cette puissance financière reste informelle Malgré leur poids économique, près de la moitié des remittances circulent encore en dehors des circuits bancaires formels. En cause : les coûts élevés de transfert (jusqu’à 8 % en moyenne sur le continent), des réseaux financiers peu accessibles, notamment en zones rurales, et une méfiance historique vis-à-vis des institutions bancaires. Les systèmes informels, les hawalas, ou les transferts en espèces persistent, rendant ces flux difficiles à tracer, hors de portée des politiques fiscales, et peu mobilisables pour l’investissement structurant. Fintech, mobile money et ambitions panafricaines Un vent de changement souffle pourtant. Grâce à la montée en puissance des fintech africaines et des services de mobile money, les transferts transfrontaliers deviennent plus rapides, moins chers et plus accessibles. Des plateformes comme M-Pesa, Wave, Chipper Cash ou Eversend redéfinissent les circuits traditionnels. À l’échelle continentale, le système de paiement PAPSS (Pan-African Payment and Settlement System), soutenu par la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf), vise à unifier les corridors de transfert, en réduisant la dépendance au dollar et aux systèmes de compensation occidentaux. Mais malgré ces innovations, peu de pays africains ont mis en place une véritable stratégie nationale sur les remittances, au-delà de simples statistiques. Le double défi : canaliser sans contrôler L’enjeu n’est pas seulement technique. Il est politique et géoéconomique. Certaines nations expérimentent des obligations « diaspora », ou des incitations fiscales à l’investissement communautaire, notamment dans l’immobilier ou les PME. D’autres étudient la création de fonds d’épargne transnationaux ou de polices d’assurance adossées aux envois réguliers. Mais la tentation du contrôle étatique, notamment par la fiscalité ou la régulation excessive, pourrait décourager les diasporas. À cela s’ajoute le risque d’exposition aux chocs économiques mondiaux : inflation, récession dans les pays d’accueil (Europe, États-Unis, Golfe), ou instabilité monétaire. La cybersécurité devient également un enjeu critique à mesure que les flux se numérisent. Intra-Afrique : une dynamique méconnue mais en plein essor Fait notable : près de 20 milliards de dollars de transferts intra-africains ont été enregistrés en 2023. Cette évolution traduit l’essor des migrations régionales Sud-Sud, et le rôle croissant des pays comme l’Afrique du Sud, le Gabon ou la Côte d’Ivoire comme nouvelles terres d’accueil de travailleurs ouest et centrafricains. C’est aussi une opportunité : penser la migration africaine non plus comme un problème, mais comme une ressource économique structurante. Transformer l’informel en pouvoir économique Les remittances ne doivent plus être vues comme un « revenu de secours », mais comme un levier stratégique de transformation économique. Pour cela, les États africains doivent : À l’heure où l’aide internationale s’essouffle et où les dettes explosent, les diasporas africaines pourraient bien représenter le capital politique et économique le plus fiable du continent. À condition de leur tendre la main.

Remittances : la manne invisible qui redessine l’économie africaine Read More »

France‑Cameroun : Paris salue Biya, une relation stratégique plus que jamais calibrée

« Paul Biya m’est apparu comme un homme d’État qui tient véritablement les manches du pays », confie Thierry Marchand, au terme d’une audience empreinte de respect et d’enjeu, marquant son engagement à bâtir une relation « adaptée au XXIᵉ siècle ». Un au revoir symbolique, un partenariat recalibré Le 29 août 2025, au Palais de l’Unité, Paul Biya a reçu Thierry Marchand, ambassadeur de France en fin de mission. Cette audience, dense et feutrée, a permis d’esquisser les contours d’un partenariat bilatéral solide, multiforme et empreint de réciprocité. Politique, économique, culturel, sécuritaire : les domaines évoqués témoignent d’une volonté partagée d’asseoir les relations sur de nouveaux piliers. Thierry Marchand souligne qu’il a retrouvé un président conscient, informé et résolu, prêt à se lancer dans une nouvelle campagne présidentielle – une illustration de la posture de stabilité que Paris valorise chez son homologue camerounais. Géopolitique et diplomatie stratégique Cette transition diplomatique s’inscrit dans une reconfiguration du partenariat France–Cameroun, autrefois asymétrique, désormais pensé comme une tresse tissée de lucidité, d’amitié et de coopération adaptative. La visite d’adieu de l’ambassadeur intervient dans un contexte africain où les États ré-évaluent leurs alliances. Le Cameroun, avec sa stabilité relative, sa position stratégique en Afrique centrale, et ses atouts portuaires et sécuritaires, demeure un pilier pour les intérêts français dans la région. Coopération économique et mémoire partagée Marchand incarne aussi cette volonté française de co-construire des initiatives durables : qu’il s’agisse de visa simplifiés pour les alumni camerounais, d’investissements économiques – plus de 200 entreprises françaises opèrent localement-, ou encore du financement par an, à hauteur de 200 millions d’euros, dans le cadre des dispositifs du C2D (Contrat de Désendettement et Développement). Sur le plan mémoriel, la remise du rapport de la commission mixte (historique 1945–1971) constitue un jalon fort, phase décisive de « thérapie collective » selon les mots mêmes de l’ambassadeur. Ces travaux ont été remis à Emmanuel Macron en janvier 2025 dans un effort de transparence et de réconciliation historique. Sécurité, enjeux globaux et diplomatie multiforme L’entretien au Palais d’Étoudi a également permis de s’inscrire dans une actualité mondiale tourmentée : crises sécuritaires en Europe, au Moyen-Orient comme en Afrique ont été évoquées durant 90 minutes d’échanges bilatéraux approfondis. Une dimension qui souligne l’importance stratégique du Cameroun pour la diplomatie française, notamment dans un monde multipolaire et fracturé. Une relation Biya–France marquée par la continuité diplomatique Depuis François Mitterrand jusqu’à Emmanuel Macron, la relation entre la France et Paul Biya s’est articulée autour de la stabilité comme boussole. François Mitterrand le considérait comme un « homme de dialogue » ; Jacques Chirac comme un garant de la francophonie ; Sarkozy fut plus distant, tandis que Emmanuel Macron, depuis 2022, a tenté d’opérer un aggiornamento mémoriel et stratégique. Mais le fond reste inchangé : le soutien français ne vise pas une alternance, mais une transition contrôlée.

France‑Cameroun : Paris salue Biya, une relation stratégique plus que jamais calibrée Read More »

L’Afrique face à sa pire crise alimentaire depuis des décennies

L’Afrique est confrontée à une crise alimentaire d’une ampleur sans précédent. Plus de 282 millions de personnes, soit plus d’un Africain sur cinq, sont aujourd’hui touchées par la faim, selon Gilbert Phiri, coordinateur principal de l’Initiative Faim Zéro pour l’Afrique à la Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge (FICR). Dans un entretien accordé lundi, l’expert a mis en garde contre une détérioration rapide de la sécurité alimentaire, accentuée par une combinaison de facteurs : chocs climatiques, conflits persistants et instabilité économique. «  L’Afrique est frappée de plein fouet. La sécheresse en Afrique australe, les conflits dans la Corne de l’Afrique et l’inflation généralisée aggravent une situation déjà critique », a-t-il déclaré. Une urgence continentale Les chiffres sont alarmants. En Afrique de l’Ouest et du Centre, 52 millions de personnes seront menacées de faim pendant la période de soudure de 2025, un record historique. En Afrique australe, des pays comme le Zimbabwe, la Zambie, le Malawi ou la Namibie enregistrent jusqu’à 40 % de leur population en insécurité alimentaire aiguë. La Corne de l’Afrique est également en alerte : plus de 69 millions de personnes y sont confrontées à une faim aiguë, selon les données du FSNWG (Groupe de travail sur la sécurité alimentaire et la nutrition). Le Rapport mondial sur les crises alimentaires 2025 confirme que plus de 85 millions de personnes sont affectées dans cette région, incluant le Soudan et le Soudan du Sud. La malnutrition infantile explose Autre indicateur inquiétant : la malnutrition infantile atteint des sommets. Dans plusieurs pays, un enfant sur trois est sous-alimenté. La Somalie affiche les taux les plus élevés, suivie du Tchad, de la Zambie, de l’Ouganda, du Kenya et de la Guinée-Bissau. « Cette situation n’est pas une fatalité. Mais il est urgent d’agir », insiste Gilbert Phiri. Vers des solutions durables Pour la FICR, sortir de cette crise ne pourra pas se faire uniquement par l’aide humanitaire d’urgence. Il faut des investissements structurants : renforcer les systèmes alimentaires locaux, améliorer la résilience climatique, soutenir les communautés rurales, et garantir une meilleure coordination internationale. « Sans une action mondiale rapide et coordonnée, des millions de vies sont en jeu », alerte le coordinateur régional. Alors que la faim progresse, le continent africain est à un tournant décisif. Entre réponses humanitaires et politiques agricoles ambitieuses, l’enjeu est de taille : garantir à long terme la souveraineté alimentaire de l’Afrique.

L’Afrique face à sa pire crise alimentaire depuis des décennies Read More »

Paris-Dakar : la visite de Faye marque la fin d’un cycle et le début d’un nouvel équilibre

« Nous voulons bâtir une relation assainie, fondée sur le respect mutuel, l’écoute et les intérêts partagés », a déclaré le président sénégalais Bassirou Diomaye Faye, à l’issue de son entretien avec Emmanuel Macron, le 27 août 2025 à l’Élysée. Un voyage hautement symbolique dans une relation ancienne La visite d’État du président Faye à Paris s’inscrit dans un contexte à la fois mémoriel et géostratégique. Depuis l’indépendance du Sénégal en 1960, la France a entretenu une relation spéciale, souvent qualifiée de « privilégiée », avec Dakar – autrefois capitale de l’Afrique-Occidentale française (AOF). Léopold Sédar Senghor, premier président sénégalais, avait misé sur une coopération franco-sénégalaise forte, notamment dans les domaines militaire, éducatif et monétaire. Cette relation, bien que restée stable pendant des décennies, a été régulièrement critiquée pour son asymétrie. La visite du président Faye, premier chef d’État issu d’une alternance radicale et anti-système, intervient alors que le continent africain reconfigure en profondeur ses partenariats extérieurs. Sécurité : la fin d’une présence militaire continue depuis 1960 Le retrait complet des troupes françaises du Sénégal en juillet 2025 met un terme à plus de six décennies de présence militaire permanente. Depuis 2011, seule une coopération résiduelle était maintenue via la base de Ouakam (rebaptisée Camp Dial Diop). Avec la restitution des derniers sites à l’armée sénégalaise, la coopération militaire se recentre sur la formation (cyberdéfense, lutte anti-terroriste), sans présence étrangère permanente. « C’est une souveraineté retrouvée, sans rupture brutale », analyse un diplomate africain à Paris. Dans un contexte de rejet croissant de la présence militaire étrangère en Afrique de l’Ouest, cette approche graduelle distingue le Sénégal de ses voisins sahéliens. Économie : vers un partenariat rééquilibré La France reste un partenaire majeur : plus de 450 entreprises françaises sont actives au Sénégal, représentant près de 12 % des importations du pays et 17 % des IDE (investissements directs étrangers). Le président Faye a rencontré le patronat français au MEDEF pour plaider un nouveau modèle de partenariat, tourné vers la jeunesse, la technologie et la souveraineté productive. L’ambition est claire : réorienter la coopération économique vers l’investissement productif, les infrastructures durables, les énergies renouvelables, l’économie numérique et la formation qualifiante. Mémoire : le dossier Thiaroye comme test de sincérité La visite a aussi remis sur la table la question du massacre de Thiaroye (1944), au cours duquel plusieurs dizaines de tirailleurs sénégalais furent abattus par l’armée française après avoir réclamé leur solde. Le président Faye a réitéré sa demande de reconnaissance officielle et de déclassification des archives. Ce geste serait, selon lui, « une étape nécessaire pour tourner la page de la relation postcoloniale ». Vers un nouveau pacte franco-sénégalais ? La visite de Bassirou Diomaye Faye pourrait bien marquer un tournant historique dans les relations entre Paris et Dakar. Moins idéologique que celle du Mali ou du Burkina Faso, plus structurée que celle du Niger, la diplomatie sénégalaise actuelle veut s’affirmer souveraine sans être hostile, coopérative sans être dépendante.

Paris-Dakar : la visite de Faye marque la fin d’un cycle et le début d’un nouvel équilibre Read More »

Classement de Shanghai 2025 : l’Afrique décroche du Top 1000

Avec seulement 17 universités classées contre 20 l’an passé, le continent enregistre un recul inquiétant qui reflète ses fragilités chroniques en matière de recherche, de financement et de gouvernance universitaire. Le classement 2025 de Shanghai Ranking, l’un des plus influents au monde dans le domaine universitaire, confirme une tendance inquiétante : l’Afrique peine à s’imposer dans l’élite académique mondiale. Cette année, seulement 17 universités africaines apparaissent dans le Top 1000, contre 20 en 2024. Une contre-performance significative, dans un contexte mondial où la compétition pour l’excellence académique s’intensifie. Un classement dominé par l’Occident Comme chaque année, les premières places sont largement trustées par les universités anglo-saxonnes : Harvard, Stanford, MIT, Cambridge ou encore Berkeley dominent le haut du tableau. Sur les 20 premières institutions mondiales, 16 sont américaines, 2 britanniques, 1 française (Paris-Saclay) et 1 chinoise (Tsinghua). Le Shanghai Ranking repose sur des critères strictement axés sur la performance scientifique et académique : nombre de Prix Nobel, médailles Fields, chercheurs les plus cités, publications dans Nature et Science, ou encore impact des publications indexées. Ces indicateurs favorisent les établissements disposant d’un écosystème de recherche robuste et financé, ce qui creuse l’écart entre les grandes puissances universitaires et les pays en développement. Afrique : une performance concentrée et inégale Sur les 17 universités africaines présentes dans le classement : Deux pays concentrent donc plus de 80 % des universités africaines classées. Le reste du continent, y compris des poids lourds démographiques comme le Nigeria, le Kenya ou la RDC, est absent du classement, révélant une fracture dans l’investissement et les politiques de l’enseignement supérieur. Les mieux classées sont sud-africaines : Côté égyptien, Cairo University arrive en tête, dans la tranche 401-500, suivie d’Alexandria University et Ain Shams University. Les autres institutions africaines présentes : Un recul inquiétant Trois universités africaines sortent du classement cette année : Ce retrait souligne le manque de continuité et la fragilité des politiques de recherche sur le continent. Une dynamique à reconstruire Le recul africain s’explique par plusieurs facteurs structurels : À titre de comparaison, des pays comme la Chine, l’Inde ou la Corée du Sud, grâce à une stratégie nationale d’excellence académique, voient leur nombre d’universités classées progresser chaque année. Recommandations pour un sursaut africain Pour espérer remonter dans les classements mondiaux, les pays africains doivent : Le Shanghai Ranking 2025 agit ici comme un miroir sévère, révélant à la fois les retards du continent et le potentiel encore inexploité de son capital humain. Pour transformer la formation supérieure en levier de développement, l’Afrique devra investir massivement dans l’excellence scientifique – et rompre avec le cycle de sous-performance.

Classement de Shanghai 2025 : l’Afrique décroche du Top 1000 Read More »

Scroll to Top